En lisant cette lettre, vous allez très vite comprendre pourquoi l’éventualité d’une élection du dictateur sanguinaire comorien Azali Assoumani à la présidence de l’Union Africaine serait une insulte grave à l’intelligence africaine et un mépris pour notre jeunesse.
Au mois de février prochain, l’Union Africaine doit désigner le successeur du Sénégalais Macky Sall, président en exercice de notre organisation panafricaine. Cet honneur échoit à la région Est-Africaine, et il semblerait que le poste est convoité par le président du Kenya ainsi que par le dictateur sanguinaire qui dirige de main de fer mon pays, les Comores, contre le gré du peuple souverain avec le cortège de malheurs que signent la brutalité et l’ignominie dont il est l’incarnation parfaite.
Bien que je sois Comorien, je soutiens la candidature du Kenya (ou d’autres ) pour des raisons évidentes que je vais énumérer ci-après.
Plus que jamais nous avons une obligation de jeter dans les orties l’égoïsme d’antan de certains qui voudrait que parce que je suis Comorien, je dois vaille que vaille soutenir la candidature de mon pays, et ce, même si je connais le degré de lâcheté de celui qui est à la tête de celui-ci.
Non, ce temps est révolu ! Et plus que jamais le jeune Africain, qu’il soit expatrié ou qu’il vive sur le continent, doit prendre la mesure des enjeux et des défis qui se dressent face à notre continent, longtemps maintenu dans le dénigrement et le manque de respect par des nations qui non seulement nous ont exploités, mais veulent continuer à se servir du continent africain comme une courte échelle qui leur permette de s’élever matériellement au détriment des peuples africains.
Aujourd’hui l’Afrique a le devoir et l’impérative exigence de se hisser à la hauteur du contexte mondial et de défendre nos intérêts en toute dignité d’égal à égal avec les grands ensembles mondiaux qui débattent et tranchent les grands problèmes du monde.
L’Afrique compte 54 membres aux Nations unies et une grande partie de l’agenda de cette institution concerne des sujets africains, mais autour de ceux qui les tranchent, aucun pays africain n’y apparaît. Donc l’urgence de donner plus de place à l’Afrique au sein des grandes instances dirigeantes de ce monde est un impératif absolu pour le continent.
Un tel combat ne peut être porté par un vassal de la trempe du dictateur Azali Assoumani.
Cet adepte de la diplomatie de la mendicité et de la girouette au profit des pays tiers ne peut pas porter la voix de notre continent.
Comment voulez-vous qu’un dictateur à la tête d’un pays partiellement occupé par l’ancienne puissance colonisatrice ( Mayotte comorienne, résolution 3385 des Nations unies), capable de signer en 2019 à Paris un accord qui autorisa le pays occupant d’aller installer des radars dans son propre territoire non occupé pour contrôler les déplacements vers Mayotte, soit en mesure de défendre les intérêts d’un autre pays africain dont les intérêts seraient menacés par l’un de ces États qui qui l’ont érigé en serpillère diplomatique ?
– Une girouette pareille est indigne d’une telle responsabilité pour notre continent, incapable de défendre sa propre souveraineté.
– Sur injonction de l’Arabie Saoudite, Azali Assoumani rompt les relations diplomatiques entre les Comores et le Qatar au détriment des intérêts comoriens.
– Sur injonction du Maroc, Azali ouvre un consulat à Laayoune et reconnaît la souveraineté de Maroc sur ce territoire en violant par la même occasion la résolution de l’UA de 1982 qui a acté l’admission de la République Sahraoui au sein de l’Union Africaine. Il méprise de même le droit international, notamment une résolution du conseil de sécurité de 1991 qui appelle à une « auto-détermination » du Sahara occidental. Ironie du sort, c’est au nom de ce même droit international que les Comores fondent leur revendication sur Mayotte comorienne.
Ce petit dictateur sanguinaire soumis, aux intérêts d’autres pays, n’a aucune considération sur la vie humaine. Il est dépourvu d’humanité. Non seulement il tue et enterre ses compatriotes en catimini à l’insu des familles (affaire major Hakim alias Bapale), mais fait aussi la promotion de la cruauté humaine allant jusqu’à déclarer que l’assassinat odieux du journaliste Jamal Khashoggi était « une cuisine interne saoudienne » dont il ne fallait surtout pas se mêler.
Pendant que toute l’Afrique aspire à plus de liberté d’opinion, Azali appelle dans son pays au meurtre de la minorité chiite en invitant ses alliés à les « cogner sans gants » au moment de ses « assises de la discorde » (2018).
L’homme se moque royalement du sort cruel que certains bandits infligent à la jeunesse africaine. N’est-ce pas lui qui dit regretter le prix des esclaves (400 €) en Lybie en ces termes : « Ça aurait été 4000 euros ou 40 000 euros, on se dirait que ces gens-là valent de l’argent, mais 400 € , c’est le prix d’un cabri » (Africa 24).
Quelle ignominie de la part d’un homme qui aspire dans le même temps à diriger tout un continent !
Le continent africain ne peut pas être représenté par un homme d’une telle indignité qui incarne toutes les tares que nous nous employons à faire disparaitre dans nos pays respectifs.
Comment voulez-vous que d’autres pays du monde se soucient du sort de notre jeunesse africaine qui fuit nos pays pour chercher ailleurs une vie meilleure ? Comme cette jeunesse peut être respectée quand nous-mêmes nous confions de telles responsabilités à un fou d’un tel acabit ? Si au lieu de sanctionner de tels actes ignobles, l’Union africaine ne trouve pas mieux que de désigner ce sanguinaire comme président de l’Union africaine ? Cela voudrait dire que notre maison commune d’Addis-Abeba est tout simplement devenue un asile de soins pour « des schizophrènes ».
Mesdames et Messieurs les Présidents de nos pays respectifs, soyez à la hauteur de vos responsabilités pour nous éviter une telle tragédie au prochain sommet de l’Union africaine.
Je vous épargne les considérations d’ordre économique.
Je suis même persuadé qu’il ignore qu’aucun déplacement du président de l’Union africaine n’est pris en charge par l’institution qui, par contre, assure les frais du président de la Commission de l’Union africaine.
Comment va-t-il payer tout cela ?
Soyons sérieux, toute énergie dépensée par les preneurs d’otages du peuple comorien et l’argent dilapidé dans le cadre de son infertile campagne de lobbying indigne n’ont rien avoir avec une quelconque volonté de venir relever les défis actuels auxquels le continent est confronté à l’intérieur comme à l’extérieur.
Non, c’est plutôt dans une perspective d’un agenda interne à son propre pays où ce dictateur sanguinaire est contesté avec force, sur fond d’une crise latente qui couve au sujet de la question de la présidence tournante, objet de l’accord de Fomboni, dont pourtant l’Union Africaine est garante en sa qualité de membre du Comité de suivi. Ne confiez pas les clés de la maison commune à ce pyromane dépourvu d’humanité.
Soilihi Kays, Historien et activiste politique.