Zayone, une artiste engagée, d’origine comorienne, vivant en France a annoncé sur les réseaux sociaux l’organisation d’une Randonnée particulière aux Comores pendant le mois de novembre. Le choix du mois de novembre n’est pas le fruit du hasard. Zayone est une chanteuse, militante associative qui dénonce les violences faites aux femmes aux Comores, particulièrement les violences sexuelles. Celle qui est aussi une coach sportive s’est confiée à Masiwa sur ce prochain événement.
Propos recueillis par Natidja HAMIDOU
Masiwa – D’où vient l’initiative de réaliser une randonnée aux Comores ? Quel est le but à atteindre ?
Zayone – L’initiative est venue suite à des actions menées par l’association Mvukisho Ye Masiwa d’une part, et d’autre part, de la plate-forme d’écoute des victimes de violences aux Comores appelée Hifadhwi. Le premier but est de pouvoir associer toutes les associations et les personnes sensibles à la cause du combat contre les violences sexuelles, à se rassembler pour mener une action commune. Le second but est d’aller à la rencontre de la population et des élèves dans les écoles pour échanger, s’écouter, partager, se sensibiliser sur les violences sexuelles. Nous espérons qu’un jour nous pourrons créer ensemble des structures adaptées aux multiples besoins liés aux combats des violences sexuelles. On peut par exemple espérer avoir une structure d’accueil des victimes aux Comores qui répond aux normes sectaires pour permettre à ces dernières de se sentir en sécurité et qu’elles puissent bénéficier des multiples suivis liés aux soins psychologiques.
Masiwa – Comment va se dérouler cette randonnée ?
Zayone – Malheureusement, on ne peut pas tout dévoiler maintenant, car le traçage des routes à prendre est en train d’être finalisé par un géologue. Nous aimerions faire le tour de l’île de Ngazidja par les côtes. Je peux tout de même vous dire que la randonnée débutera le 25 novembre et se terminera le 2 décembre. Nous espérons que pendant ces jours prédéfinis, aller à la rencontre de nos pères, mères, frères, sœurs, de nos enfants et tout être qui voudra échanger avec nous. Ce projet est fait de quêtes de vie qui se sont rassemblées pour n’en faire qu’une. C’est une construction pas à pas comme cette magnifique randonnée. C’est une quête de soi dans une quête de Nous. La Randonnée durera huit jours. Nous nous sommes un petit peu entraînés pour pouvoir effectuer une moyenne de 7h de marche par jour inshallah. Nous ne sommes pas tous des sportifs, mais nous espérons pouvoir aller au bout, car ce combat mérite qu’on l’éclaire d’où l’action sur plusieurs jours.
Masiwa – En quoi une randonnée peut-elle être thérapeutique ?
Zayone – Une randonnée est thérapeutique quand elle est faite en conscience dans ce sens-là. Partout dans le monde bon nombre de gens l’utilisent pour se retrouver intérieurement, extérioriser (maux, remords, frustrations, traumatismes…) ou essayer d’être en connexion avec la nature tout simplement ou Nôtre créateur. Pour notre santé, il est conseillé de marcher minimum 25 minutes par jour pour éviter toutes sortes de maladies surtout liées au cœur. Dans le cas des victimes de violences, la randonnée peut être une action choisie par ces dernières pour prendre acte de leur état de victime et en conscience essayer de mettre en place des routines de bien-être qui pourraient les apaiser lors des différentes crises qui peuvent subvenir tout au long de leur vie. Rappelons-le, le viol, la pédocriminalité ne sont pas des maladies dont on guérit. Les victimes peuvent être apaisées, mais vivent avec leurs différents traumatismes jusqu’à leur mort. D’où l’importance que ces victimes sachent qu’il y a de l’espoir et surtout qu’elles ne sont pas seules.
Masiwa – Quelles sont les conditions de participation ?
Zayone – Les conditions sont simples. Il suffit juste de vouloir venir passer un moment d’échanges avec nous en marchant. C’est de l’amour en vérité, dans l’optique de déconstruire pour reconstruire dans une bienveillance.
Masiwa – Qui est le porteur du projet ?
Zayone – Le projet est né d’une thérapie, dans le bureau de ma psychologue de l’époque. Qui après une tentative de suicide m’apprenait une technique de valorisation de soi et d’amour de soi. Il fallait que j’écrive une liste d’actions que j’aurais aimé mener à un moment de ma vie sans définir de date pour supprimer le côté stress. J’avais 19 ans à l’époque. Et du haut de mes 38 ans aujourd’hui, je vais pouvoir l’effectuer Alhamdullilah. Donc le projet est né de la thérapie de Zayone, artiste engagée, victime de pédocriminalité et de mariage forcé. Toutefois, ce projet est porté par pas mal de monde. Mais, j’aimerais porter l’accent sur le côté historique, c’est-à-dire le fait que ce projet soit porté par deux victimes. Cette deuxième est Nouria Ngazi, présidente de l’association MYM. Il est porté par les deux grandes structures : Mvukisho Ye Masiwa dit MYM et Hifadhu (la plateforme d’écoute des victimes de violences aux Comores), mais aussi par nos partenaires : Le label GURRU music ENT qui produit l’artiste Zayone et qui sort un Ep courant novembre avec deux morceaux sur le thème des violences faites aux femmes et aux enfants, plus précisément la pédocriminalité et le mariage forcé, suivi par la Styliste Bahati Sugar dont Zayone est l’égérie. Il y a également les marques TktMmpas et IMAN PARIS, les Artistes Hamou, Kadam Afro soul, Bath et Josephine. Le Média Comores mix 100% variétés et pleins d’autres comme les merveilleux membres bénévoles des deux associations qui portent chaque nouveau projet de leurs associations à bras le corps et toutes ces magnifiques âmes inconnues, mais qui nous donnent le courage chaque jour que le plus grand nous permet de construire.
Masiwa – Quelles sont les difficultés rencontrées pour organiser cet événement ?
Zayone – Je dirais qu’au premier abord il y a les pessimistes qui peuvent nous imprégner de leurs peurs. Donc il y a un esprit à stimuler dans le bien-être chaque jour pour ne pas se laisser submerger. La deuxième chose est la distance, du fait que le projet se construit en France pour être mis en action à Ngazidja. Mais, nous sommes confiants.