À sept mois de l’élection présidentielle, l’heure est désormais à l’affrontement politique classique et le Sénégal ressemble à une arène dans laquelle les candidats s’affrontent sans pitié. Pourtant, la situation est de plus en plus floue à l’approche de ces échéances électorales.
Par Hachim Mohamed
L’élection d’un nouveau président de la République du Sénégal se joue depuis deux ans sur deux scènes concurrentes, celle des partisans du président sortant, Macky Sall et celle des défenseurs zélés de celui que l’on appelle dans la presse sénégalaise le « Pros » (président Ousmane Sonko).
Force est de constater que les camps des deux adversaires du scrutin présidentiel n’ont jamais arrêté durant cette période de s’affronter, en visant plus les personnes que les idées ou les arguments politiques. En matière d’attaques sur la personne, il ne serait pas exagéré de clamer qu’entre ce pays frère, le Sénégal et les Comores, c’est le jour et la nuit. Aux Comores, nous sommes dans une sorte de guerre froide dans laquelle aucun ne fait de révélations sur l’autre de peur d’être soi-même dénoncé.
La candidature de Macky Sall
Pendant deux longues années, il y a eu de la part des affidés un florilège de commentaires laudateurs aussi incroyables les uns que les autres sur le président Macky Sall. Ces louangeurs lui prédisaient partout une « victoire cash et sans bavure » pour le scrutin présidentiel du mois de février 2024. Ils affirmaient que les pourfendeurs du régime ne distillaient que des mensonges dans la mesure où le Président Macky Sall allait être candidat en 2024. Pour eux, même si des troubles pires que ceux du 1er et du 2 juin se produisaient, Maky Sall ne renoncerait pas à sa candidature, sauf si le Conseil constitutionnel en décidait autrement. Ni les menaces ni le chantage ne le feraient reculer. Dans la tête de ses partisans, la candidature de Macky Sall était d’ordre social et sécuritaire et ceux qui étaient contre n’étaient que des bavards qui ne constituaient pas la majorité.
Les rhétoriques laudatrices étaient au summum de leur expression : Macky Sall était un diamant serti d’émeraudes, un grand homme d’État, un visionnaire ou encore un fin politicien, le meilleur Président du Sénégal et même de toute l’Afrique !
Sonko accusé et traîné dans la boue
Les partisans du régime en place ont attaqué l’adversaire et opposant farouche du président Macky Sall, Ousmane Sonko sur le terrain d’un prétendu viol, pendant deux ans.
En plus d’avoir terni sa réputation, de l’avoir accablé par des mensonges, ils l’ont traîné dans la boue. Une meute d’ennemis le désignaient comme salafiste et terroriste.
Selon certains observateurs politiques, ce que font les pourfendeurs d’Ousmane Sonko rappelle au Sénégal le cas de feu Imam Alioune Badara Ndao qui a aussi été chargé par le quotidien Observateur. Ce journal a fait état de ses liaisons dangereuses avec des terroristes et a affirmé que des armes avaient été trouvées chez lui alors que tout n’était qu’inventions. Finalement, feu Imam Alioune Badara Ndao avait été mis en prison et quand il en est sorti avec une santé fragile, il est mort une ou deux années plus tard.
S’agissant des prétendues « forces occultes » qui sont derrière Ousmane Sonko, il y a eu dans la presse et dans les réseaux sociaux beaucoup d’exemples qui dénotent des scénarios qui sont échafaudés pour montrer la capacité de nuisance de cet épouvantail pour l’État du Sénégal.
Cependant sur Ousamane Sonko, ce qui a secoué l’opinion au Sénégal et a tenu en haleine le pays pendant deux ans, c’était les accusations de viol de Adji Sarr, une ancienne employée d’un salon de massage. Ces allégations qui datent de février 2021, Adji Sarr les maintenues au procès de 16 mai, parlant de viols répétés, suivis de menaces de mort.
Les titres des quotidiens sont assez éloquents à l’époque : « Ousmane Sonko m’a violé cinq fois », « Sodomie, excréments, pilule du lendemain », « Un déballage scabreux », ou encore : « Des révélations fracassantes ont provoqué une onde de choc parmi l’audience »
L’élection présidentielle fixée au dimanche 25 février 2024
En tournée pour rentrer à Dakar, Ousmane Sonko a été arrêté par les forces de défense et de sécurité puis envoyé chez lui, à la Cité Keur Gorgui. Le logement est bloqué depuis le 28 mai, l’accès est interdit au monde extérieur.
Coincé, le farouche opposant au président Macky Sall est, pour reprendre son expression, « sequestré » par les forces de sécurité chez lui à Dakar.
Pendant ce temps-là, le 3 juillet 2023, Macky Sall annonce qu’il n’est pas candidat à l’élection présidentielle.
Ousmane Sonko va-t-il regarder la campagne électorale du fond d’une cellule ou à la Cité Keur gorgui ou en prison ?
« Macky Sall est malin. Il s’en tire in-extremis. Il refile la patate chaude à IMF, le ministre de l’intérieur, de la Défense nationale et des Affaires étrangères. Aujourd’hui, ils sont livrés à eux-mêmes. Il n’est pas exclu que certains d’entre eux prennent la poudre d’escampette en se réfugiant dans un autre pays », a commenté un sénégalais après avoir écouté le discours de Macky Sall sur le rapport du Dialogue national qui lui avait été remis par l’ex-président de l’Assemblée nationale, Moustoifa Niasse.
Pour rappel, Ousmane Sonko est condamné à six (6) mois avec sursis dans l’affaire Prodac (accusation de détournement de 29 milliards d’un ministre) et deux (2) ans de prison pour corruption de la jeunesse dans le dossier Sweet Beauté.