Une semaine après la mise en place de la nouvelle grille horaire, les employés de l’État, qui n’ont été ni consultés ni préparés, continuent à grincer des dents.
Par Hachim Mohamed
Après une campagne non officielle qui a été lancée sur les réseaux sociaux et les médias, annonçant un nouveau régime hebdomadaire de travail dans l’administration publique et la publication d’un arrêté ministériel confirmant l’entrée en vigueur le 30 septembre 2025, le décret présidentiel qui officialise cette mesure a été finalement signé le 19 septembre par le président Azali Assoumani.

Si dans la presse locale, le ministre de la Fonction publique fait état d’une « mesure qui vise à harmoniser les dynamiques de travail de tous les agents au sein de l’administration afin que chacun puisse mieux appréhender ses droits et fonctions », les analystes considèrent que le décret n’est qu’un « copier-coller » de modèles étrangers, appliqués sans la moindre prise en compte du contexte local.
Quatre jours après l’application de la nouvelle grille horaire, ces nouvelles règles, qui demandent aux agents de s’adapter à de nouveaux rythmes de travail, se révèlent en décalage avec des contraintes religieuses ou personnelles. Ils en viennent donc à se questionner sur certains points, comme la légalité du changement qui devait être motivé par l’intérêt de l’administration, être justifié, équitable et respecter un délai de prévenance. La modification, dans la mesure où elle touche à un élément essentiel du contrat (le nombre d’heures de travail ici) nécessitait l’accord écrit du salarié.
Le nouveau régime horaire a été établi du lundi au jeudi de 8 heures à midi, puis de 13 heures à 17 heures, après une heure de pause. Le vendredi, c’est 8 heures à 12 heures. Le samedi et le dimanche sont de jours de repos officiels.
Conséquences et réactions à la réforme
Devant les premières expériences de la mesure du gouvernement, il y a eu sur le terrain un mélange de peur de l’inconnu, d’anxiété face à la perte d’habitudes et de sentiment de détresse émotionnelle.
« Dans mon bureau, il n’y a pas d’eau. Les toilettes ne fonctionnent pas. Passer de 8 heures à 17 heures dans ces conditions, c’est insupportable. On est des femmes, on a des besoins, on doit pouvoir aller aux toilettes dignement. C’est une question de santé et de respect. », s’alarme une secrétaire d’une institution de Ngazidja. La plupart des agents perçoivent le changement comme une menace.
« L’après-midi, il n’y a presque rien à faire dans nos bureaux. On reste là, assis pour attendre 17h. Ce n’est qu’une perte de temps et épuisement et on se demande à quoi ça sert vraiment. », affirme une femme du ministère de l’Éducation.
Face à cette situation, s’adapter demande de l’énergie, et la création de nouvelles habitudes peut être énergivore et inconfortable.
« Rentrer chez moi à partir de 17h est un cauchemar. Les moyens de transport se raréfient et deviennent plus chers. Ça signifie plus de fatigue, plus d’argent dépensé, et moins de temps avec mes enfants. », dit un fonctionnaire originaire du washili.
Si les autorités estiment que les nouvelles règles visent à améliorer la ponctualité et l’efficacité dans le fonctionnement de l’administration, ce n’est pas évident sans une période d’adaptation. La faisabilité du changement n’est pas immédiate, les agents doivent « apprivoiser » ces nouvelles horaires pour s’y habituer.
Peur de l’inconnu et effort d’adaptation
Un jeune fonctionnaire du département d’enseignement secondaire qui a été accroché dans le couloir du service a rappelé que la rumeur du changement de la grille horaire a circulé depuis longtemps, même s’il n’y avait pas une note officielle et que l’information est passée verbalement. À l’entendre, c’est un décret qui était attendu.
Venant aux conséquences de la mesure, il pense qu’avec les habitudes ancrées des horaires (7 heures à 14 heures), « au départ, ça va être compliqué, mais les gens vont s’adapter au fur et à mesure aux nouvelles règles ». Il note qu’il ne sera « plus question d’aller chercher librement ses enfants », a-t-il souligné.
Il compte toutefois sur les modalités d’accompagnement de la mesure pour permettre aux fonctionnaires de remplir convenablement leurs missions. Il espère que le prolongement des horaires de travail ne va pas les ennuyer et que le gouvernement veillera à ce que son département ait plus de tâches à réaliser.
« L’enjeu de la réforme c’est aussi d’être créatif pour améliorer le fonctionnement du service. C’est mieux que d’être là à ne rien faire, à passer son temps à une activité inutile ou parce qu’on attend que quelque chose se produise. », a-t-il conclu un brin préoccupé.
Contacté au téléphone, le secrétaire général de la Confédération des travailleuses et travailleurs comoriens (CTTC), Omar Ibrahim, n’a pas donné suite à nos demandes.















