Un problème d’électricité sévit, de nouveau, depuis plusieurs mois sur la capitale des Comores, Moroni et ses environs. Certaines zones connaissent un délestage voire même une absence persistante d’électricité, ce qui constitue un handicap majeur pour certaines entreprises.
Par Abdouroihmane Ibrahim
Depuis plusieurs mois, Moroni et Mutsamudu, le chef-lieu d’Anjouan subissent le manque d’électricité qui dévaste régulièrement le pays. Le sud de la capitale est particulièrement touché depuis plusieurs mois. C’est là que se trouve le principal imprimeur des deux journaux papier, notamment celui de l’État. Ils paraissent d’une manière épisodique et leurs lecteurs doivent se contenter des versions internet. Les journalistes, eux-mêmes, ont du mal à produire les articles à cause des coupures de courant. Parfois, les coupures leur font même perdre des données ou des fichiers importants qu‘ils n’ont pas eu le temps de sauvegarder dans les machines.

Dans un communiqué daté du 8 novembre, Hamidou Mhoma, Directeur de Graphica et principal actionnaire du journal Al-Fajr, montre à quel point ces délestages nuisent au travail de sa société. Autrefois, la société était équipée d’un groupe électrogène de secours, ce groupe électrogène a fini par lâcher à force d’être tiré, mettant les activités de l’entreprise dans une situation saumâtre. « Ces coupures intempestives de la SONELEC mettent à rude épreuve les serveurs informatiques (matériels et logiciels), même les plus costauds, malgré les protections. Et une panne est vite arrivée. », Explique Hamidou Mhoma.
Les délestages touchent également la rédaction de Masiwa, aussi bien pour les échanges de textes que pour la mise en ligne. « Parfois, j’envoie le journal au Rédacteur en chef, il me fait les remarques et au moment de la modification, j’ai une coupure de courant. Parfois la correction d’erreurs sur le site est impossible, faute d’électricité », confie Abdillah Pavalé, maquettiste du journal.
Cependant, la presse n’est pas la seule à être touchée par ces délestages. À l’entrée de Mdé, village situé au sud de Moroni, ROMA, un petit Faceboof, placée sur la route qui mène à Hambou et Mbadjini, assure la vente de sandwichs et de yaourts pour tous les passants. Les coupures de courant mettent à mal la production de ses yaourts. « Hier, dans la soirée, alors que je ramenais des clients à Tsinimoichongo, je m’étais arrêté pour acheter des yaourts chez ROMA pour une cliente, malheureusement, ils n’étaient pas encore fermentés, faute de courant. Mais, elle n’avait pas le choix, elle les a pris pour aller les mettre dans son réfrigérateur. », nous confie Badroudine Ahamada, un taximan de Tsinimoichongo.
Un déficit énergétique : bientôt de nouveaux groupes électrogènes
Dans une conférence de presse tenue le 3 novembre dernier, le ministre de l’Énergie et des Eaux, Hamada Moussa, s’est exprimé sur la crise de l’électricité en parlant d’emblée, de la puissance énergétique nécessaire sur l’ensemble du pays, selon lui, elle est de 26,5 mégawatts. Or l’énergie disponible et utilisée actuellement est de 18,44 mégawatts. Dans l’ensemble, on remarque un déficit de 8,5 mégawatts dont les 5,65 à Ngazidja. C’est cela qui, selon les propos du ministre, justifierait les délestages dans certaines zones. À Anjouan, c’est à peu près 2,1 mégawatts qui manquent. Cela a poussé SONELEC à recourir à des délestages dans cette île également.
Selon Hamada Moussa, l’État envisage de faire venir des groupes électrogènes de 12 mégasWatt pour enrayer le déficit de 8,5 mégawatts et couvrir tout le pays en électricité.
Les 4 mégawatts restants seraient mis en réserve en attendant que les techniciens de la SONELEC revisitent les autres groupes, au cas où, il y aurait des pièces à rechanger. Ces groupes seraient en chemin et le ministre avait annoncé leur arrivée sur le territoire comorien 15 jours après sa conférence, soit le 18 octobre. Cela ressemble maintenant à tant d’autres promesses préélectorales, à moins que la SONELEC n’attende qu’on se rapproche vraiment des élections pour solutionner le problème d’électricité.
Des grandes collaborations avec des sociétés étrangères
Le ministre de l’Énergie et des Eaux a affirmé que le gouvernement comorien entend tout mettre en œuvre pour que d’ici 2025 l’énergie verte, énergie propre, soit une réalité pour le pays. C’est un moyen durable et écologique de produire de l’énergie.
Actuellement, en coopération avec une société étrangère, la région de Mbadjini bénéficie de l’énergie solaire photovoltaïque. Ce système permet de fournir de l’électricité dans cette région, mais aussi jusqu’à Vouvouni et Chezani.
Avec cette même société, des travaux devraient d’abord commencer au mois de décembre 2023 dans la région de Mitsamihouli. La même énergie produite à Foubouni, la capitale de Mbadjini à savoir 3 mégas Watt, serait produite à Mitsamihouli afin de couvrir toute la région en matière d’électricité. Ensuite, en collaboration avec la Banque mondiale, au mois de mars 2024, ce serait le tour de la ville de Domoimboini avec une station de production d’énergie photovoltaïque qui fournira 6 mégawatts.
Enfin, des fonds saoudiens ont été mobilisés afin de placer un relais de 6 mégawatts dans la forêt de Chomoni. Il y aurait alors un total de 18 mégawatts. L’énergie maximale que doit utiliser la Grande-Comore.
Dans l’île d’Anjouan, la SONELEC installerait un relais de 2 mégawatts dans la région de Bambao Mtsanga en collaboration avec la Banque mondiale. Cette dernière va aider à installer de l’énergie thermique et l’énergie solaire photovoltaïque dans l’île. Elle fera de même en mars 2024, à Mohéli, pour l’installation d’un relais de 1,2 mégawatt.
Ces changements vont permettre à la SONELEC de réduire le coût du gasoil. On peut rêver que d’ici là les factures des clients soient allégées.
L’exploitation de l’énergie géothermique
Des études ont aussi été faites depuis des années afin d’exploiter notre volcan dans le but de fournir de l’énergie dans l’ensemble du pays. Ces études ressortent avant chaque élection. Cette fois, le ministre annonce que les techniciens du Bureau géologique ont repéré les sites.
D’après le ministre, le coût est estimé à 134 millions de dollars. L’Union africaine et le PNUD ont accepté d’apporter leur appui avec 14% du montant requis. L’état comorien fait tout pour avoir des bailleurs et/ou des investisseurs qui pourraient apporter leur assistance dans l’installation de l’énergie géothermique. Cette fois, le début des travaux est annoncé dans quatre ans. En attendant, cela fait plusieurs semaines que les chefs d’entreprises et les particuliers souffrent de l’absence d’électricité, après tant de promesses faites en 2016.