Le directeur de campagne et non moins éminence grise du président-candidat Azali Assoumani s’en prend à l’Union Européenne et l’accuse de «mépris» et de «mensonges» envers les Comores. Houmed Msaidie appelle les autorités à prendre les mesures appropriées contre ce partenaire qu’il accuse également de reprendre de la main gauche ce qu’il a donné de la main droite. Par Toufé Maecha
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Après le dégel des relations avec la France, un autre front s’ouvre. Pour le moment, ce n’est qu’une guerre de salive. Le directeur de campagne d’Azali Assoumani s’en est violemment pris à l’Union Européenne lors d’une conférence de presse qu’il a tenue jeudi 14 mars au siège de son parti, le Radhi. Cette diatribe enflammée, Houmed Msaidie l’a faite en présence du conseiller politique du chef de l’État. Une présence qui conforte la thèse d’une sortie médiatique incendiaire orchestrée en concertation avec le gouvernement.
La goutte d’eau qui a fait déborder le vase est cette déclaration de l’Union Européenne en date de 8 mars dernier. Dans ce document publié en anglais dans le site eeas.europa.eu, l’Union Européenne dresse un tableau noir sur la situation politique des Comores à l’approche des élections du 24 mars.
«Beaucoup de candidats potentiels à la course à la présidence ont été exilés, emprisonnés ou ont vu leur candidature rejetée par la Cour suprême. L’UE appelle le gouvernement à examiner immédiatement les cas de tous ceux qui prétendent être détenus pour des raisons politiques et à prendre toutes les mesures nécessaires pour renforcer la crédibilité, l’inclusion et la transparence des élections, afin d’éviter une nouvelle période d’instabilité dans le pays», peut-on lire dans la version française obtenue via Google Traduction.
Un constat véridique mais qui n’est pas du goût des proches d’Azali. Son directeur de campagne en premier. «Cette déclaration montre que l’Union Européenne a une hostilité militante dans notre pays. Elle évoque des prisonniers politiques alors que si on suit de près les événements au sein de leur territoire, chaque samedi des manifestants sont envoyés en prison. Pourquoi ils les envoient en prison alors qu’ils n’ont fait que manifester?», s’interroge ce bras droit du président-candidat, faisant allusion au mouvement des Gilets Jaunes en France. Il ajoute que ceux qui sont en prison à Moroni «c’est pour avoir enfreint la loi».
Cela aurait suffit comme riposte. Mais celui qu’Azali Assoumani préfère à certain de ses conseillers a préféré aller loin, avec toutes les allures d’un combattant intrépide. Il se demande si l’origine de cette attitude de l’UE ne serait pas en corrélation avec l’indépendance dont fait preuve le régime en place, notamment en ce qui concerne les financements électoraux.
En effet, l’UE a toujours financé les élections aux Comores. Pendant le referendum du 30 juillet, le régime d’Azali a décidé de rompre avec cette politique de main tendue. Pareil pour les élections anticipées du 24 mars, le pays s’autofinance. «Au lieu qu’elle (l’UE) s’en réjouisse, elle est jalouse et grognonne. Elle n’en revient pas que les Comores puissent s’autofinancer leurs élections», poursuit-il, tout en niant, à tort bien évidement, le piétinement des droits humains aux Comores «contrairement à d’autres pays ».
« Nous condamnons de la manière la plus énergétique le comportement de mépris et de mensonge dont fait preuve l’UE vis-à-vis de notre État. Certes, ils sont des partenaires, mais franchement notre pays n’a aucune leçon à recevoir de l’UE. Nous demandons au gouvernement de prendre des mesures appropriées et de ne pas se laisser marcher dessus. S’il faut prendre des mesures contre le comportement de certains d’entre eux, qu’il en soit ainsi», devait-il demander avec énergie, prenant l’exemple de plusieurs pays d’Afrique qui se sont débarrassé des représentants de l’UE, ces «colporteurs de mensonges dans le but de semer des troubles».
Ce commis de l’État pour avoir été plusieurs fois ministre regrette que l’UE «gobe» tout ce que lui raconte l’opposition. Puis, il saute sur les appuis financiers qu’apporte régulièrement ce partenaire historique dans divers domaines. «Contrairement à la Banque Mondiale, tous les financements que l’UE nous accorde n’ont jamais atteint 10% de décaissement à cause des embrouilles qu’elle crée. Au final, ils repartent avec leur manne».
Mais est-ce vraiment de la faute des partenaires si malgré les renforcements de capacité dont bénéficie l’administration, cette dernière a du mal avec les procédures de l’UE?
Toujours est-il que ces hostilités tombent à pic avec le réchauffement de la coopération entre Moroni et Moscou, la semaine dernière. Deux amis qui, main dans la main, viennent d’affirmer partager « les mêmes valeurs » en matière de liberté, démocratie, et d’État de droit. Peut-être que Bruxelles doit-elle prendre des leçons d’État de droit chez Poutine et Azali, deux présidents qui réduisent au silence toutes les voix discordantes, politiques que médiatiques, qui osent critiquer leur manière très démocratique de gouverner. C’est sans doute payant électoralement de prétendre défier l’Europe à quelques jours des élections.
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