Plusieurs ministres de l’Éducation nationale ont cherché à fermer des écoles privées qu’ils jugeaient non conformes. Aucun d’eux n’a réussi à en fermer une. Bacar Mvoulana a repris cette volonté et semble lui aussi aller à l’échec.
Par Hachim Mohamed
Pour la rentrée 2024-2025, le ministre de l’Éducation Nationale avait annoncé la fermeture de 117 écoles privées. Mis devant le fait accompli par l’arrêté du ministre, les directeurs de ces écoles ont créé le Collectif des écoles privées interdites et ont cherché à rencontrer le ministre, mais Bacar Mvoulana a toujours brodé autour de ses voyages pour décliner la demande.
À Ngazidja, les représentants des écoles mises en cause ont décidé d’entrer en résistance en engageant une procédure en justice.
« La normalisation du secteur privé de l’éducation ne date pas d’aujourd’hui. Elle est dans les cartons du département depuis 2008. Seulement on ne comprend pas la normalisation du ministre », affirme le Directeur de l’école « Le mémorial », Chamssoudine Saïd.
Suspension de la décision du ministre par la Justice
La décision de fermer la centaine d’écoles privées a été prise par le ministre le 26 septembre, à la veille de la rentrée scolaire 2024-2025. Le 2 octobre, vingt-et-un établissements privés, dont le Groupe scolaire Fesmay ont fait assigner le ministère de l’Education Nationale devant le tribunal de première instance de Moroni pour ordonner la suspension de la décision du ministre. Le 7 octobre, par une ordonnance, la Justice suspendait cette décision.
En effet, le Tribunal avait appuyé l’argument des responsables des écoles qui estimaient qu’ils avaient déjà mobilisé toute une logistique et des moyens financiers ont été engagés pour la rentrée scolaire. Les conséquences de la décision du ministre pouvaient être d’une gravité énorme au vu des milliers d’enfants qui suivaient leur scolarité dans lesdits établissements.
Me Djamal qui défendait les vingt-et-un écoles s’est adressé aux médias pour décrire comment ces « écoles interdites » à qui on a demandé le 12 septembre de remettre au ministère des documents qui leur permettaient de se mettre aux normes et qui, quatre jours avant la rentrée scolaire, fixée le 30 septembre, apprenaient qu’elles faisaient partie des établissements refusés.
Pire, selon Me Djamal, pendant ce temps-là, le service du département de l’Éducation Nationale n’arrêtait pas de sortir des notes, un coup pour faire pression sur les élèves « exclus des écoles interdites » de vite s’inscrire dans les « établissements aux normes », un coup pour dire à ces écoles, dont les élèves sont candidats aux examens scolaires nationaux (entrée en 6e/Cepe, Bepc et baccalauréat), de vite se mettre à jour pour le dépôt des dossiers puis intimer l’ordre à l’administration de l’enseignement de déclarer irrecevables lesdits dossiers provenant des « écoles interdites ».
Un capharnaüm de gestion
Pour ce projet de normalisation du secteur privé, qui pendant 16 ans a été relancé maintes fois par les ministres passés, selon Maitre Djamal, Bacar Mvoulana avait largement le temps de mettre en condition les écoles qui doivent se mettre aux normes, notamment au début de l’année 2024, mais cette mesure du gouvernement a été prise au pied levé ne donnant aucune marge aux écoles de s’organiser.
Pour un ministère de l’Éducation Nationale qui avait fait du délabrement des écoles privées son cheval de bataille, comment selon Chamssoudine Saïd un collège islamique et scientifique de la région de Mboudé qui, au départ, faisait partie des « écoles privées interdites » à cause des locaux délabrés et qui avait saisi la justice pour la mesure décriée, figure maintenant, on ne sait par quelle alchimie, sur la liste des « établissements permis » ?
Mesure d’affectation des syndicalistes jugée autoritaire et arbitraire.
C’est sur une autre affaire que la CTTC (Confédération des Travailleuses et Travailleurs des Comores) a basé son communiqué du 27 novembre. En effet, le ministère de l’Éducation Nationale a décidé d’affecter onze syndicalistes sur des postes à Anjouan et Mwali alors qu’ils exerçaient à Ngazidja. Le syndicat rappelle que cela va à l’encontre des lois nationales et des engagements internationaux des Comores, garantissant la liberté syndicale.
« Cette décision dénoncée comme tentative d’intimidation met en péril le dialogue social et l’équilibre nécessaire à l’amélioration du système éducatif », peut-on lire dans le communiqué de la CTTC.