Le verdict du procès pour diffamation et cyberharcèlement opposant Nourdine Mparti alias Bachar à la commissaire au plan Najda Saïd Abdallah a été rendu le 12 juin au Palais de Justice de Moroni. Sans surprise, l’ancien influenceur a été condamné à 5 ans de prison ferme, 4 millions FC d’amende et 5 millions de dommages et intérêts. Pour son avocat Djamal El-dine Bacar, cette condamnation rend tout débat quasi impossible et laisse perdurer des situations ubuesques et juridiquement incompréhensibles.
Par Propos recueillis par Hachim Mohamed
Masiwa – Me Djamal El-dine, avez-vous été surpris par la condamnation de votre client ?

Djamal El-dine Bacar – D’abord, sachez que l’une des exceptions que j’ai soulevées au prétoire, c’est le fait que Bachar ne s’appelle pas Abdou Salam Ibrahim Mpingo. Son nom exact est Nourdine Mparti. Juridiquement, la décision de la justice ne peut pas s’appliquer à mon client qui ne porte pas ce nom d’Abdou Salam Ibrahim Mpingo.
À l’énoncé du verdict, ce quidam a été condamné à cinq ans d’emprisonnement (le Procureur avait demandé 6 ans), combiné d’une amende de quatre millions FC et de dommages et intérêts de cinq millions FC. L’avocat adverse avait demandé 100.000.000 F, mais cela a été ramené à la somme de 5.000.000 FC.
Masiwa – Pourquoi vous récusez cette décision de justice ?
Djamal El-dine Bacar – D’emblée on a une situation ubuesque dans ce verdict. On ne porte pas plainte contre quelqu’un en utilisant son surnom pour la simple et bonne raison que selon l’article 750 du Code de procédure pénale, une plainte doit comporter le nom propre de la personne poursuivie. À cette audience mon client n’a pas été jugé aujourd’hui. On nous parle de la condamnation d’un certain Abdou Salam. Auquel cas, le verdict est destiné à ce fameux Abdou Salam, mais pas à mon client qui, encore une fois, s’appelle Nourdine Mparti.
Masiwa – Quelle a été votre réaction face à cette situation insolite ?
Djamal El-dine Bacar – Apres avoir brandi devant le juge la pièce d’identité où on voit marqué noir sur blanc le nom et prénom exacts de mon client, j’ai eu à demander qu’on annule cette procédure et charger un huissier de lancer une autre conformément à la loi.
Masiwa – Et votre client est où actuellement ?
Djamal El-dine Bacar – Présentement mon client est en prison non pas pour ce qui s’est passé aujourd’hui, mais il est sous le coup d’une autre procédure qui est en instruction depuis son rapatriement. Pour cette autre plainte, c’est l’État comorien qui s’est autosaisi et a lancé une enquête. C’est le parquet qui gère cette procédure sans la partie civile. Pour revenir à l’affaire jugée, le perdant est Ali Ibouroi dans la mesure où avec lui on a respecté la forme et le fond en matière de condamnation. Par contre, compte tenu des arguments livrés, moi je n’ai pas perdu le procès.
Masiwa – Maître, pourriez-vous revenir sur cette affaire de détention provisoire ?
Djamal El-dine Bacar – En fait, Bachar a trois procédures : la plainte de Nadjda Saïd Bacar, l’escroquerie et une autre devant l’instruction. Dans ces deux dernières affaires, il y a des mandats de dépôt contre lui.
Masiwa – Vous avez dit que la source de votre client n’est autre que la cohorte des compatriotes du régime, qui auraient été démasqués. De qui s’agit-il ?
Djamal El-dine Bacar – La source des noms cités par Bachar est Bachar lui-même qui les a cités, mais ces noms lui ont été fournis par des gens qui sont sur place aux Comores ou en France.
Masiwa – Il y a les personnes qui ont soudoyé Bachar en lui donnant de la matière pour ses « live » de dénigrement et de divulgation de secrets d’État. Vous avez des noms ?
Djamal El-dine Bacar – Dans l’affaire précise de Nadjda Saïd Abdallah, les personnes qui ont comparu sont les personnes que la victime a citées, donc la justice ne pouvait que juger celles-là.
Masiwa – Parmi ces compatriotes poursuivies, il y en a qui sont au pays, d’autres à l’étranger…
Djamal El-dine Bacar – Dans le cadre du procès de Nadjda Saïd Abdallah, et pas des procédures en instruction, ce sont des personnes travaillant dans l’administration de l’État, je ne peux pas citer de noms malheureusement.
Masiwa – Maitre, vous avez dit que beaucoup d’éléments n’ont pas été versés dans le dossier. Pourquoi, selon vous ?
Djamal El-dine Bacar – Oui, il y a eu des choses qui n’ont pas été dites, des personnes qui sont citées comme témoins alors qu’elles étaient carrément impliquées, des personnes impliquées qui n’ont pas été citées.
Masiwa – Pire, vous affirmez que les personnes sources sont toutes du régime, aucun de l’opposition…
Djamal El-dine Bacar – Les personnes impliquées dans l’affaire de Nadjda Saïd Abdallah, comme témoins et prévenus, sont effectivement proches du pouvoir en place de près ou de loin.
Masiwa – Et quand vous dites que Bachar assume ses responsabilités. Cela veut dire quoi ?
Djamal El-dine Bacar – Bachar assume ce qu’il a dit et ne va pas chercher à tromper la Justice, ce qui n’est pas le cas pour ses informateurs qui nient.