Du 6 au 18 novembre 2022 a eu lieu la 27e Conférence des Parties à la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements climatiques en Égypte. Les Comores ont participé à ce Sommet.
Nezif Hadj Ibrahim
Cependant alors que le fond des discussions s’articulait autour de la responsabilité des pays dont l’économie favorise le changement climatique, la délégation conduite par Azali Assoumani a fait un bond en arrière en axant son discours sur les promesses d’aides financières faites dans le cadre de l’Accord de Paris, un accord qui présente des faiblesses qui ont amené les pays en vulnérabilité face au dérèglement climatique à mettre en avant la question de la « dette climatique », plus précisément de justice climatique.
Le sommet sur le climat réunissant les différents représentants politiques des pays, ainsi que des scientifiques est le lieu privilégié pour prendre des décisions sur la conduite du monde face à la question de l’environnement et du climat. C’est le lieu de rencontre où des traités peuvent être établis entre les États pour s’engager dans un objectif commun.
La responsabilité des « Grands pollueurs »
L’idée est apparue en 1991 au sein de l’Alliance des petits États Insulaires (Aosis) à laquelle les Comores sont membres. Mais, c’est en 2013 qu’un mécanisme international pour perte et préjudice verra le jour. Malheureusement, il n’aura pas la vocation que ses défenseurs l’avaient souhaitée puisqu’en vertu de l’Accord de 2015, les « grands États pollueurs », c’est-à-dire ceux dont les activités économiques et industrielles ne seront tenues qu’à un devoir de solidarité. Concrètement, l’article 9, alinéa 1 de l’Accord de Paris de 2015 disait que « les pays développés fournissent des ressources financières pour venir en aide aux pays en développement Parties aux fins tant de l’atténuation que de l’adaptation dans la continuité de leurs obligations au titre de la Convention ». Malheureusement, cette libéralité conçue en aide publique au développement ne s’avère pas décisive, surtout aux yeux des États vulnérables face aux changements climatiques dont les conséquences font que le cours de leur développement est mis en cause. Mais le problème réside dans le fait qu’un traité n’est opposable qu’aux pays qui acceptent de s’y engager.
Les prétentions des petits États Insulaires
Portée par la voix du Premier ministre d’Antigua-et-Barbuda, l’Alliance des petits États Insulaires a su mettre sur la table des négociations la question de la responsabilité climatique des « grands pollueurs ». Il s’agit, en effet, de « dette » qui serait à la charge des plus grands pays de gaz à effet de serre, et de ce fait devrait payer les dommages causés ainsi que la vulnérabilité ayant été engendrés pour de nombreux pays, comme les Petits États Insulaires, par le dérèglement climatique. L’idée est de taxer plus particulièrement les entreprises gazières et pétrolières dont les activités se développent au détriment de l’environnement. Selon le Premier ministre Gaston Browne à la tribune de la cop27 en Égypte, « au premier semestre de cette année, six entreprises des énergies fossiles ont gagné plus d’argent que nécessaire pour couvrir les coûts des dégâts climatiques majeurs dans les pays en développement, avec près de 70 milliards de bénéfice ». Étant donné qu’à chaque fois que les conséquences du changement climatique s’abattent sur un pays et que des pertes matérielles et parfois humaines font coûter des millions, voire des milliards aux pays victimes. Le Premier ministre d’Antigua évoque à ce titre la nécessité d’un mécanisme de compensation. « Nous devons sans équivoque établir un fond pour les pertes et dommages à cette COP ». Cette responsabilité, les États-Unis ne la nient pas. John Kerry, représentant du président Joe Biden à la Cop27, concède que « le président américain reconnaît « la responsabilité particulière » de son pays envers les pays en développement ». Seulement pour les Petits États insulaires, cette responsabilité ne devrait plus rester de l’ordre du symbole, c’est à cet effet qu’ils ont pu mener d’intenses négociations afin de mettre dans l’agenda de cette 27e COP la dette climatique dans le but de renforcer « la finance climatique ».
Les Comores se contentent de demander des aides
Alors que l’Alliance à laquelle les Comores fait partie parlait d’une seule voix à l’occasion de cette Cop27, Azali Assoumani a adopté un autre chemin pour inscrire sa position dans l’Accord de Paris dont lui-même critique l’efficacité.
Si l’Aosis penche surtout pour une responsabilité juridique dans le cadre d’une convention, le Chef de la délégation comorienne ne semble pas passer le cap de la solidarité propulsé en 2015 contre les vœux des Petits États Insulaires. D’ailleurs, Azali Assoumani le rappelle dans son discours, que « les pays développés doivent faire des progrès mesurables dans la fourniture des 100 milliards de dollars par an prévus dans l’accord de Paris, sachant qu’actuellement la somme réelle versée est inférieure à 50% ». Cela rend donc ses propos incompréhensibles, pour ne pas dire hors contexte, surtout du fait que sur le champ diplomatique l’alliance n’est plus que souhaitable. Ainsi, il demande des aides publiques en appelant à la bienveillance des pays les plus riches, « j’ose espérer plus d’engagement et de solidarité, fait-il savoir, afin de parvenir à des avancées beaucoup plus significatives, et notamment la création d’un financement supplémentaire dédié à ces pertes et dommages ». À se demander quel est l’intérêt de faire partie d’une association d’États pour mieux peser sur la scène internationale face aux questions climatiques, si on ne peut tirer bénéfice du bloc.
En tout cas, à en juger par le discours d’Azali Assoumani, l’État comorien n’avait pas préparé cette conférence. Cela a amené Azali Assoumani à insister sur les prix et les mesures avancés lors de l’Accord de Paris alors que le monde essaie de franchir une autre étape qui consiste à mieux répondre aux exigences qu’impose le changement climatique surtout au regard des catastrophes naturelles intenses qui frappent le monde ces derniers temps.