Le Nyumakele est souvent perçu comme la région la plus pauvre d’Anjouan, pourtant c’est une région naturellement riche avec ses parcelles agricoles entourées de haies fourragères, ses grosses vaches laitièreset maintenant, sa laiterie… Faïssoili Abdou
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« Brune des Alpes et Montbéliard, Frison holstein, jersaise ou jersey,Sahiwal ». Derrière ces noms baroques pour les profanes se cachent les races bovines qui font le bonheur des éleveurs du Nyumakele depuis plus de 20 ans. Elles viennent de France, de l’île de La Réunion, du Kenya, d’Afrique du Sud, de Tanzanie, etc. Le croisement entre ces races bovines d’importations et la race locale a donné naissance à des vaches laitières améliorées pouvant produire jusqu’à 12 litres de lait par jour et par vache. C’est ainsi que naitra, début 2000, l’idée de la mise en place d’une laiterie dans la région. Un projet lancée par l’ONG Initiative Développement (ID), une association internationale de développement ayant son siège à Poitiers (France) et Vétérinaires sans frontières (VSF) Belgique en soutien aux éleveurs du « haut » Nyumakele réunis au sein de l’association « Nema Ya lidziya la Nyumakele ».Inaugurée en 2003, l’unité de transformation et de commercialisation du lait construite sur financement de la France dans le cadre du programme de développement local aux Comores (PDLC) amis les clés sous le paillasson quatre années plus tard à cause d’une mauvaise gestion imputée alors à la direction de l’entreprise. Il faut reconnaitre aussi que la laiterie a eu des problèmes dans l’écoulement de ces produits surtout dans le domaine du transport jusqu’à Moroni. Plus de dix années se sont écoulées depuis cette première expérience, le temps de remettre sur les rails une nouvelle association d’éleveurs et producteurs de lait mais aussi monter un projet viable sur le plan technique et financière.

Et c’est reparti
Nema est morte vive la coopérative des éleveurs bovins des Comores (COOPEBC) ! C’est sous cette nouvelle appellation que les éleveurs bovins du Nyumakeleont décidé de relancer les activités de cette laiterie qui risquait ainsi de tomber en ruine. « L’objectif est de créer un débouché pour la production laitière et réguler les stocks. Le lait étant un produit très périssable, il nécessite alors un conditionnement préalable. De ce fait, et sans débouché, les producteurs subissaient des pertes énormes qui mettaient en péril le développement du secteur. Ils étaient découragés bien que l’élevage laitier présente une marge de croissance importante et devra constituer une source principale de revenus pour les éleveurs. Le deuxième objectif de ce projet est d’intégrer les produits laitiers en tant que source de protéines dans le système nutritionnel pour la population locale », confie Naoildine Houmadi, un des techniciens qui ont aidé à la reprise de la laiterie. La commercialisation des produits (lait caillé et yaourts) a commencé mi-juillet dernier. En 2007, un rapport estimait à 1000 litres la production journalière de lait dans la région. Du lait qui était surtout vendu dans les grandes villes d’Anjouan et à Moroni.
La concurrence des produits importés
Un rapport publié en avril dernier par le projet intégré de développement des chaines de valeurs et la compétitivité (Pidc)décrit ainsi la filière lait au niveau de l’archipel : « La production de lait a connu une hausse exponentielle à partir de 2006, après l’introduction des nouvelles races de vaches laitières de Tanzanie et de l’Afrique du Sud (de variétés Frisons, jersey et Ngounis). De l’autre côté, les importations de produits laitiers n’ont cessé de croître, face à une demande de consommation de plus en plus élevée dans les centres villes, surtout pendant les périodes festives (grands mariages, arrivée des diasporas, etc.).
Autrement dit, aux Comores, on produit du lait autant que l’on importe des produits laitiers.
Il importe de préciser que la transformation laitière n’est pas pour autant une innovation dans le pays. On recense déjà quelques initiatives, bien qu’elles soient très peu nombreuses. Force est de constater que ces initiatives privées (cas de Yakoà Moroniet de Laiterie de Nyoumakéléà Anjouan) n’ont pas véritablement prospéré pour diverses raisons. Premièrement, il y a la concurrence entre la production locale et les produits importés, plus particulièrement concernant le lait caillé.
Deuxièmement, on assiste à une désorganisation du commerce au sein de la filière de lait. Cela concerne le prix pratiqué par les producteurs du lait auprès des unités de transformateurs, ce qui n’avantage pas ces derniers en termes de rendement.
D’autre part, le délestage récurrent de l’électricité dans les villesestune problématique supplémentaire, ce qui pénalise lourdement les transformateurs ».Logiquement, ce constat juste des techniciens du ministère de l’agriculture et de l’élevage appelle ainsi les décideurs à trouver une solution à ces problèmes qui peuvent étouffer le développement de la filière locale au profit des produits importés.
Une région agricole en développement
Délaissée pendant plusieurs années, connue jusque là pour son extrême pauvreté, la région de Nyumakele,à la pointe Sud de l’île Ndzuani,a entamé une transformationau niveau agricole au début des années 1990 avec la mise en place du projet d’Appui aux petits producteurs du Nyumakele (APPN) financé par le Fonds internationale de développement agricole (Fida). Ce projet a eu « un impact positif au niveau des communautés villageoises en particulier au niveau de la maitrise de la technique d’embocagement et de l’intégration de l’élevage par l’introduction de la vache au piquet sur des sites de développement intensifs », relevait un rapport du Programme national de développement humain durable (Pndhd) datant de 2007. Ce document souligne également que grâce àce projet « le paysage du Nyumakele de haut est complètement transformé et des centaines d’hectares de padza ont été réhabilités et remis en culture. Les revenus des paysans de la zone ont été sensiblement accrus et leurs conditions de vie améliorées grâce aux cultures associées et la production laitière ». En quelques années, Nyumakele est ainsi devenu la première région productrice de lait dans l’archipel. Cette région où plusieurs familles vivent uniquement de l’agriculture a également progressé au niveau agricole par l’introduction de nouvelles variétés de produits (manioc, banane et patate) à forte rendements.
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