Le président Emmanuel Macron est venu à Mayotte avec l’intention de rassurer les habitants. Il l’a fait à travers des discours dynamiques et convaincants. Pourtant, dès son départ les Maorais ont montré un certain scepticisme. Par Mahmoud Ibrahime
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Dès sa descente d’avion, sur le tarmac de l’aéroport de Dzaoudzi, le président français explique les objectifs de son voyage. Une introduction à ses discours dans la journée. Il annonce qu’il est venu d’abord pour échanger avec les Maorais et leurs élus sur leurs difficultés. Ensuite, il s’agit de venir vérifier le fonctionnement de l’opération shikandra, notamment la collaboration des autorités comoriennes et l’objectif fixé de « 25.000 retours de clandestins ». Enfin, il veut mettre en place officiellement le « contrat de convergence », un plan de 1, 6 milliards d’euros investis sur les questions de santé, d’éducation, de logement, d’accès à l’eau et de transports.
« Maore na Farantsa mpaka tcho »
Emmanuel Macron était attendu à Mayotte sur un certain nombre de problèmes récurrents et jamais résolus.
Ces derniers mois, certains politiques qui aiment faire peur aux Maorais avaient développé une thèse selon laquelle le gouvernement français négociait avec les Comores pour un retour de Mayotte dans l’État comorien. Cette idée est la base du discours de la tendance Estelle Youssouffa au sein du Collectif des Citoyens de Mayotte. Dès son arrivée dans l’île, le président Macron a tenu à rassurer les Maorais en déclarant : « Mayotte, c’est la France ». Il a affirmé aux Maorais qu’ils restent Français parce qu’ils l’ont voulu. Il a exprimé le lien entre Mayotte et la France en utilisant une image du vocabulaire amoureux qui a cours dans tout l’archipel « Maore na Farantsa mpaka tcho » (« Mayotte et France pour toujours ») provoquant de nombreux applaudissements.
Mais, lorsqu’un journaliste lui a demandé d’évaluer l’échéance au bout de laquelle les Comores reconnaîtront que Mayotte est française, il a répondu que cela dépend des Comores, mais qu’à son niveau il n’y avait aucune ambiguïté sur l’appartenance de Mayotte à la France.
« Mayotte c’est la sécurité »
Le président Macron était aussi attendu sur la question de la sécurité. Il n’a pu s’empêcher de lier la sécurité à la question de « l’immigration » et notamment l’arrivée des kwasa-kwasa. E. Macron a donc moins parlé de la manière dont le gouvernement allait assurer la sécurité dans les quartiers maorais que de la collaboration avec les Comores pour l’arrêt des arrivées de « sans-papiers français ». Il a évoqué à plusieurs reprises l’opération Shikandra et a annoncé que l’objectif de 25.000 personnes reconduites à Anjouan sera dépassé puisque le chiffre de 24.000 est déjà atteint. Il a rappelé, à juste titre, que c’est plus du double de l’année dernière et expliqué que ces « bons » résultats n’auraient pas pu être atteints sans la collaboration du gouvernement comorien. Celui-ci a permis de démanteler des réseaux de kwasa-kwasa à Anjouan et même d’empêcher les départs. Les résultats se font sentir puisque dès cette année il y a 20% de kwasa-kwasa en moins.
Ces propos ont été repris dans le « discours sur l’immigration » prononcé au nord de Mayotte dans le village de Hamjago (commune de Mtsamboro). Mais, dans cette commune où les habitants votent régulièrement pour le Rassemblement National (Marine Le Pen), il a tenu à dire que la lutte contre « l’immigration » peut se faire sans la haine de l’autre et il a rappelé que les Comoriens sont « vos frères, nos frères ».
La piste longue, les travaux vont commencer
En matière de transports, Emmanuel Macron a fait plaisir aux Maorais dans leur ensemble en annonçant que la piste de l’aéroport de Dzaoudzi allait être rallongée pour pouvoir accueillir les gros avions et ainsi éviter les escales par la Réunion et attirer des concurrents dans ce domaine. En attendant, il a proposé d’encadrer les prix des billets d’avion qui se sont envolés ces derniers temps du fait qu’il n’y a quasiment qu’une seule compagnie qui fait l’international.
Dans le domaine des transports, il a répondu, par le discours, à toutes les attentes des Maorais. Il a confirmé la construction d’une route de contournement pour essayer de juguler les nombreux embouteillages dans l’île. Il a également annoncé le développement du port, peut-être une prise en main par l’État. Il souhaite en faire une plateforme pour la région et ainsi créer de nombreux emplois pour les Maorais.
« La France, c’est aussi la santé »
Parmi les annonces attendues à Mayotte, le président français a confirmé la création, en janvier 2020, d’une Agence régionale de la Santé (ARS) propre à Mayotte et la nomination de l’ancien ministre écologiste Dominque Voynet à sa tête.
Il a encore justifié les 150 millions donnés aux Comoriens, en disant que l’argent devrait aussi permettre de renforcer les hôpitaux dans l’Union des Comores et donc d’éviter les évacuations en kwasa vers Mayotte.
« La France c’est l’école »
En matière d’éducation, E. Macron n’a quasiment rien annoncé de nouveau. Il a tout de même confirmé qu’en janvier 2020, il y aura un rectorat de plein exercice à Mayotte. Encore une fois, les insuffisances sont justifiées par le manque d’ingénierie. « Nous sommes en retard pourquoi ? Parce qu’il faut l’ingénierie pour le faire », affirme-t-il. Ce constat l’amène à vouloir former de plus en plus le personnel éducatif sur place dans le Centre universitaire de Mayotte.
Il a annoncé la création de nouvelles cantines et la mise en place de possibilités de prendre un petit-déjeuner dans les établissements scolaires.
Dès le départ du chef de l’État, un grand nombre de Maorais a commencé à prendre conscience que tous les présidents français et chefs de gouvernements qui sont passés dans l’île ont fait les mêmes promesses qui n’ont pas été suivies d’effets. Chacun attend de voir du concret.
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