Alors que la crise de l’électricité sévit depuis plus longtemps et d’une manière plus profonde dans tout le pays, le gouvernement comorien a cherché à montrer qu’il agit par un communiqué sur… l’absence d’eau dans la capitale.
Par MiB
La crise de l’eau dans la capitale semble plus préoccuper le gouvernement que la pénurie de l’électricité qui bloque les activités économiques et complique la vie des habitants de Moroni depuis plusieurs mois. En effet, un communiqué signé par S. Antoisse S.M. Ezidine, chargé du département Communication au Secrétariat Général du Gouvernement indique aux habitants de la capitale qu’à la demande de la Société Nationale d’Exploitation et de Distribution de l’Eau (SONEDE) le gouvernement va leur venir en aide.
Une crise de l’eau bien avant les travaux de la SONEDE
Dans ce communiqué, nous apprenons que le manque d’eau dans la capitale est dû à des travaux de la SONEDE et que ces travaux dureront jusqu’en septembre (« la fourniture de l’eau à Moroni serait perturbée par les travaux de réhabilitation de la citerne R2000 »). Pourtant ce problème de l’eau, comme celui de l’électricité a commencé bien avant ces travaux. Depuis plusieurs mois, les habitants de la capitale achètent de l’eau dans des bidons, alors qu’il n’a pas arrêté de pleuvoir cette année. À la fin du communiqué signé par Antoisse Ezidine, il y a comme un aveu dans ce sens. On apprend que ces travaux ont pour objectif « de résoudre la question de la pénurie d’eau dans la capitale et les zones périphériques, de manière pérenne et durable », ce qui veut dire qu’avant ces travaux, il y avait bel et bien des pénuries dans la capitale et que les travaux n’expliquent pas tout. Le communiqué s’emmêle quelque peu.
Mais, la question essentielle reste celle-ci : le gouvernement a-t-il l’intention de fournir de l’eau aux habitants de la capitale pendant toute la durée des travaux ? Mais là aussi, le communiqué venant du Secrétariat Général du Gouvernement (SGG), dirigé par Nour el Fath Azali et coiffant le gouvernement, est ambigu. Pourtant, le nouveau décret par lequel le chef de l’État a transmis à son fils l’essentiel des pouvoirs revenant aux ministres, aux gouverneurs et même aux maires, entre autres, indique que lors d’une crise quelconque et notamment environnementale ou d’une catastrophe naturelle, le Secrétaire Général du Gouvernement prend le commandement des opérations. Or la capitale vit une réelle crise avec le manque d’eau dans les foyers, ajouté au fait que les habitants n’ont pas d’électricité, sauf quelques heures dans la soirée, le plus souvent. Cette absence d’eau peut amener agir sur l’hygiène et installer de nouveau, comme par le passé, une épidémie de choléra.
Une distribution d’eau insuffisante ?
Le communiqué prévoit une distribution de l’eau dans les 14 mosquées de Moroni le 15 août et dans les divers quartiers de la capitale entre le 16 et le 22 août, soit pendant une semaine. Et après ? Ce n’est pas clair dans le communiqué. Et décidément, ce communiqué est vraiment ambigu sur tous les aspects. Pour connaître l’agenda de la distribution de l’eau dans les quartiers, le communiqué renvoie au numéro de téléphone d’une responsable de la mairie, mais cache ce numéro. Quel est l’intérêt ?
On peut également noter que quatre ou cinq jours avant la publication du communiqué du SGG, la direction de la SONEDE avait trouvé la solution miracle en déclarant dans un communiqué tout aussi extravagant l’interdiction d’acheter de l’eau aux vendeurs. Autrement, dit la SONEDE avait proclamé le 11 août journée de l’eau gratuite puisqu’elle était incapable d’en distribuer dans les maisons et elle s’imaginait donc qu’un propriétaire d’un camion-citerne allait se lever tôt le matin, récupérer de l’eau et faire le tour de la capitale pour en distribuer aux gens gratuitement.
C’est sans doute en constatant l’échec de cette opération que la direction de la SONEDE s’est adressée au gouvernement et que le Secrétariat Général du Gouvernement s’est emparé de l’affaire, histoire de persévérer dans une sorte d’illusion de l’action. Le SGG a imaginé la location des camions pour distribuer l’eau gratuitement. Et il a pensé que sa nouvelle opération allait être louée par la population, d’où le communiqué pour se mettre en avant, alors que l’opération de distribution d’eau elle-même est une indication sur l’incapacité du gouvernement à fournir à la population le minimum vital : de l’eau. Un internaute s’était même interrogé : sommes-nous dans une situation de guerre pour que la population soit ravitaillée en eau ?
Au final, il est probable que des gens ont reçu quelques bidons d’eau, mais l’opération semble être un échec, sur le terrain et au niveau de la communication. Peu de gens ont pu en bénéficier. Il suffit d’interroger quelques personnes dans la capitale. La plupart ne sont pas au courant de cette opération et presque tous disent continuer à acheter de l’eau au niveau des camions faute d’un approvisionnement par l’État ou d’un retour à la normale.