La majeure partie des États africains ont été naïfs dans leurs premiers contacts avec les puissances occidentales. Aujourd’hui, ils tentent d’exprimer la plénitude de leur souveraineté tant sur le plan politique, qu’économique et monétaire. Certains pays africains et leurs dirigeants ne se laissent plus influencer par l’Occident et prennent des décisions émanant de leur volonté patriotique et nationale. Certains veulent même mettre en place une nouvelle monnaie au détriment du franc CFA, et dans le domaine de la Justice, arrêter de s’aligner sur les textes juridiques externes pour construire leur propre législation.
Par HOUDAIDJY SAID ALI Étudiant en Sciences juridiques et politiques Dakar – Sénégal
L’Union africaine a mis en avant dans son agenda 2063 sa volonté de paix et de stabilité. Mais, la paix ne pourra durer que si elle provient des États africains eux-mêmes.
Panafricanisme contre le néocolonialisme
L’avenir des Africains ne dépend que des Africains et les principes juridiques africains doivent servir à bâtir l’avenir du continent. De ce fait, l’idée tend à exprimer un pur panafricanisme, comme ce fut le cas avec les plus grandes personnalités noires telles que Nelson Mandela, Kwame Nkrumah, Modibo Keïta. Un cercle dans lequel on peut trouver des activistes plus contemporains comme Kemi Séba et Maud-Salomé Ekila avec l’ONG Urgences panafricanistes. Il est essentiel de comprendre que le panafricanisme est une doctrine qui tend à développer l’unité et la solidarité africaines. L’objectif visé est l’indépendance totale du continent africain et la solidarité des peuples noirs. Il doit être différencié des allégations barbares que les Occidentaux jettent dessus lorsque les intérêts ne leur sont pas favorables. Les peuples opprimés cherchent à lutter contre le néocolonialisme.
De ce fait, l’Afrique, victime d’esclavagisme, de discrimination et du discours paternalistes, doit se détacher et prendre du recul, revoir les textes ainsi que leur transposition. Dans l’ordonnancement juridique, les traités et accords ratifiés ont une valeur supra législative, ce qui permet donc à d’autres États de mener une politique d’ingérence. Ces États nous poussent à ratifier des traités et des accords que parfois eux-mêmes n’ont pas ratifiés, et qui, par conséquent, ne peuvent pas les toucher.
L’Afrique a participé pleinement à la libération de l’Europe des griffes d’Adolf Hitler et lui fournit une bonne partie de ses besoins. Qu’on se dise la vérité : sans l’Afrique, l’Europe n’est rien du tout. Faut simplement voir comment la France peut dénigrer l’islam et les Arabes, comment elle peut traiter les Arabes de terroristes et de djihadistes, mais peut signer des accords de plusieurs milliards d’euros d’investissements dans l’économie française d’ici 2030 avec l’Émir du Qatar, Tamim Ben Hamad Al-Thani. L’Afrique doit tirer un exemple de cette situation et se projeter vers sa prospérité.
L’Afrique a besoin de paix
L’Afrique doit absolument éviter de se laisser entraîner dans des guerres qui ne sont pas les siennes. Les guerres idéologiques ne sont pas les bienvenues en Afrique. L’Afrique a besoin de paix, le continent africain lutte contre la pauvreté et doit seulement améliorer les conditions de vie des peuples noirs.
Elle a aussi besoin de volontaires. C’est pourquoi aujourd’hui, il existe des organismes privés qui sont spécialistes dans l’art de la guerre et des crises énoncées qui disposent d’une expertise dans le domaine. On peut très clairement constater qu’il y a un manque d’instruments pour maintenir une paix durable en Afrique. Certains peuvent demander pourquoi l’Afrique ne se repose pas sur elle-même et ses forces militaires. L’Afrique est dans un processus d’intégration. Les organisations sous-régionales œuvrent dans ce but. Dès lors, on comprend pourquoi on peut parler d’un régionalisme africain. Malheureusement, cela reste un obstacle dans la lutte contre le crime et les violations que connaît l’Afrique. Le manque de collaboration entre les États fait en sorte qu’on ne peut pas observer une situation réelle garantissant l’avenir du continent africain. Et malgré le fait que l’Afrique ne dispose pas des moyens nécessaires, elle ne doit pas non plus s’appuyer sur des puissances hors du continent. L’Afrique doit tirer les leçons des interventions militaires des États-Unis en Orient et celles de la France en Afrique. Tous se sont souvent soldés par des échecs.
Le Sénégal : un exemple d’une indépendance de la justice pénale africaine
Il est vrai que nous devons rendre justice dans les zones où des crimes ont eu lieu et continuent, comme au Congo et le génocide qui s’y déroule. Il faut mettre fin aux souffrances que connaissent les peuples noirs, que ce soit en Afrique centrale, dans le Sahel ou dans le Maghreb.
Le Sénégal reste un exemple avec ses chambres africaines extraordinaires où il a fallu juger l’ex-président Habré. Nous devons juger sur la base d’une compétence universelle. Ainsi, l’Afrique entière devrait s’aligner dans cette politique et refuser toute ingérence. Les auteurs des crimes au Congo doivent être traduits devant des juridictions, conformément aux textes législatifs nationaux, sur des bases juridiques sous-régionales et continentales. Cela doit être pareil avec les rebelles qui déstabilisent le Mali et d’autres territoires africains.
Les Chambres africaines extraordinaires sont une juridiction installée à Dakar au Sénégal et créée par un accord du 22 août 2012 entre l’Union africaine et le Sénégal. Les Chambres sont chargées de poursuivre et de juger les auteurs de « crimes et violations graves du droit international » commis au Tchad sous le régime d’Hissein Habré, entre le 7 juin 1982 et le 1er décembre 1990. Ceci reste une avancée majeure pour la justice africaine dépassant les limites de la souveraineté et montrant que l’Afrique n’est pas une jungle, mais un continent où l’on peut trouver des institutions étatiques et où l’on rend justice. L’affaire de l’ex-président du Tchad reste remarquable. Entre le refus d’extrader exprimant la souveraineté de la République du Sénégal et le fait de le juger à Dakar est une bonne réponse démontrant que le gouvernement de Macky Sall ne comptait pas rester dans l’impunité, plaçant ainsi le Sénégal comme vitrine de la démocratie africaine.
Cependant, il est très important de souligner l’aspect financier. C’est bien beau de parler de justice, mais l’aspect financier doit être évoqué. Les Africains doivent comprendre les difficultés dans la lutte contre le terrorisme, la criminalité transfrontalière ainsi que les crimes odieux. Ce n’est pas toujours facile de vouloir contrôler l’entièreté des territoires africains. Les pays sont frappés par une extrême pauvreté, et les États n’ont pas les moyens logistiques pour y faire face. La paix a un prix et cela demande beaucoup de moyens pour la maintenir.
Qu’attendons-nous des organisations internationales africaines ?
L’Union africaine doit avoir une position beaucoup plus axiale pour protéger les États africains. Mais, le continent africain doit exprimer son autonomie. Jamais les Américains, les Français et les Allemands n’accepteront qu’on traduise en justice leurs nationaux en Afrique. De ce fait, nous espérons qu’une justice puisse être rendue en RDC, qu’elle émane du cœur de l’Afrique.
L’Union africaine se doit aussi de prendre les devants et de constituer un parapluie pour les États africains contre la justice pénale internationale. La CPI restant la seule Cour pénale internationale permanente à compétence pour traduire les auteurs des crimes perpétrés dans le monde, y compris ceux du Congo. Or, l’Afrique garde une position dubitative contre la Cour pénale internationale, lui reprochant d’être instrumentalisée. En effet, depuis sa création, elle n’a traité majoritairement que des affaires africaines. Les Africains parlent d’une partialité de la Cour pénale internationale.
Les organisations internationales ont des compétences et un espace géographique bien définis. Le Conseil de paix et de sécurité doit plus se donner les moyens, éviter les critiques sur son positionnement tardif et contribuer à la résolution des conflits afin d’atteindre les objectifs de l’agenda 2063.
Il est certes vrai que l’ONU a pour mission de porter la paix dans le monde, mais face aux difficultés qu’elle rencontre, elle devrait être reléguée au second plan, car le processus de paix et de sécurité en Afrique doit être interne ; elle ne doit venir que des États africains et de ses organisations régionales et sous-régionales. Les actions des organisations internationales africaines doivent être coordonnées pour le bien-être du continent. L’UA se doit d’être le commandeur des volontés politiques de paix en Afrique et les organisations sous-régionales doivent être les organes d’exécutions. De ce fait, l’UA africaine et les organisations sous-régionales doivent faciliter l’intégration des cinquantaines d’États africains, se coordonner et mettre fin au génocide au Congo.
Les interventions étrangères semblent agressives et n’aboutissent à rien. La présence de la France au Sahel et des contingents onusiens n’a rien apporté. Bien au contraire, le Mali a réussi à reprendre le contrôle de plusieurs kilomètres de son territoire depuis le départ des Français. Cela montre à quel point les forces étrangères et les organisations internationales ralentissent la progression de l’Afrique. Si l’ONU et les autres acteurs internationaux n’arrivent pas à régler la crise à Gaza, ce n’est pas au Congo ni au Mali qu’ils apporteront quelque chose. Les États africains considèrent les interventions étrangères dans la résolution de conflit comme étant une ingérence. À l’exemple de la Libye qui n’a jamais connu de stabilité depuis l’intervention de la France en 2011.
L’Afrique doit être unie. Une Afrique unie pourrait être la plus grande puissance au monde. Mais, l’Afrique doit d’abord apporter son soutien et rétablir l’État de droit à l’Est du Congo. Il n’y a pas de prospérité africaine sans l’ensemble de ses États membres, mais encore, il n’y a pas de prospérité africaine sans la République démocratique du Congo. Enfin, l’Afrique ne peut connaître cette révolution que si elle se base sur les idéaux panafricains, à savoir le Sankarisme.