Le procureur de la République est tout d’abord un magistrat. Il y a deux types de magistrats : les magistrats du Siège qui prennent les décisions, on les appelle communément juges et ceux du parquet, eux, ils sont debout. Ce sont donc eux qui requièrent l’application de la loi. Le procureur de la République, quant à lui, est un magistrat du Parquet. Il représente le ministère public devant toutes les juridictions de l’ordre judiciaire. Suivant le principe d’indivisibilité du Parquet, chacun de ses membres peut se substituer à un autre à n’importe quel stade de la procédure. Le Procureur de la République est nommé par décret du Président de la République et est placé sous l’autorité hiérarchique du Procureur général près de la Cour d’appel (chef du parquet près de la cour d’appel) et du ministre de la Justice.
[ihc-hide-content ihc_mb_type=”show” ihc_mb_who=”2,3,4,5,6,9″ ihc_mb_template=”1″ ]
De ses compétences en matière pénale
Le procureur de la République intervient sur information des services de police, de gendarmerie, des services de l’État ou à la suite d’une plainte d’un particulier, lorsqu’une infraction est commise dans le ressort du tribunal de première instance auprès duquel il exerce. L’article 39 du code de procédure pénale dispose : « Le procureur de la République représente en personne ou par ses substituts le ministère public près le tribunal de Première Instance… . Il représente de même, en personne ou par ses substituts, le ministère public auprès du tribunal de police dans les conditions fixées par l’article 45 du présent code ».
Comme on l’a montré dans l’un des articles précédents, le ministère public (représenté par le procureur de la République ou ses substituts) déclenche l’action publique s’il estime qu’il y a lieu de tenir un procès. Qu’il soit saisi par un particulier ou par un officier de police judiciaire, il peut engager directement des poursuites, classer l’affaire sans suite pour diverses raisons, notamment, la démence du présumé infracteur, l’insuffisance matérielle du dossier, comme il peut renvoyer l’auteur présumé devant un tribunal ou saisir le juge d’instruction par le biais d’une information judiciaire pour les affaires complexes comme un crime.
Le procureur de la République peut dans le cas où il estime que l’officier de police n’a pas fourni un travail assez diligent, ou s’il veut l’orienter pour plus d’efficacité, donner des directives à la police, lui donner des mandats quitte à se saisir lui-même du cas. Le procureur de la République procède ou fait procéder à tous les actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions à la loi pénale. À cette fin, il dirige l’activité des officiers et agents de la police judiciaire dans le ressort de son tribunal (article 41 du code de procédure pénale).
Au civil
Le procureur de la République agit également en matière civile. On peut citer quelques cas où le procureur de la République intervient au civil. Dans un contentieux de la nationalité par exemple, c’est lui qui exerce l’action. L’article 911 du nouveau code de procédure civile dispose : « Toute action qui a pour objet principal de faire déclarer qu’une personne a ou n’a pas la qualité de Comorien est exercée par le ministère public ou contre lui sans préjudice du droit qui appartient à tout intéressé d’intervenir à l’instance ou de contester la validité d’une déclaration enregistrée ». Il intervient aussi dans les rectifications d’actes d’état civil.
« Le procureur de la République territorialement compétent pour procéder à la rectification administrative des erreurs et omissions purement matérielles des actes de l’état civil est celui du lieu où l’acte a été dressé » (article 922 du NCPC). En matière de signification d’acte d’huissier, le procureur de la République est encore une fois sollicité. « Dans ce cas, l’huissier de justice est tenu de remettre copie de l’acte au parquet le jour même ou au plus tard le premier jour où les services du parquet sont ouverts. Le procureur ou son substitut vise l’original et envoie la copie au chef de la police ou de la gendarmerie locale. Le procureur ou son substitut fait mention sur un répertoire de la remise et en donne récépissé » (article 661 du NCPC). Et ainsi de suite.
De la Cour de sureté de l’État
Pour la Cour de sureté de l’État, le rôle du procureur de la République est assuré par le Commissaire du gouvernement. En effet, la loi n°81-005 portant création de la cour de sureté de l’État dispose dans son article 4 que : « La Cour de sureté de l’État se compose d’un magistrat, président et de quatre assesseurs, d’un commissaire du gouvernement exerçant l’action publique assisté de substitut, et d’un greffier… ». Pour constater la connexité entre le rôle du procureur de la République et le commissaire du gouvernement, il suffit de lire l’article 7 de la loi de 81 qui est le presque jumeau de l’article 41 du Code de procédure pénal ci-dessus. Cet article 7 dispose que : « le Commissaire du gouvernement procède ou fait procéder par tous officiers de police judiciaire à tous actes nécessaires, à la recherche, à la constatation et à la poursuite des crimes et délits de la compétence de la cour de sureté de l’État. Sous réserve des dispositions de la présente loi, il a, dans les affaires de sa compétence, les mêmes attributions que les procureurs de la République ». Mais quelles sont donc ces infractions qui entrent dans la compétence de la Cour de sureté de l’État ? L’article 2 de la loi de 81 nous éclaire là-dessus. Il dispose : « Peuvent être déférés à cette Cour, sans aucune distinction en ce qui concerne la qualité de leurs auteurs et quel que soit le mode de leur commission : les crimes et les délits contre la sureté de l’État (…) ; les autres crimes et délits politiques ; les crimes et les délits de droit commun connexes aux catégories visées ci-dessus ; les crimes et les délits de droit commun déterminés en tout ou en partie par des motifs d’ordre politique ».
Enfin, il convient de souligner que le procureur de la République, tout comme le commissaire du gouvernement d’ailleurs, rejoint le ministre de la Justice pour démontrer combien de fois, la fameuse séparation des pouvoirs n’est qu’une véritable utopie digne d’une épopée grecque. Il serait temps d’imiter la Colombie de l’époque qui laissait à la Cour suprême, garante de l’indépendance judiciaire, de nommer le garde des Sceaux, ministre de la Justice. Mais encore faut-il que cettedite Cour soit elle-même indépendante.
[/ihc-hide-content]
Mounawar Ibrahim, juriste.