Dans un coin du paysage médical comorien, un nom s’impose de plus en plus avec respect et admiration : Anziz Abdallah. Kinésithérapeute formé à Madagascar, il est aujourd’hui l’un des professionnels les plus sollicités dans le domaine, aussi bien dans le monde sportif que dans le secteur médical général.
Par Anoir Ahamadi
De Ouani à la sélection nationale, en passant par les clubs de Ngazi Sport et le centre hospitalier de Hombo, Anziz Abdallah incarne cette génération de jeunes professionnels qui allient engagement, compétence et vision d’avenir.

Une vocation née entre passion et observation
L’itinéraire professionnel d’Anziz Abdallah ne commence pas directement par la kinésithérapie. C’est en tant qu’infirmier qu’il pose les premiers jalons de son parcours médical, à Madagascar. Mais très vite, il ressent le besoin de se diversifier, de compléter ses compétences, non par simple curiosité, mais par sens du service. Il observe avec attention les nombreux Comoriens qui affluent à Madagascar à la recherche de soins traditionnels ou de séances de rééducation. Ce constat agit comme un déclencheur : pourquoi ne pas se former dans ce domaine en pleine expansion et répondre aux besoins réels de ses compatriotes ? C’est ainsi que naît son engagement pour la kinésithérapie.
« Je voulais à la fois élargir mes connaissances et rendre service aux miens », explique-t-il. Une démarche à la fois humaniste et pragmatique, qui témoigne d’un esprit orienté vers le collectif.
Une formation rigoureuse à Diego-Suarez
C’est dans la ville de Diego-Suarez, au nord de Madagascar, qu’Anziz Abdallah suit sa formation spécialisée. Dans cet environnement multiculturel, il acquiert les compétences techniques nécessaires à l’exercice de sa nouvelle profession. Mais, plus encore, il s’imprègne d’une certaine éthique du soin, où l’écoute du patient et l’adaptation aux besoins individuels deviennent essentielles.
« J’y ai appris bien plus que des gestes techniques », confie-t-il. « C’était aussi un apprentissage de l’humilité, de la patience, et du sens du détail. »
À son retour aux Comores, Anziz Abdallah ne se précipite pas vers les grandes institutions. Il commence par offrir ses services à domicile, au plus près des patients. Ces premières expériences sont déterminantes. Elles lui permettent non seulement de roder sa pratique, mais aussi de construire un réseau de confiance.
Une profession porteuse d’avenir
Petit à petit, son nom circule. C’est ainsi qu’il est approché par le Football Club de Ouani (FCO), devenant le tout premier kiné professionnel du club. Ce premier pas dans le monde du sport lui ouvre des portes. Son savoir-faire, son sérieux et sa rigueur sont rapidement repérés. Ce n’est que le début d’un parcours remarquable.
À l’heure où de nombreux jeunes cherchent leur voie, Anziz Abdallah n’hésite pas à recommander son métier. Pour lui, la kinésithérapie n’est pas seulement une carrière médicale, c’est aussi une voie pleine d’opportunités. « C’est un métier qui permet de subvenir à ses besoins, certes, mais aussi de tisser des liens humains très forts », affirme-t-il.
Cette capacité à combiner stabilité économique et enrichissement personnel est sans doute l’une des clés de la réussite de cette profession aux Comores et ailleurs. D’autant plus qu’avec le développement du sport et la prise de conscience croissante des bienfaits de la rééducation physique, la demande pour ce type de profil ne cesse d’augmenter.
L’appel du drapeau : une consécration patriotique
En 2022, lors du tournoi COSAFA organisé en Afrique du Sud, Anziz vit l’un des moments les plus forts de sa carrière : son intégration au sein du staff médical de la sélection locale des Comores. Pour lui, cet appel représente bien plus qu’une opportunité professionnelle. C’est une consécration. « J’étais submergé de joie. Servir ma patrie, c’était un rêve devenu réalité », se souvient-il.
Depuis cette première convocation, il n’a plus quitté l’équipe. Il a notamment pris part au récent Championnat d’Afrique des Nations (CHAN) au Malawi. Sa fidélité et son professionnalisme en font aujourd’hui un pilier du staff médical national.
Le rôle central du kiné dans la performance sportive
Interrogé sur l’importance d’un kinésithérapeute dans une équipe sportive, Anziz est catégorique : « C’est un acteur indispensable. » Au-delà de la simple récupération physique, il insiste sur le rôle préventif et correctif du kiné. De la rééducation à l’optimisation des performances, en passant par le traitement des douleurs ou des blessures, le kiné intervient à toutes les étapes du cycle sportif.
Il rappelle également les ravages que peut entraîner l’absence de ce professionnel au sein d’un club ou d’une sélection. « Dans le passé, de nombreux joueurs africains ont vu leur carrière compromise faute de soins appropriés. »
Un homme de projets et d’ambitions
Si son emploi du temps est déjà bien rempli, Anziz Abdallah ne manque pas de projets pour l’avenir. Actuellement au service du club Ngazi Sport de Mirontsi, il garde un œil tourné vers l’équipe A des Comores, les fameux Cœlacanthes. « C’est mon grand rêve », avoue-t-il. Il espère un jour faire partie du staff médical de l’élite du football comorien.
Mais ses ambitions ne s’arrêtent pas là. Il projette également d’aménager un cabinet moderne, doté d’un modèle de travail plus structuré et plus spécialisé. « Je veux offrir des prestations de qualité, adaptées aux besoins variés des patients, dans un cadre professionnel à la hauteur des standards internationaux. »
Une profession encore trop peu représentée
Malgré les progrès, Anziz observe que la kinésithérapie demeure encore marginale aux Comores. Si quelques praticiens opèrent localement, souvent à domicile, peu disposent de l’équipement et de la formation nécessaires pour offrir des soins professionnels complets. « Il y a des kinés, certes, mais peu sont installés avec du matériel moderne », constate-t-il.
Dans son propre cabinet, il fait la différence grâce à un investissement personnel important : appareils spécialisés, outils de rééducation, espace fonctionnel. Une manière de montrer l’exemple et de tirer vers le haut l’ensemble de la profession.
Un modèle pour la jeunesse comorienne
Anziz Abdallah est plus qu’un kiné. Il incarne une dynamique de progrès, de retour aux sources, de service à la communauté. Son parcours, marqué par l’effort, la formation et la volonté de bâtir chez soi, résonne comme un message d’espoir pour les jeunes Comoriens en quête de sens.
Loin des discours théoriques, il prouve par l’action qu’il est possible de se former, de réussir, et de contribuer au développement de son pays. Une leçon de courage et de persévérance qui mérite d’être entendue, partagée, et surtout suivie.