Le projet d’introduction du Shikomori dans l’enseignement primaire continue de prendre des allures de serpent de mer, avec des ramifications insoupçonnées en fonction des controverses du moment. Par Hachim Mohamed
Avec une équipe multidisciplinaire associant linguistes, lexicographes, didacticiens, enseignants et universitaire, jeudi 17 juin 2021, les acteurs-clés du ministère de l’Éducation nationale se sont penchés sur l’introduction de la langue comorienne dans l’enseignement primaire au Centre national de documentation et de la recherche scientifique (CNDRS) à Moroni.
Parmi les participants à cet atelier, Momtiant Ridhoine, enseignante-chercheuse et Alwanisse Abdou, linguiste ont accepté, après leur séance de travail de se prêter au jeu de questions et réponses.
Définir des objectifs
« Pour ce qui est de la promotion des langues nationales, il y a eu depuis l’époque du feu président Ali Soilih Mtsachiwa, une équipe d’experts et de techniciens qui n’ont jamais dételé dans les recherches, mais malheureusement aucun outil de suivi et de support n’a été mis en place afin de les accompagner », commence Moumtiant Ridhoine avant de présenter projet actuel avec beaucoup d’enthousiasme.
« À mon sens, le projet est bien faisable si on respecte les différentes étapes à prendre en compte. Et à ma connaissance, le projet est encore en phase embryonnaire. »
L’œil scrutateur, Alwanisse Abdou abonde dans le sens de sa collègue. « Il faut beaucoup de patience et d’approche volontariste, un plan structuré qui va favoriser l’efficience des travaux et permettre un développement cohérent. », suggère-t-il avec calme.
Sommes-nous encore dans les déclarations de bonnes intentions, et malheureusement non suivies d’actes ? Certains des volets de la problématique abordés sont suffisamment importants pour qu’on y revienne, non tant dans l’espoir de trancher le débat de sa faisabilité que dans celui d’en montrer les obstacles et la gravité.
« À mon sens, d’abord nous devons définir clairement les objectifs à atteindre et les moyens à utiliser. Premièrement il faut élaborer les programmes dans lesquels seront libellés le contenu de l’enseignement du shikomori » a expliqué Moumtiant Ridhoine avant de poursuivre : « La deuxième étape consiste à confectionner des manuels de ces langues nationales en tenant compte des réalités sociologiques de chaque île de l’archipel. L’autre écueil du projet a trait à la formation des enseignants de shikomori ».
Renforcer les capacités d’apprentissage
Alwanisse Abdou aborde lui la question de la formation des formateurs : « En faculté de Lettres modernes de l’Université des Comores, le shikomori est déjà une discipline qui est enseignée. Nous avons là un vivier de jeunes cerveaux dans lequel les autorités de l’Éducation nationale peuvent venir recruter. Toutefois, ces étudiants doivent être formés par les didacticiens avant d’être lancés dans ce circuit. », soutient-il.
Mais, selon certaines indiscrétions, il y a beaucoup d’interrogations sur le budget et sur les échéances du travail soumis à l’équipe qui se compose de spécialistes autour desquels gravitent quelques électrons volontaires.
S’agissant de la promotion de langues nationales, Moumtiant Ridhoine et Alwanisse Abdou sont unanimes pour dire que le meilleur support linguistique pour enseigner à un enfant est sa langue maternelle et que psychologiquement, c’est le système des signes compris qui marche automatiquement dans son esprit pour s’exprimer et comprendre.
En tout état de cause, les défenseurs des langues nationales ont encore du pain sur la planche pour obtenir des avancées spectaculaires. Cela est d’autant plus difficile qu’il n’y a pas eu, de la part du gouvernement, une évaluation de leur coût et de leur faisabilité avant d’engager le système éducatif dans des décisions impossibles à faire respecter.
Mais, pour les membres de l’équipe du projet, l’enseignement du shikomori à l’école renforcera les capacités d’apprentissage des apprenants dans la mesure où, un enfant qui maîtrise sa langue maternelle assimile aisément les langues étrangères.