Des citoyens comoriens se sont réunis à Moroni le 25 mars pour faire le point sur la question du carburant toxique qui a provoqué des pannes sur plusieurs voitures.
Par Hachim Mohamed
Des voitures qui tombent soudainement en panne à Anjouan ou à Ngazidja. La cause serait un produit connu par les automobilistes et dont la teneur en soufre détruit le circuit d’injection et le filtre à gasoil des véhicules en plus d’accroire la concentration des particules fines dans l’air, provoquant ainsi de la pollution et des maladies.

Face à ce scandale qui ne date pas d’aujourd’hui aux Comores, même si les victimes de ce produit, constitués en collectif récemment, se sont emparées de la problématique il y a plus de 4 mois. Il est plus urgent, selon eux, de convaincre le gouvernement comorien importateur du « sale carburant » de relever les normes nationales.
La plupart des États d’Afrique de l’Ouest, incités par le Programme des Nations unies pour l’environnement, se sont engagés depuis des dizaines d’années à réduire drastiquement la teneur en soufre autorisée dans le diesel et à appliquent peu à peu des standards internationaux.
Aux Comores le collectif des victimes du carburant toxique veut s’attaquer aux multinationales du négoce de produits pétroliers qui livrent en toute légalité un poison invisible pour nos machines.
« Nous ne sommes pas là pour faire de la politique, notre démarche s’appuie sur des faits. Parlant du carburant toxique, que ce soit en ville comme à la campagne, il y a des indices qui permettent de reconnaître le problème qui se situe sous un angle économique pour le pays et les utilisateurs de machines dans les entreprises.
Autre constat, jamais dans leurs garages les mécaniciens n’ont été aussi sollicités pour réparer les « voitures immobilisées ».
La qualité de l’air dans la ville de Moroni est préoccupante
Fort d’une pétition qui avait déjà recueilli plus de 43 signatures en quelques jours en ligne et dans lequel le collectif réclame l’interdiction pure et simple « de la vente du carburant toxique, les membres sont intervenus pour éclairer l’opinion sur les dégâts causés sur les voitures qui font le plein dans les stations de Moroni ou Itsandra comme Bonzami ou Elbait. C’est d’ailleurs ce dernier qui avait vendu le produit mis en cause au porte-parole du Collectif de Défense des victimes du gasoil toxique, Ahmed Abdou Nassuf. À l’en croire, il a déjà remplacé les pièces de sa voiture deux fois au coût de 20.000 KMF à chaque passage au garage.
Un autre automobiliste présent a rebondi aux propos d’Ahmed Abdou Nassuf en lançant sur le ton de la boutade : « Le malheur des uns fait le bonheur des autres ». Il faisait allusion à l’explosion des ventes de pompes et autres pièces de rechange dans les magasins.
Ahmed Abdou Nassuf a cité le cas d’un autre automobiliste qui, pour « remettre à flot » son 4/4, a dépensé au bas mot 250.000 KMF.
À sa prise de parole, Fatima Eliyas a plaidé pour une action forte et urgente de l’État qui doit assurer pleinement ses missions régaliennes et garantir à ses citoyens la sécurité. Cette dame qui milite dans la société civile a perdu sa voiture neuve, elle a porté plainte, son procès qui devait se tenir mardi dernier a été ajourné. Son message était une espèce de plainte du collectif qui demande non seulement d’inculper les personnes qui seraient en lien avec les faits incriminés des chefs de trafic de produits pétroliers nocifs, mais aussi de poursuivre pour complicité ou négligence celles qui auraient pu, de leur position, éviter de tels faits.
C’est de la part de l’ex-enseignante une manière d’élever le niveau de conscience de ses compatriotes, l’occasion de sensibiliser la population sur les dangers de ce carburant de basse qualité volontairement mélangé à des produits toxiques.
Le produit toxique peut rendre malade.
Les quatre membres actifs du Collectif de Défense des victimes du Carburant Toxique ont été reçus le 26 mars par le Directeur de Cabinet en charge de la défense, Youssoufa Mohamed Ali représentant le chef de l’État.
D’emblée Belou a reconnu l’existence du problème en racontant ce qui est arrivé à sa voiture (déjà deux pompes changées), à celle de sa femme et celle de son fils. Il a ensuite suggéré pour le besoin d’un laboratoire de contrôle des hydrocarbures d’impliquer l’Université des Comores. Cela permettrait aux chercheurs comoriens de procéder à une contre-expertise dans le but de déterminer la teneur du carburant via une analyse. Le Collectif a apprécié cette proposition du Directeur de cabinet en charge de la défense parce qu’elle rejoint une proposition validée quelques jours auparavant : la nécessité de se doter d’un laboratoire indépendant à même de livrer une analyse et des contrôles de qualité sur le carburant.
Par la voix de Fatima Eliyas, le Collectif a mis également en avant la baisse du prix du carburant pendant six mois pour « dépénaliser la consommation mauvaise » du carburant toxique dont ont été victimes les automobilistes.

S’agissent de la prise en compte de doléances du Collectif de Défense des victimes du Carburant Toxique, ses membres actifs attendent un retour de la part de Directeur de cabinet, Youssoufa Mohamed Ali qui doit en faire un compte rendu au Chef de l’État.
Une nouvelle cargaison est prévue
Pendant que Fatima Eliyas attendait la tenue de son procès, mardi dernier, en marge de ce rendez-vous judiciaire, elle a livré à Masiwa la nouvelle donne : l’arrivée récente d’une nouvelle cargaison de carburant qui, visiblement, respecte les normes en matière de qualité. La militante a ajouté que la Société Nationale des Hydrocarbures avait saisi le fournisseur du « carburant toxique » avec une coupure de presse sur le scandale de ce produit. Le document montre que la société nationale avait été assignée en justice par une cliente (Fatima Eliyas) victime via l’achat du carburant toxique à une station d’essence à Moroni. La première audience du procès a eu lieu le mardi 8 avril et la deuxième est prévue pour le 19 avril.