Omar Mirali est historien, activiste et un des initiateurs et principaux acteurs de la lutte contre le régime d’Azali Assoumani en France. Propos recueillis par Mahmoud Ibrahime
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Masiwa – Monsieur Omar Mirali, cela fait plus de 10 mois que la diaspora manifeste à Paris, quel bilan peut-on faire ?
Omar Mirali – Le bilan de nos manifestations est, en toute objectivité, très positif. Quand on a commencé à manifester, nos adversaires disaient qu’en deux jours, cette histoire allait s’arrêter. Nous comptabilisons à ce jour, près de 40 semaines de combats. Au-delà des manifestations tous les dimanches, nous avons réussi quelque chose d’historique dans notre pays. Nous avons imposé des nouveaux paradigmes (la transparence, Daula ya Haki…) et fait comprendre aux Comoriens que la vraie force d’un État, n’est pas celle, superficielle, détenue par les autorités, mais celle du peuple souverain. Aujourd’hui, tous les Comoriens ont compris que la Nation comorienne leur appartient.
Masiwa – Est-ce que vous sentez que les gens se découragent ou se renforcent ?
Omar Mirali – On s’attendait tous à un découragement général à l’approche de l’hiver. On s’est tous trompé. La marche du 24 novembre dernier a montré que nous étions capables de nous remobiliser davantage. Un millier de personnes avait marché ce jour-là, et depuis, nos manifestations sont aussi remplies qu’au début.
Masiwa – Quels sont vos objectifs aujourd’hui ? Ont-ils évolué ?
Omar Mirali – Tout dépend de ce que vous appelez évoluer. Si évoluer pour vous c’est négocier avec Azali, alors nous n’avons pas évolué. Cet homme a détruit notre pays. Il l’a humilié à plusieurs reprises, a trahi les institutions de la Nation et la confiance des Comoriens. Il a fait tout ce qu’un homme pouvait faire de mal à son propre pays. Dans ces conditions, comment voulez-vous que des gens comme nous qui respectons profondément notre pays et nos compatriotes puissions nous asseoir autour de la même table que lui ? Nous voulons un État de droit, avec tout ce que cela engendre. Ça ne passera que par la démission de cet homme qui a fait du peuple comorien un ennemi.
Masiwa – Les organisations de la diaspora avaient prévu d’empêcher la conférence des bailleurs de fonds, la conférence a eu lieu. Quel bilan faites-vous des actions menées ?
Omar Mirali – La conférence des partenaires d’Azali, contrairement à ce que ses nervis spéculent, est un échec, une honte supplémentaire pour notre pays. On a vu que le président Macron ne s’y est même pas rendu, sans doute parce qu’il savait comme tout le monde que toute cette histoire n’est que supercherie. Aucun chef d’État n’a fait le déplacement. Ensuite, à quelques mètres de là, le monde entier a pu constater que les Comoriens, pour la majorité, se désolidarisent du gouvernement Azali. Au même moment, nous avons également été reçus par des autorités françaises à Nice. Nous avons donc été sur tous les fronts et, croyez-moi, le monde regarde désormais Azali Assoumani et ses sbires avec les lunettes de la honte. Nous avons fait tout ce que nous avions prévu de faire.
Masiwa – Avez-vous prévu d’autres actions en France dans les jours à venir ?
Omar Mirali – Notre combat s’arrêtera avec la chute d’Azali et l’avènement d’un régime digne de ce nom dans notre pays.
Masiwa – Quel est votre point de vue sur l’agression de Fouad Goulam, le directeur du Plan devant l’Ambassade des Comores ?
Omar Mirali – Cet homme symbolise à lui seul, la bassesse de ce régime. J’étais sur place à l’ambassade et j’ai constaté avec effroi, l’agression de notre sœur Nachida par ce malfaiteur. Il s’est acharné sur cette pauvre femme dont le tort a été de dire que Goulam et tous ceux qui tuent les Comoriens sont des criminels. La famille de Nachida a déjà été éprouvée par ce régime suite à l’exécution, le 28 mars 2019, de Moutui. Nos amis n’ont fait que riposter et défendre notre sœur. Je condamne avec fermeté cette agression lâche d’un homme qui se croit tout permis sur une femme. En attendant que la justice française fasse son travail suite à la plainte déposée par Nachida, je veux que les choses soient claires : justice sera également rendue à nos frères et sœurs assassinés par ce régime criminel.
Masiwa – Quelles sont les conséquences pour les gens arrêtés ce jour-là ?
Omar Mirali – Tous les frères et sœurs arrêtés ce jour-là ont été libérés. Aucune charge n’a été retenue contre eux. La France est un pays de droit, nous avons pu établir des éléments indiquant que nous étions en situation de légitime défense.
Masiwa – De votre côté également, il y a eu des blessés ?
Omar Mirali – Nous avons eu, à ma connaissance, cinq blessés légers. Deux personnes, dont une sœur de Marseille, ont été blessées lors de la manifestation de lundi dernier. Le cas le plus grave est celui de notre frère Mbae, blessé à l’œil. Je lui souhaite un prompt rétablissement. Les trois autres personnes ont été blessées directement par des éléments d’Azali Assoumani. Notre frère Négociateur a été agressé alors qu’il filmait la salle où se tenait la conférence. Son téléphone a été détruit. Ali Kari, dans la foulée, a eu un doigt fracturé. Enfin, il y a eu l’agression de notre sœur Nachida. Je suis solidaire de tous les amis blessés y compris ceux dont je n’aurais pas connaissance. Maintenant vous voyez qui sont les adversaires en face. Des prétendues autorités, capables d’affréter deux avions remplis de Comoriens dans l’objectif d’aller combattre d’autres Comoriens.
Masiwa – Qu’est-ce qu’il faudrait pour vous pour engager des discussions avec le gouvernement ?
Omar Mirali – Comment discuter avec un homme qui fait mine de ne rien entendre des revendications du peuple tout en continuant à le malmener? Il y a deux avis cependant, sur cette question. Certains pensent qu’une discussion est possible avec cet homme à condition que la Communauté internationale en soit l’initiateur. Mais l’avis majoritaire, qui est aussi le mien, est qu’Azali a assez abusé de la patience des Comoriens. Il doit dégager. Et il partira, qu’il le veuille ou pas.
Masiwa – La stratégie de boycott des prochaines élections a été suivie par l’ensemble de l’opposition sauf Salim Saadi. Qu’en pensez-vous et que comptez-vous faire pendant la campagne et les élections ?
Omar Mirali – J’ai beaucoup de respect pour Salim Saadi. C’est un frère. Je respecte l’homme qu’il est. Cependant, je dois dire que souvent, ses analyses politiques ne sont pas à la hauteur. L’opposition a décidé de ne pas participer à cette énième mascarade électorale. Les Comoriens ont suivi notre appel. Salim Saadi continue à se dire de l’opposition tout en participant à ces élections. C’est un positionnement étonnant.
Deuxièmement, on voit ces derniers jours que les candidats de l’AMP, seuls en lice, ne sont même pas capables de s’entendre entre eux. Ils se déchirent et se disputent les investitures. Comment Salim Saadi peut-il espérer obtenir la bénédiction de ces gens-là ? Ses principaux électeurs sont ceux de l’opposition. L’opposition ne participant pas à ces élections, Salim Saadi n’a aucune chance de l’emporter normalement. Son seul salut viendra d’Azali lui-même s’il décide de le nommer député. Du reste, exactement comme nous avons demandé à nos amis de ne pas participer à ces fausses élections, nous ferons campagne cette fois-ci, auprès des autres Comoriens pour ne pas se rendre aux urnes…Ces élections seront un échec, les Comoriens ne supportent plus que leurs voix soient toujours détournées par les mêmes personnes.
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