Le 14 décembre 2024, Mayotte est frappée de plein fouet par le cyclone Chido. Le nord et le centre de l’île sont les plus touchés. Les habitants de l’île ne sont pas les seuls à connaître le pire. Le paysage paradisiaque de l’île aux parfums est complètement défiguré, la faune et la flore ont payé un lourd tribut. Il est vrai que le dégât matériel est énormissime. Des maisons détruites, des champs saccagés. Mais il y a aussi les terres agricoles qui sont quasiment détruites. Les arbres, cocotiers, manguiers, arbres à pain, bananiers, tiges de maniocs qui constituent à cent pour cent l’agriculture vivrière des Maorais sont à terre. Les animaux, tels les makis, les oiseaux, les chauves-souris… souffrent à la recherche de nourriture.
Par Djo Bacari
Les hommes aussi cherchent de quoi se nourrir, surtout à l’approche du ramadan. Ceux qui ont des revenus fixes se rendent dans les magasins Carrefour, Sodifram, Sodicash, Somaco, Douka-Bé, mais il manque de beaucoup de produits de première nécessité. Ceux qui n’ont pas de revenu fixe, les réfugiés et les clandestins peinent à se nourrir. Les aides viennent au compte-goutte, bien que la distribution de produits alimentaires et de l’eau a commencé dès le surlendemain du cyclone, déclaré très rapidement catastrophe naturelle par le gouvernement de François Bayrou.

Les aides sont là, mais la population, qu’elle soit en situation régulière ou clandestine dit ne pas en profiter comme elle pouvait l’espérer.
Même quand cette aide est distribuée, il y a le choc des cultures. Donner une bouteille d’eau d’un litre, deux sachets de vermicelles, trois boites de sardines et un petit sac de deux kilos de farine à une famille nombreuse composée des deux parents et cinq à sept enfants est difficile à concevoir. En temps normal, les familles achètent deux à trois cartons d’ailes de poulet, deux à trois cartons de cuisse de poulet, un à deux sacs de riz de vingt kilos chaque, un à deux cartons de poissons, plusieurs packs d’eau d’un litre et demi ou de cinquante centilitres et d’autres produits pour le mois.
Il est vrai que les militaires, les pompiers, les agents de la Croix-Rouge française envoyés sur place pour apporter leur soutien aux sinistrés s’emploient activement pour éviter le pire. Les hélicoptères qui transportent de l’alimentation vers les communes ne cessent de faire des va et viens, mais en réalité ce qu’ils transportent est en quantité insuffisante, très minime au vu des besoins. Il est urgent de revoir la capacité de cette aide en termes de provision pouvant suffire à ceux qui sont vraiment dans le besoin. Beaucoup de familles maoraises disent qu’elles sont violemment touchées par Chido, mais sont oubliées dans la distribution des aides humanitaires et constatent qu’elles ne sont attribuées qu’aux seuls « étrangers ». Une déclaration à prendre avec un peu de distance et de raisonnement critique, car des étrangers aussi surtout clandestins disent ne pas bénéficier de ces aides qui sont pour eux destinées qu’aux seuls Maorais.
Les communes de Mayotte ont fini par refuser de s’occuper de la distribution des aides octroyées ou pilotées par la préfecture, car cette dernière les accuse de mauvaises gestions. L’aide ne profiterait qu’aux agents municipaux. Les dégâts sont énormes encore une fois, il serait peut-être mieux que les représentants de l’État et des Collectivités territoriales coordonnent leurs actions en travaillant conjointement pour gérer cette crise qui a bouleversé le quotidien des habitants de l’île.
Pour les aides, les institutions telles que l’Éducation nationale, les organisations de santé et d’autres ont certes apporté une aide financière à leurs employés respectifs, mais pas toutes encore.
Le cyclone Chido a provoqué de nombreuses pertes humaines. La préfecture parle de trente-neuf morts, mais ne fournit pas plus de détails aux journalistes. Un chiffre que beaucoup de personnes contestent à voix basse. Selon ces personnes, le cyclone a été si violent qu’il doit sûrement avoir plusieurs morts que ceux recensés par le préfet.
Les bidonvilles de Kaweni, Doujani, Tsoudzou, Koungou, Dzoumoegné, Vahibé, Combani pour ne citer que ceux-là étaient entièrement à terre. Toute l’île était jonchée de déchets lourds, naturels et ménagers. Les journées étaient couvertes par l’odeur désagréable, accompagnée de sirènes de pompiers, gendarmes, police, SMUR et Croix-Rouge.
Un mois après le passage du cyclone Chido, le paysage de Mayotte ressemble à un champ de bataille. On se croirait à dans les forêts de Verdun ou de la Somme après la Première Guerre mondiale (1914-1918). Le sentiment qui domine dans l’île est celui de l’abandon. Beaucoup d’habitants de Mayotte restent convaincus que l’État les a abandonnés pourtant le Premier ministre François Bayrou, les ministres de l’Éducation nationale et celui des Outre-mer, respectivement Elisabeth Borne et Emmanuel Valls, sont venus après le passage de quelques heures du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau qui a choqué les habitants de Mayotte.
Ce qui est certain c’est que l’État poursuit son idée de reconstruire rapidement Mayotte. Quand et comment ? Tout le monde à Mayotte est impatient de découvrir le plan et la stratégie qui rendraient concrète l’expression « Mayotte debout » lâchée par François Bayrou lors de sa visite après la catastrophe. Tout le monde attend la proposition de pouvoir faire un prêt à taux zéro que le gouvernement a annoncé. Les attentes de la population sont vraiment nombreuses. Elle attend beaucoup de ce gouvernement Bayrou. Au niveau des compagnies d’assurances, beaucoup de Maorais s’inquiètent du fait que jusqu’à maintenant ils n’ont pas reçu de réponse pour reconstruire leurs maisons, dont l’état se détériore à chaque moindre pluie.
La situation est grave, Mayotte a vécu le pire et l’a en réalité échappé belle, malgré les énormes dégâts matériels qui affectent la psychologie de ses habitants.