Depuis l’annonce du Wuambushu sur l’île de Mayotte, le gouverneur d’Anjouan, Anissi Chamsidine se dit toujours inquiet des conséquences d’une telle opération.
Par Naenmati Ibrahim
Depuis l’annonce du Wuambushu sur l’île de Mayotte, le gouverneur d’Anjouan, Anissi Chamsidine se dit toujours inquiet des conséquences d’une telle opération.
Un des volets de l’opération Wuambushu consiste à renvoyer des personnes dites en situation irrégulière se trouvant sur l’île de Mayotte administrée par la France vers les Comores, et plus précisément sur l’île d’Anjouan, gouvernée par Anissi Chamsidine, censé être élu en 2019. Ce dernier a tenté, en vain, de montrer son opposition face à une telle crise sociopolitique qui risque d’anéantirait le peu d’ordre qui reste sur l’île. Mais, il n’a pas assez de pouvoir, ne serait-ce qu’un pouvoir d’influence, et aucune légitimité, même auprès de la population anjouanaise qui estime qu’il a été nommé contre son gré par un régime dictatorial qui l’étouffe. Même un simple administrateur d’une institution relevant de l’autorité centrale peut lui tenir tête, comme nous l’avons vu il y a quelques jours. Nous avons vu les arrêtés et les notes circulaires émanant du gouvernorat d’Anjouan défiler dans les réseaux sociaux, mais aucun soutien de la part des Anjouanais ne s’est manifesté. Nous avons assisté plutôt à une humiliation envers sa personne, son autorité et l’île qu’il représente de la part d’un pouvoir central qui semble faire, de jour en jour, des expériences sur Anjouan pour mesurer son degré d’autoritarisme.
Des tentatives de séduction politique
Il a voulu interdire le renvoi des sans-papiers dans l’île d’Anjouan, on lui a même interdit l’entrée au port de Mutsamudu, pour lui signifier sa marginalisation dans les décisions concernant l’île qu’il prétend gouverner. Il était censé aller prendre des nouvelles sur le retour des rotations de la société SGTM entre Mayotte et Anjouan. Il a été interdit dans les lieux et humilié. Il a voulu sauver la face, le 17 mai dernier, en faisant appel aux différents responsables de l’île (notables, maires, conseillers, société civile) lors d’une réunion à Dari Nadjah afin qu’ils se tiennent derrière lui pour dénoncer l’opération Wuambushu dont les conséquences seront ressenties par toute l’île. La réunion ne s’est pas passée comme prévu par son service protocolaire. Les Anjouanais s’attendaient à une démission de ses fonctions suite à l’humiliation subie au port et le manque de considération du pouvoir central qui donne l’impression de pousser Anjouan au séparatisme comme en 1997.
Du déjà vu !
Ce n’est pas la première fois que le gouverneur Anissi se retrouve dans une paralysie fonctionnelle, mais il n’a jamais perdu son sang-froid, disons sa dignité aux yeux des Anjouanais. Selon la direction du port, l’ordre de ne pas le laisser de pénétrer dans les lieux serait venu directement de Beit Salam.
C’est un véritable couteau dans le dos pour le représentant des Anjouanais, mais il ne se laisse pas abattre par le contexte d’un poste qui n’est pas pris au sérieux par le pouvoir central. Le gouverneur Anissi Chamsidine se veut maître de la situation et il va le montrer dans son allocution durant sa prise de parole après la réunion à Dar Nadjah. Malgré l’humiliation, il s’est montré ferme dans sa position sur l’affaire des expulsions de Mayotte et des renvois des personnes en situation irrégulière vers son île. Il condamne sévèrement la France et lui demande de trouver une autre alternative en commençant par l’abrogation du visa Balladur qui a causé beaucoup de tragédies. Pendant la réunion aux allures de conférence à Dar Nadjah, il a déclaré avoir reçu des menaces en raison de ses positions qui ne vont pas dans le même sens que Beit Salam.
Des discours politiques très controversés.
Quand le gouverneur d’Anjouan voit en la France un ennemi qui cherche à nuire à la cohésion sociale des communautés de l’archipel des Comores, le président Azali Assoumani voit la France comme l’allié de toujours et l’ami des Comores, malgré le contentieux qui lie les deux pays depuis 1975. Dans son allocution du 17 mai, le Gouverneur a demandé au président Azali, également président en exercice de l’Union Africaine, de profiter de son poste pour lancer le débat au niveau international pour trouver une solution sur la question de la présence de la France aux Comores. Une présence qui selon lui ne respecte pas le droit international. Il a fini son allocution avec ces mots : « La question de l’intégrité territoriale de notre pays doit absolument trouver des réponses tangibles et définitives, ce qui revient à poser la question de la décolonisation inachevée de l’archipel des Comores. »
Le représentant des anjouanais veut mener bataille contre l’opération Wuambushu, mais il a la mémoire courte, il semble même amnésique. Comment pourrait-il être le maître de la barque Anjouan en sachant que les gouverneurs des îles n’ont plus aucun pouvoir ? Et cela depuis la révision de la constitution en 2018. Il veut être le maître de son navire, mais il semble oublier que lui-même a contribué à faire en sorte que tous les pouvoirs soient renvoyés à Moroni, faisant de ce régime, un régime autoritaire et centriste.
Une crise politique qui persiste.
Le gouverneur a rappelé que le pays est à quelque mois des élections présidentielles et des gouverneurs. Cette crise, si elle persiste, pourrait perturber ces élections. Le gouverneur d’Anjouan n’a pas encore déclaré sa candidature, mais la rumeur dit qu’il veut se représenter pour un troisième mandat. Comme le président Azali Assoumani, le Gouverneur Anissi veut s’accrocher au pouvoir. Il était déjà gouverneur durant le régime du président Ikililou Dhoinine, il aimerait garder ce poste encore en 2024.
Il a été un ancien allié du président Ahmed Abdallah Sambi, mais il lui a tourné le dos pour soutenir Azali Assoumani, ce qui lui a permis de devenir gouverneur en 2019, après des élections contestées. Il avait mené campagne pour la réélection du président Azali, sans tenir compte de la tournante de 2020 et de l’arrestation de l’ex-président Sambi qui était aussi son allié et partenaire politique. Malgré leur relation ambiguë, il reste tout de même un allié pour le président de l’Union.
Depuis 2016, les Comoriens votent pour de Grands-Comoriens à la tête de la magistrature suprême. On dirait que la tournante ne tourne plus ou tourne d’une façon anormale, car cela semble inimaginable qu’on autorise les autres îles (Anjouan et Mohéli) de se représenter trois fois au moment où ça sera leur tour de se faire élire pour la présidence des Comores. Le gouverneur Anissi, qui a soutenu le projet de changer la Constitution pour permettre aux Grands-Comoriens de se représenter pour une troisième fois en 2024 pour la présidence, est-il l’homme de la situation ? Anjouan a subi pas mal de représailles, et le Gouverneur est lui-même souvent la cible malgré son rôle dans cette situation que connaît l’île depuis un bon moment.
Des refoulés en masse dans l’île d’Anjouan.
Depuis son commencement le 24 avril dernier, l’opération Wuambushu ne perturbe pas seulement l’île de Mayotte, mais aussi l’île d’Anjouan. Anjouan étant l’île la plus proche de Mayotte, elle est en proie à des bouleversements.
En effet la majorité des sans-papiers sont des Anjouanais. Mayotte qui avait cru que l’opération allait améliorer la sécurité de leur île est en train de subir les méfaits de cette opération d’expulsion et de démolition de banga comme c’était prévu à l’origine. Ces maisons en tôles considérées comme insalubres ne sont pas les seules maisons à avoir subi des démolitions. Il y a eu aussi des maisons en briques ayant fait les frais de cette opération alors qu’elles appartenaient à des Maorais. Ce qui rend l’opération litigieuse pour certains Maorais également. Un maorais qui était parmi ceux qui détruisaient les maisons s’est effondré et a rendu l’âme quelques jours après, lorsqu’il s’est retrouvé en face de sa propre maison. Wuambushu est devenu problématique pour certains Maorais, comme pour les autres îles de l’archipel des Comores, en particulier Anjouan, devenue le port principal des déportations des sans-papiers, malgré le refus et l’entêtement du Gouverneur à vouloir contredire ce qui a été convenu entre la France et l’Union des Comores.
Depuis le 17 mai, à chaque arrivée d’un bateau de la compagnie Maria Galante, des expulsés de Mayotte sont présents. On compte déjà près de deux cents déportés. Un nombre qui augmente de jour en jour.
Un des volets de l’opération Wuambushu consiste à renvoyer des personnes dites en situation irrégulière se trouvant sur l’île de Mayotte administrée par la France vers les Comores, et plus précisément sur l’île d’Anjouan, gouvernée par Anissi Chamsidine, censé être élu en 2019. Ce dernier a tenté, en vain, de montrer son opposition face à une telle crise sociopolitique qui risque d’anéantirait le peu d’ordre qui reste sur l’île. Mais, il n’a pas assez de pouvoir, ne serait-ce qu’un pouvoir d’influence, et aucune légitimité, même auprès de la population anjouanaise qui estime qu’il a été nommé contre son gré par un régime dictatorial qui l’étouffe. Même un simple administrateur d’une institution relevant de l’autorité centrale peut lui tenir tête, comme nous l’avons vu il y a quelques jours. Nous avons vu les arrêtés et les notes circulaires émanant du gouvernorat d’Anjouan défiler dans les réseaux sociaux, mais aucun soutien de la part des Anjouanais ne s’est manifesté. Nous avons assisté plutôt à une humiliation envers sa personne, son autorité et l’île qu’il représente de la part d’un pouvoir central qui semble faire, de jour en jour, des expériences sur Anjouan pour mesurer son degré d’autoritarisme.
Des tentatives de séduction politique
Il a voulu interdire le renvoi des sans-papiers dans l’île d’Anjouan, on lui a même interdit l’entrée au port de Mutsamudu, pour lui signifier sa marginalisation dans les décisions concernant l’île qu’il prétend gouverner. Il était censé aller prendre des nouvelles sur le retour des rotations de la société SGTM entre Mayotte et Anjouan. Il a été interdit dans les lieux et humilié. Il a voulu sauver la face, le 17 mai dernier, en faisant appel aux différents responsables de l’île (notables, maires, conseillers, société civile) lors d’une réunion à Dari Nadjah afin qu’ils se tiennent derrière lui pour dénoncer l’opération Wuambushu dont les conséquences seront ressenties par toute l’île. La réunion ne s’est pas passée comme prévu par son service protocolaire. Les Anjouanais s’attendaient à une démission de ses fonctions suite à l’humiliation subie au port et le manque de considération du pouvoir central qui donne l’impression de pousser Anjouan au séparatisme comme en 1997.
Du déjà vu !
Ce n’est pas la première fois que le gouverneur Anissi se retrouve dans une paralysie fonctionnelle, mais il n’a jamais perdu son sang-froid, disons sa dignité aux yeux des Anjouanais. Selon la direction du port, l’ordre de ne pas le laisser de pénétrer dans les lieux serait venu directement de Beit Salam.
C’est un véritable couteau dans le dos pour le représentant des Anjouanais, mais il ne se laisse pas abattre par le contexte d’un poste qui n’est pas pris au sérieux par le pouvoir central. Le gouverneur Anissi Chamsidine se veut maître de la situation et il va le montrer dans son allocution durant sa prise de parole après la réunion à Dar Nadjah. Malgré l’humiliation, il s’est montré ferme dans sa position sur l’affaire des expulsions de Mayotte et des renvois des personnes en situation irrégulière vers son île. Il condamne sévèrement la France et lui demande de trouver une autre alternative en commençant par l’abrogation du visa Balladur qui a causé beaucoup de tragédies. Pendant la réunion aux allures de conférence à Dar Nadjah, il a déclaré avoir reçu des menaces en raison de ses positions qui ne vont pas dans le même sens que Beit Salam.
Des discours politiques très controversés.
Quand le gouverneur d’Anjouan voit en la France un ennemi qui cherche à nuire à la cohésion sociale des communautés de l’archipel des Comores, le président Azali Assoumani voit la France comme l’allié de toujours et l’ami des Comores, malgré le contentieux qui lie les deux pays depuis 1975. Dans son allocution du 17 mai, le Gouverneur a demandé au président Azali, également président en exercice de l’Union Africaine, de profiter de son poste pour lancer le débat au niveau international pour trouver une solution sur la question de la présence de la France aux Comores. Une présence qui selon lui ne respecte pas le droit international. Il a fini son allocution avec ces mots : « La question de l’intégrité territoriale de notre pays doit absolument trouver des réponses tangibles et définitives, ce qui revient à poser la question de la décolonisation inachevée de l’archipel des Comores. »
Le représentant des anjouanais veut mener bataille contre l’opération Wuambushu, mais il a la mémoire courte, il semble même amnésique. Comment pourrait-il être le maître de la barque Anjouan en sachant que les gouverneurs des îles n’ont plus aucun pouvoir ? Et cela depuis la révision de la constitution en 2018. Il veut être le maître de son navire, mais il semble oublier que lui-même a contribué à faire en sorte que tous les pouvoirs soient renvoyés à Moroni, faisant de ce régime, un régime autoritaire et centriste.
Une crise politique qui persiste.
Le gouverneur a rappelé que le pays est à quelque mois des élections présidentielles et des gouverneurs. Cette crise, si elle persiste, pourrait perturber ces élections. Le gouverneur d’Anjouan n’a pas encore déclaré sa candidature, mais la rumeur dit qu’il veut se représenter pour un troisième mandat. Comme le président Azali Assoumani, le Gouverneur Anissi veut s’accrocher au pouvoir. Il était déjà gouverneur durant le régime du président Ikililou Dhoinine, il aimerait garder ce poste encore en 2024.
Il a été un ancien allié du président Ahmed Abdallah Sambi, mais il lui a tourné le dos pour soutenir Azali Assoumani, ce qui lui a permis de devenir gouverneur en 2019, après des élections contestées. Il avait mené campagne pour la réélection du président Azali, sans tenir compte de la tournante de 2020 et de l’arrestation de l’ex-président Sambi qui était aussi son allié et partenaire politique. Malgré leur relation ambiguë, il reste tout de même un allié pour le président de l’Union.
Depuis 2016, les Comoriens votent pour de Grands-Comoriens à la tête de la magistrature suprême. On dirait que la tournante ne tourne plus ou tourne d’une façon anormale, car cela semble inimaginable qu’on autorise les autres îles (Anjouan et Mohéli) de se représenter trois fois au moment où ça sera leur tour de se faire élire pour la présidence des Comores. Le gouverneur Anissi, qui a soutenu le projet de changer la Constitution pour permettre aux Grands-Comoriens de se représenter pour une troisième fois en 2024 pour la présidence, est-il l’homme de la situation ? Anjouan a subi pas mal de représailles, et le Gouverneur est lui-même souvent la cible malgré son rôle dans cette situation que connaît l’île depuis un bon moment.
Des refoulés en masse dans l’île d’Anjouan.
Depuis son commencement le 24 avril dernier, l’opération Wuambushu ne perturbe pas seulement l’île de Mayotte, mais aussi l’île d’Anjouan. Anjouan étant l’île la plus proche de Mayotte, elle est en proie à des bouleversements.
En effet la majorité des sans-papiers sont des Anjouanais. Mayotte qui avait cru que l’opération allait améliorer la sécurité de leur île est en train de subir les méfaits de cette opération d’expulsion et de démolition de banga comme c’était prévu à l’origine. Ces maisons en tôles considérées comme insalubres ne sont pas les seules maisons à avoir subi des démolitions. Il y a eu aussi des maisons en briques ayant fait les frais de cette opération alors qu’elles appartenaient à des Maorais. Ce qui rend l’opération litigieuse pour certains Maorais également. Un maorais qui était parmi ceux qui détruisaient les maisons s’est effondré et a rendu l’âme quelques jours après, lorsqu’il s’est retrouvé en face de sa propre maison. Wuambushu est devenu problématique pour certains Maorais, comme pour les autres îles de l’archipel des Comores, en particulier Anjouan, devenue le port principal des déportations des sans-papiers, malgré le refus et l’entêtement du Gouverneur à vouloir contredire ce qui a été convenu entre la France et l’Union des Comores.
Depuis le 17 mai, à chaque arrivée d’un bateau de la compagnie Maria Galante, des expulsés de Mayotte sont présents. On compte déjà près de deux cents déportés. Un nombre qui augmente de jour en jour.
Naenmati Ibrahim