L’école du 21e siècle doit changer de logiciel pour s’ouvrir à tous les enfants sans discrimination aucune. C’est le message sorti du 5e « Café Médias ». Mais, l’UNICEF note une absence de dispositif pérenne pour la continuité de l’apprentissage en cas de fermeture des écoles (urgence, crise), ainsi qu’une déperdition importante au fur et à mesure que les enfants progressent dans la scolarité.
Par Hachim Mohamed.
Partout où l’éducation des enfants a été négligée, l’État en a subi les conséquences. Le cinquième « Café Médias » qui s’est tenu jeudi 29 septembre au bureau du Coordonnateur résident du système des Nations Unies avait pour thème « l’école du 21e siècle », question qui a fait l’objet d’un débat le 16 septembre au siège des Nations Unies à New Work.
En lisant le texte du discours prononcé par le Secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres à cette occasion, le modérateur du « Café Médias », François Batalingaya a joué une espèce de « prolongation » dans la reformulation du sujet, plus précisément pour poser la question de la transformation de l’éducation aux Comores à l’aune de ce sommet mondial sur l’école.
Les facteurs qui constituent des entraves à la « bonne école » aux Comores sont nombreux. Programmes scolaires obsolètes, corps enseignant sous-payé et déconsidéré, fracture numérique qui pénalise les plus démunis. Sans compter que 70% des enfants de 10 ans dans les pays pauvres sont incapables de lire et de comprendre un texte élémentaire et que 90% du budget de Comores est consacré aux salaires.
Nécessité d’une expérience et une connaissance multisectorielle.
En six ans, les Comores ont fait un bond qualitatif considérable au niveau de l’école. Les estimations font état d’un taux d’accès au préscolaire de 21,2% en 2015 et de 32,7% en 2021. Les taux de scolarisation sont en hausse à tous les niveaux : 82% en primaire, 52% au collège et 21,7% au lycée.
Sous ce signe d’embellie, le secteur privé en jugulant les inconvénients du public, en assurant que les enfants soient prêts pour un avenir numérique ou encore en améliorant la préparation de l’éducation au travail grâce à des partenariats publics-privés, joue un rôle clé pour accélérer et optimiser la transformation numérique à destination des enfants.
« Avec 86 % de la population d’enfants « analphabètes » , 20% du budget qui est alloué à l’éducation et 36% fléchés à l’enseignement de base » et alors que 57% des établissements disposent d’infrastructures pour l’eau, l’hygiène et l’assainissement répondant aux standards minimums, les Comores comme d’autres pays ont décidé de mettre en priorité l’éducation sur l’agenda du gouvernement pour l’année 2023 », affirme la représentante de l’Unicef aux Comores, Mariame Sylla aux Comores.
Invitée comme technicienne des Nations Unies au « Café Médias », sa collègue Béatrice Wakimunu-Lelias, cheffe du programme Éducation s’est arrêtée sur l’administration : « Sans éducation, pas de développement. À l’échelle de l’Unicef, on utilise une approche intégrée, multisectorielle, basée sur les modes de vie, qui englobe une combinaison optimale d’initiatives. Nous aidons le gouvernement comorien à élaborer des documents stratégiques, à mobiliser des ressources que nous adaptons et contextualisons pour le pays », dit-elle un brin perplexe.
Les acteurs de l’éducation au centre de la politique éducative
Dans la gymnastique de la modération du « Café Médias », François Batalingaya était revenu sous d’autres angles, d’autres formulations sur « l’école du 21e siècle » selon la vision du Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.
Il a notamment abordé ce qu’il appelle le niveau de responsabilité des acteurs, qui dans l’éducation sont perçus comme des « facilitateurs » du savoir, capables d’apprendre à apprendre plutôt que de se contenter de transmettre des connaissances toutes faites aggravant l’inégalité.
A en croire le modérateur, ce qui est arrivé au Liberia où sur une classe de plusieurs élèves qui passaient les examens, seulement 3 candidats « étaient admis et tout le reste avait échoué » était un exemple édifiant. Si le taux d’échec était élevé dans ce pays, ce n’était pas parce que les recalés n’avaient pas un bon niveau. Les autorités du pays se sont rendu compte après évaluation de l’enseignement par les experts dans le secteur que les enseignants étaient incompétents !
Pour les objectifs de l’ODD-4, un modèle socioécologique qui se traduit par la possibilité d’identifier les difficultés des enfants et un environnement qui encourage leur l’apprentissage, s’avère très important. Pour les différents intervenants, ce sont là les paramètres à l’intérieur desquels se façonne une éducation de qualité.
Les techniciens absents du débat
Pour la représentante de l’UNICEF Mariame Sylla, l’inexistence d’un ancrage institutionnel pour prendre la mesure des enjeux de l’enseignement pose problème aux Comores, alors que dans son discours le Secrétaire général de l’ONU prône « un enseignement de qualité accessible à tous, prodigué tout au long de la vie et adapté au besoin de la société et du travail du 21e siècle. »
Dans ce « Café Médias », c’est l’absence d’un technicien du ministère l’Éducation nationale au sujet de cette transformation de l’éducation aux Comores. « C’est quand même ahurissant ce qui se passe dans la mesure où de la part des autorités les stratégies et les pistes de solutions auraient passé par la prise en compte des idées, des recommandations issues de ce panel de discussions ! », s’est indignée une jeune journaliste d’un média public.
Sur la base de la perception de l’école du 21e siècle, investir dans l’éducation se doit d’être la voie à privilégier par le gouvernement pour créer les conditions d’une croissance économique vigoureuse et d’un développement social harmonieux.
Cependant, même si le pays a besoin d’investir davantage dans l’éducation, force est de reconnaitre que le coût de l’éducation d’un enfant entre 0 et 18 ans a quadruplé en trente ans… ce qui n’est pas le cas des salaires des parents.