Le chef de l’État, Azali Assoumani a fait sa prière dans la ville de Mandza (Mbude) accompagné d’une grande délégation. Une partie de la ville à l’extérieur et à l’intérieur a manifesté son mécontentement face à l’arrivée du chef de l’État et de son fils, Nour el-Fath Azali.
Par MiB
À défaut de montrer des réalisations ou des réussites dans les domaines économiques ou sociaux, des réussites qui pourraient susciter une adhésion au régime autoritaire mis en place depuis 2018, le chef de l’État semble vouloir reprendre ses tournées dans les régions et les villages pour être vu pendant les prières du vendredi. Il a sans doute l’intention d’innover en se faisant accompagner par son fils, Nour el-Fath Azali, à qui il a confié presque tous les pouvoirs exécutifs, législatifs, mais aussi économiques, en plus de diriger le parti CRC (Parti pour le Renouveau des Comores). D’ailleurs, depuis une déclaration ambiguë du chef de l’État, les Comoriens s’attendent à ce que Nour el-Fath succède à son père, à la fin du mandat en 2029. L’affaiblissement et la réduction des compagnons du père en marionnettes ou pour reprendre le terme en vogue à Moroni « en baby-sitters » laisse comprendre à qui veut l’entendre qu’Azali Assoumani souhaite transmettre le pouvoir à son fils.

Banderoles et tags hostiles
De retour de Madagascar, le chef de l’État avait tenu à faire la prière du vendredi à Simboussa, dans le Mbadjini, le 2 mai. De retour d’Égypte, c’est dans le village de Mandza, dans la région du Mbude, qu’il a décidé de faire sa prière de vendredi. Son fils, qui est aussi le vrai chef du parti au pouvoir (CRC) a décidé de suivre son père, sous le prétexte que le ministre Bacar Mvoulana allait inaugurer « sa » permanence parlementaire dans ce village d’où est issue sa suppléante, Zalfata Saïd Omar, qui lui garde la place à l’Assemblée de l’Union tant qu’il est ministre.
La veille de l’arrivée du chef de l’État, dans la nuit, la ville a été couverte de tags et banderoles hostiles au chef de l’État et à son fils. Ce dernier était particulièrement visé. En effet, sur une des banderoles on pouvait lire : « Nour el Fath n’est pas le bienvenu dans le Mboude » et sur les murs des inscriptions rappelaient que le nom de l’actuel Secrétaire général du gouvernement avait été cité dans l’affaire de Pandora Papers (Lire dans Masiwa n°349 du 11 octobre 2021 un article qui a valu bien des déboires à notre site internet, nous avons dû le réintroduire après sa suppression : « Pandora papers. Les ingénus des Comores »).
Une opposition à cette visite s’est manifestée, d’une manière virulente, mais a été rapidement maitrisée. Dans la diaspora, cette opposition à l’arrivée du chef de l’État à Mandza a été incarnée par Omar Mirali, un des membres fondateurs du mouvement Dawula ya Haki (« État de droit ») et opposant du régime Azali. Omar Mirali, originaire du village de Mandza, c’est l’homme qui, avec sa petite bande, est entré à l’ambassade des Comores à Paris en 2019 et l’a occupée pendant plusieurs heures en signe de contestation des fraudes aux élections présidentielles en 2019. Il avait déjà défié le fils Azali de se rendre dans sa ville et l’avait prévenu qu’il pourrait rencontrer des problèmes.
Les militants CRC se sont dépêchés d’effacer toute trace d’opposition à l’arrivée du chef de l’État dans la localité, mais des photos avaient déjà été prises et envoyées dans les réseaux sociaux.
Une mosquée pleine de fidèles
Le chef de l’État a décidé de se faire accompagner dans le Mbude par une grande délégation composée de ministres, de députés (dont le président de l’Assemblée, Moustadrane Abdou), de directeurs de sociétés d’État ou de l’administration et des personnalités du parti au pouvoir. Le Mbude reste encore le fief de l’ancien ministre, rétrogradé au rang de conseiller du chef de l’État, Houmed Msaidié, mais des jeunes commencent à apparaitre et ne revendiquent pas forcément leur lien avec l’ancien leader du parti Radhi, se rattachent directement à Nour el-Fath Azali ou à son père. Il en est ainsi du ministre de l’Éducation nationale, Bacar Mvoulana et des jeunes qui l’entourent, même s’ils craignent le courroux de leur ancien mentor et le désignent encore comme leur leader dans les réseaux sociaux.
Pour cette prière à Mandza, le fils d’Azali Assoumani a composé, en parallèle, sa propre délégation, officiellement pour venir inaugurer la permanence parlementaire installée chez la députée actuelle du Mbude, suppléante du ministre, Zalfata Saïd Omar.
La mosquée de Mandza était remplie, mais les opposants se sont empressés de déclarer, comme souvent quand Azali Assoumani arrive dans un village hostile, que les habitants n’ont pas prié sur place et que c’est la délégation amenée de Moroni et des villages environnants qui a prié avec le chef de l’État.
Après la prière, la délégation du parti CRC conduite par le Secrétaire général du gouvernement a pu assister dans une ambiance bon enfant à l’inauguration de la permanence parlementaire dans le même village. La bonne ambiance a pu permettre au ministre de l’Éducation d’affirmer dans une déclaration faite sur son mur Facebook que Nour el-Fath Azali a été bien reçu dans le Mbudé. Le ministre, comme il en a l’habitude maintenant, s’en est pris avec un certain mépris à la diaspora, conscient de l’origine des attaques que son mentor a subi dans sa région.
Omar Mirali et ses partisans expliquent, également dans les réseaux, qu’à distance, ils ont pu montrer qu’une partie de la population de Mandza n’était pas favorable à cette venue du chef de l’État et de son fils pour la prière de vendredi.
Comme pour menacer Omar Mirali qui a téléguidé cette opposition à l’arrivée dans sa ville natale d’Azali Assoumani et de son fils, les autorités ont arrêté et mis en prison, sans aucune forme de procédure judiciaire, l’oncle de ce dernier. Omar Mirali avait menacé de s’en prendre lui aussi à des familles de membres de la CRC si son oncle n’était pas libéré. Il a appelé ces derniers à la raison pour ne pas que tous arrivent à des actes extrajudiciaires dans le village. Les autorités ont finalement relâché l’oncle hier dimanche.
Ce n’est pas la première fois que le gouvernement Azali décide d’arrêter des innocents pour faire pression sur les militants politiques qui se cachent dans le pays ou qui sont dans la diaspora. Mais, Omar Mirali explique qu’il ne mêle pas sa famille à ses actions politiques. Visiblement, cela n’a pas suffi.