Le message est repris et diffusé par le représentant de l’OMS aux Comores, Dr Diarra Abdoulaye et par la Directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique Moeti Matshidiso devant la presse le 20 mars, à l’occasion de la journée de la santé bucco-dentaire. Durant ces trente dernières années, les affections bucco-dentaires telles que les caries dentaires, les maladies des gencives et les pertes de dents touchent environ 44% de la population africaine.
Par Hachim Mohamed
Dans son discours Moeti Matshidiso précise que plus de 70% de pays de la région ont consacré moins d’un dollar américain par personne et par an aux coûts de traitement de soins bucco-dentaires en 2019 et qu’il y a sur le continent africain 0,33 dentiste pour 10.000 habitants. Au final, Matsshidizo Moeti estime que des progrès ont été réalisés, mais que l’on doit faire plus.
Des études récentes en matière de dentisterie montrent un lien entre des infections buccales et des problèmes cardiovasculaires ou pulmonaires. Les bactéries présentes dans la bouche pourraient également causer l’inflammation des artères. En revanche une bonne hygiène dentaire réduirait le risque d’une attaque cérébrale ou cardiaque.
Fléaux de tous ordres, matériels et moraux.
Dans le cadre de la promotion de la santé aux Comores, avec la célébration de cette journée consacrée aux maladies bucco-dentaires, Lobo Njikam Clarisse a fait un focus sur le risque de la carie qui attaque les dents des tout-petits, plus agressivement que celles des adultes, comme elle a pu l’observer dans les villages de Koni Djodjo et Koni Ngani à Anjouan.
À l’écouter, on est loin dans l’appréhension du phénomène : de la simple consommation de sucre à l’action de certaines bactéries présentes dans la bouche, qui causent la majorité de l’altération de l’émail et de l’ivoire de la dent aboutissant à la formation d’une cavité qui détruit progressivement cette dent.
« Certes, à travers une ONG partenaire, on a donné des pattes de dentifrices, des brosses à dents ainsi que des fournitures scolaires avec des brochures de sensibilisation sur les bonnes habitudes à adopter pour garder une bonne hygiène de la bouche. Mais, quand ces tout-petits auront utilisé tous ces dons, qu’est-ce qui va se passer ? Ma foi, on n’est pas sorti de l’auberge dans la mesure où mes premières pensées vont évidemment à ces familles qui sont dans une détresse terrible », a-t-elle affirmé, un brin meurtrie.
La prise de parole de Clarisse sur les résultats des activités menées par l’OMS sur le terrain à Anjouan, et particulièrement dans les villages de Koni Djodjo et celui de Koni Ngani, au profit de la santé bucco-dentaire des enfants, prend donc la forme d’un véritable plaidoyer tirant la sonnette d’alarme.
L’action de l’OMS
En 2022, sur quatre ONG financées par l’OMS, les 3/4 sont intervenues à Anjouan (ACCF, ADDE et SITARA).
Par exemple, sur le cas des actions menées sur l’île par l’ADDE (Action pour le développement durable et l’environnement), pour Ben Charafaine Abdillah, chargé de la communication de l’OMS à Ngazidja, interrogé au téléphone par Masiwa, ce n’est pas l’OMS qui fixe le budget du projet, mais c’est l’association porteuse du projet qui le soumet avec le montant nécessaire pour la mise en œuvre des activités qu’elle décrit dans son dossier.
Ensuite, au niveau de l’OMS, il y a toute une procédure et un long mécanisme d’analyse des projets avant de passer à l’accord de partenariat et de leur octroyer le financement demandé.
Sur le rapport de ADDE que le département en charge du dossier reçoit chaque deuxième mois, Ben Charafaine Abdillah ajoute qu’au-delà des consultations sur les infections buccales des enfants à Anjouan, il est fait état des enfants qui semblent développer des pathologies cardiovasculaires qui seraient dues aux problèmes bucco-dentaires.
Devant cette situation, le représentant de l’OMS Diarra Abdoulaye qui, sur place, a été très touché par le sort des enfants, s’est engagé personnellement en concertation avec les autorités de l’ile et de l’ADDE à envoyer un financement supplémentaire qui sera supervisé par la Direction générale de la Santé pour que l’association recrute un personnel de santé composé d’un cardiologue et d’un spécialiste d’échographie, entre autres, pour mener des consultations spécifiques à la recherche de complications cardiaques sur tous les enfants qui ont des problèmes bucco-dentaires.
Pour rappel, l’ADDE a reçu des financements en 2022 et 2023 en plus de l’enveloppe supplémentaire de l’OMS pour l’échographie Doppler pour supporter cette opération.
Actions concrètes menées par l’ADDE à Anjouan.
Dans le partenariat expérimenté depuis 2022 par l’OMS avec les organisations de la société civile à Anjouan, les statistiques montrent qu’à Mutsamudu 1839 élèves ont bénéficié d’une consultation gratuite et parmi eux 1741 ont bénéficié de soins dentaires gratuits et un don d’un kit sanitaire à 1900 enfants.
À l’échelle des villages de Koni Ngani et de Koni Djodjo, 1500 enfants âgés de 5 à 12 ans ont été pris en charge dans les postes de santé et parmi eux on a soigné 125 malades atteints d’affections bucco-dentaires. Et durant les interventions de l’ADDE, il y a eu également des dons de 1500 dentifrices avec brochure de sensibilisation.
Le diagnostic posé sur les infections buccales des enfants avec un écosystème de la bouche où cohabitent plus de 500 espèces de micro-organismes brossait un tableau plutôt sombre de la situation. Face aux familles de ces enfants qui sont dans une situation de grande détresse, le représentant de l’OMS aux Comores Diarra Abdoulaye se veut optimiste dans la mesure où en citant un adage en wolof, aussitôt un problème est connu dans les détections, il y a mille chances qu’il soit réglé dans le futur proche.
Il est à noter que le gouvernement comorien reste sourd aux calamités des habitants de ces localités éloignées qu’il ne prend en compte que pendant les meetings avant les élections. Comme pour l’éducation, leur santé est laissée à la charge des organisations internationales.