Alors que les autres îles semblent à présent contrôler l’évolution du choléra, Anjouan reste encore dans une situation critique.
Par Naenmati Ibrahim
L’épidémie de choléra est bien présente dans certaines localités comme, par exemple, à Dindri au centre de l’île d’Anjouan, dans la région de Bambao Mtruni. Dans cette localité de la cuvette, pour être bien précis, la situation est très grave. Depuis samedi dernier et jusqu’à maintenant, les deux ambulances de l’hôpital de Tsembehou ne cessent d’aller récupérer des malades à Dindri pour les transporter à l’hôpital. Les patients sont de tous les âges et leur état de santé est très inquiétant, à tel point que certains ont été transférés rapidement à l’hôpital de Hombo (Mutsamudu).
On compte déjà plus de 200 malades. Ce chiffre vient de faire exploser le chiffre des cas de choléra à Anjouan qui était déjà très avancé par rapport aux autres îles. Maintenant on compte 6855 cas cumulés à Anjouan alors que Ngazidja il y a 580 et Mohéli 510. Ce chiffre explosif montre à quel point la situation sanitaire à Anjouan est grave. Cela démontre que les mesures de restrictions pour se protéger du choléra ne sont pas vraiment prises en compte par la population de l’île. En effet, dans certaines localités comme Dindri, il y a un entêtement de la part de la population qui ne croit toujours pas à l’existence de la maladie. Et dans ces zones où la pauvreté est très présente, l’hygiène n’est pas toujours une priorité. Or le manque d’hygiène est la raison principale de l’explosion de cette maladie contagieuse à Anjouan.
L’état d’urgence a été donc annoncé et l’hôpital de Tsembehou a été désigné pour accueillir les malades du choléra et protéger ceux qui n’ont pas le choléra. Toutefois les habitants de Dindri et des localités proches comme Tsembehou et Chandra ont du mal à croire que c’est le choléra qui est responsable de ce drame. Ils accusent plutôt la société ONICOR d’avoir vendu du riz périmé dans la localité de Dindri. Il n’y a qu’une minorité de personnes qui croient que c’est bien l’épidémie qui fait ravage là-bas. Et même pour ceux qui croient, ils accusent quand même le riz ONICOR d’avoir joué un rôle parce qu’il aurait permis de diffuser rapidement le microbe.
Du riz périmé juste au moment où le pays se trouve dans une crise sanitaire.
Il est bien vrai que le riz que possédait ces derniers mois la société ONICOR était bel et bien en mauvais état. Comment ne pas douter lorsqu’on sait que ce riz ne devait pas être consommé normalement et pourtant il est toujours en vente ? La société a pourtant essayé de le jeter en le brûlant. Néanmoins, il reste encore une partie de ce riz dans les locaux de l’ONICOR à Anjouan. Pourquoi ne pas l’avoir entièrement jeté quand on sait qu’un produit alimentaire périmé ou moisi peut causer des ennuis de santé tels que des intoxications alimentaires ? À cause de ce manque de vigilance de la part de la société ONICOR, une partie des Anjouanais semble avoir perdu le fil et chacun raconte ce qu’il veut sur le choléra.
À Bambao Mtruni, le doute s’est installé après la vente dans la ville de riz vendredi dernier. Cela a étonné plus d’un au moment où il y avait une forte pénurie de riz dans toute l’île. Et c’est le jour suivant cette vente que plusieurs personnes de Dindri ont commencé à vomir et faire des diarrhées persistantes et tout de suite on a suspecté le riz d’être la cause de ces vomissements et de ces diarrhées. Pour la major de la maternité de Tsembehou, cela n’est pas possible que ce soit une intoxication alimentaire parce que les vomissements et les diarrhées persistent et qu’une intoxication alimentaire ne peut pas provoquer des déshydratations sévères avec des crampes musculaires. Il s’agit bien de choléra.
Docteur Youssouf Houmadi médecin chef de l’hôpital de Tsembehou
Pour le médecin-chef de l’hôpital de Tsembehou, le docteur Youssouf Houmadi, les cas qui leur sont parvenus depuis samedi sont bien des cas de choléra. C’est pourquoi plusieurs d’entre eux ont été envoyés à l’hôpital de Hombo. De plus, certains d’entre eux disent ne pas avoir mangé de ce riz. Il reconnait tout de même qu’il n’y a pas eu de test ni d’analyse à Tsembehou pour dire que tous les cas qui sont venus depuis samedi avec des vomissements et des diarrhées ont tous le choléra, mais il persiste sur le fait que c’est bien du choléra.
Dr Youssouf Houmadi fait une hypothèse à propos de cette rapide contamination : il est possible qu’il y ait eu un cas d’enterrement non sécurisé d’une personne qui était atteinte du choléra. Il démontre que si c’était vraiment une intoxication alimentaire, il n’y aurait pas eu de contagion. Et pour finir, il se réjouit que malgré la situation débordante qu’il y a à l’hôpital de Tsembehou, ils arrivent à maîtriser la maladie parce qu’ils n’ont pas enregistré de décès jusqu’à maintenant.