Le 20 juillet à Koimbani a été célébrée la journée « Mbae Trambwe. » Une aura artistique a resplendi dans la ville historique et traditionnelle du Washili.
Par Houdheïf Mdziani
Du matin à l’après-midi, la journée a été rythmée par l’ivresse corporelle des danses traditionnelles. Des tam-tams régissaient, des voix grisantes raisonnaient, des étoffes traditionnelles brillaient à la clarté du soleil qui illuminait le palais de Trambwe tout près duquel se déroulait le spectacle.
D’une part la troupe de Kwambani, composée essentiellement de femmes, a donné une prestation chorégraphique, et d’autre part, l’ACDM de Mbeni qui s’est démarquée par le traditionnel sambe : la danse a été exécutée sous un rythme ondulant des corps, des pas millimétrés et des gestes raffinés.
Au milieu de l’après-midi, le spectacle s’est éclipsé pour laisser germer la parole jouissive, charnelle, charmante, la langue comorienne dans son originalité, dans son authenticité, avec l’effort de n’apporter aucun néologisme français. L’attention fut portée sur l’importance de sauvegarder notre langue, de perpétuer sa beauté linguistique comme l’ont fait Mohamed Nabhane avec son roman « Mtsandu kashkazi Kusi Misri » et la poétesse Zamzam Elhad avec son recueil de poèmes en comorien « Tsandza ».
Pendant quelques heures, les spectateurs ont été saisis, immergés dans l’univers oratoire et jubilatoire, poétique et historique. Un chantre a déclamé avec passion et ardeur, la vie de Trambwe, sa famille et l’origine des noms de quelques villes du Washili à travers des récits historiques des guerriers voyageurs, des sultanats et des familles nobles ayant dominé la Grande-Comore.
Cette journée fut, aussi, honorée par la présence et l’intervention du Docteur Wadjih Abderemane, chercheur, anthropologue et enseignant. Son discours était principalement basé sur la définition de la culture, essentiellement comorienne. D’après son discours, la culture comorienne ne se résume pas qu’aux danses traditionnelles, la tradition orale aussi, en fait partie. Célébrer la journée de Trambwe, c’est, selon lui, célébrer la culture comorienne.
Il a aussi tenu à préciser, pour enlever toute ambigüité historique, que Trambwe, a choisi volontairement de poétiser la langue comorienne au lieu de l’écrire par choix, par volonté. C’est-à-dire de respecter des normes de la poésie à savoir l’intonation, la musicalité et le rythme. Tout en faisant l’analogie avec le poète français Pierre de Ronsard.
À la nuit tombée, sous le regard crépitant des étoiles, dans un décor traditionnel majestueux, le public a vu apparaitre sur scène l’écrivain Aboubacar Said Salim qui a tenu à ouvrir le spectacle de la veillée poétique, une veillée qui a mêlé mises en scène artistique, poésie et chant. La langue comorienne a été cajolée, caressée de la langue par des artistes passionnément amoureux du Shikomori tels que le slameur Rahim Elhad, connu sous le nom du Parolier du Karthala et rythmée à la fin par la prestation de Mwegne M’madi, le génie manipulateur du ndzendze.
À la fin, du spectacle, les organisateurs ont tenu à interpeller le gouvernement pour qu’il consacre un budget national pour la célébration de cette journée, vu qu’elle a été rendue officielle en 2002 pour éviter la mendicité et la charité forcée pour une activité qui ne concerne pas que la ville de Kwambani, mais tous les Comoriens.