Après plus d’un mois et sept morts, le gouvernement comorien s’est résolu à s’occuper de ses ressortissants piégés à Dar es Salam (Tanzanie) après la fermeture soudaine des frontières comoriennes. La diaspora vient aussi en aide. Mais, des problèmes demeurent et risquent de réapparaitre après le confinement de 14 jours.
La situation était devenue insupportable pour près de 450 Comoriens, dont la plupart étaient chassés des hôtels faute de payement. Après, une vidéo montrant une dame qui décrivait le dénuement dans lequel ces ressortissants comoriens se trouvaient, Ben-Amir Saandi, l’ancien manager de l’équipe nationale de football et patron de l’équipementier Maana a décidé de faire appel à la générosité des Comoriens pour aider les Comoriens sur place en attendant que le gouvernement comorien assure ses responsabilités.
Un « pot commun » pour être solidaires
C’est ainsi que Ben-Amir Saadi a appelé tous ceux qui le pouvaient à verser un peu d’argent dans un compte « pot commun » sur internet. La solidarité légendaire des Comoriens de la diaspora s’est exprimée rapidement puisque la somme dans le pot est montée en quelques jours à 10.000€ et il est aujourd’hui à plus de 27.000 euros avec 913 participants.
Avant cette action, le prêcheur Djibrile avait appelé à la solidarité sur internet et avait pu aider une vingtaine de personnes dans la capitale tanzanienne. Mais, surtout, il avait lancé un défi au gouvernement en lui disant que s’il était incapable de faire revenir ses citoyens qu’il n’avait qu’à le dire clairement et lui il allait le faire.
Entre temps, après le lancement du « pot commun » et les nombreuses interpellations du gouvernement comorien dans les réseaux sociaux, ce dernier a annoncé après un interministériel que les Comoriens bloqués à Dar es Salam allaient être pris en charge. Il aurait pu décider de les faire revenir à Moroni (ils ont tous des billets retour) puis les mettre en « quatorzaine » dans les hôpitaux, comme il a fait pour ceux qui étaient en France, ou pour ceux qui étaient à Nairobi avec Mme Harimiya Kassim, présidente de la section électorale de la Cour Suprême. Il a préféré les placer dans des hôtels pendant 14 jours avant de les rapatrier. Seulement, le gouvernement a décidé de ne prendre en charge que les premiers qui s’étaient inscrits auprès de l’Ambassade des Comores, soit 364 personnes, dont 14 enfants.
Une gestion transparente
Dans la diaspora, en attendant le déblocage des sommes cotisées, certains ont avancé de l’argent en urgence pour prendre en charge 145 personnes sans solution sur les 202 qui ne bénéficient pas de la prise en charge de l’État.
Un bilan à mi-parcours (comptes au 5 mai 2020) montre comment l’argent de la cagnotte a été utilisé jusque-là. Sur ce document, on peut voir que sur environ 10.000€ utilisés à Dar es Salam, environ 4000€ a servi à payer les dettes cumulées dans les hôtels, environ 400€ à l’alimentation et 5000€ ont été affectés à l’hébergement des 145 personnes non prises en charge par le gouvernement. Par ce bilan, les organisateurs entendent démontrer que l’argent sera géré d’une manière transparente et que chacun a la possibilité de vérifier les comptes.
Les organisateurs ont eu la chance de tomber sur deux personnes dynamiques sur place : Faiza Mounir et le bien nommé Msahazi. Tous les deux s’occupent des règlements des dettes des Comoriens, de leur placement à l’hôtel, de leur alimentation… en utilisant à bon escient les fonds de la cagnotte.
Et après ?
Le problème qui se pose est celui de l’après-confinement, après la quatorzaine terminée, que va-t-il se passer ? Le gouvernement a promis de rapatrier les 364 qu’il a placés dans les hôtels et qu’il a pris en charge, mais il y a une méfiance qui règne parmi ces Comoriens qui ont été abandonnés pendant près de 40 jours et qui ont vu certains d’entre eux mourir. Est-ce que cette fois le gouvernement tiendra sa promesse à temps ?
L’autre problème ce sont les 145 Comoriens que le gouvernement n’a pas voulu mettre en quatorzaine et leur donner une perspective de retour dans leur pays. Ils ont été pris en charge par la solidarité de la diaspora. Mais d’une part, cela ne durera pas indéfiniment, il y a un moment où la caisse sera vide, et d’autre part, il faudrait qu’ils puissent retourner aux Comores. Il reste donc à convaincre le gouvernement de mettre ces derniers en quatorzaine dans un hôtel et les rapatrier au plus vite.
MiB