Le bateau de riz qui était attendu à Anjouan, touchée par une pénurie sévère depuis plusieurs jours, est arrivé. Mais, comme prévu, la quantité transportée ne fut pas suffisante et cela a provoqué des affrontements entre l’armée et des habitants dans quelques localités, et particulièrement dans la ville de Mirontsy, qui jusqu’à maintenant était restée un soutien du régime en place à Anjouan.
Par MiB
Avant que toute la tension ne se porte sur la ville de Mirontsy, située entre Mutsamudu et Ouani, les vidéos dans les réseaux sociaux laissaient voir la vente de sacs de riz plus ou moins désordonnée directement par l’ONICOR et sous la surveillance des militaires. Une vidéo montre même le pillage d’un entrepôt de l’ONICOR à Ouani. La société d’État qui a le monopole de l’importation du riz ordinaire ne fait plus confiance aux commerçants soupçonnés un moment par le gouvernement de cacher les produits pour faire monter les prix.
L’impuissance du gouvernement face à l’inflation qui flambe
Cela fait plusieurs jours et nuits que des jeunes ferment ponctuellement des routes à Anjouan pour se plaindre de la situation de quasi-famine. Il n’y a certes plus de riz, mais les autres produits, y compris ceux issus de l’agriculture, voient leurs prix monter en flèche, quand on les trouve encore sur les marchés. L’inflation, mais aussi la hausse des taxes douanières par le gouvernement il y a un an ont eu des effets ravageurs à Anjouan. La population attend toujours le plan des ministres concernés qui rétablira les conditions d’un retour au stockage normal des produits alimentaires.
Postés sur la route, les jeunes de Mirontsy ont l’habitude de voir les camions transportant les sacs de riz loin de leur ville. Avec l’arrivée du bateau de riz, le ballet des camions avait recommencé, quand les jeunes excédés ont décidé de barrer la route et de prendre d’assaut les camions.
Mirontsy assiégée et sous couvre-feu
L’Armée nationale de Développement (AND) est rapidement intervenue et a engagé l’affrontement avec les jeunes de la ville. D’un côté des jets de pierres et de l’autre des bombes lacrymogènes et des tirs en l’air.
Après plusieurs heures d’échauffourées dans la ville, Mirontsy a eu presque gain de cause. Trois camions remplis de sacs de riz ont été envoyés dans la localité. Bien sécurisée par l’AND, la distribution a démarré dans l’après-midi. Un sac de 25 kilos pour deux personnes, mais il n’y en a pas eu pour tout le monde. Les hostilités ont donc été relancées. Les camions ont été obligés de se déplacer vers le centre médical urbain de Mutsamudu. La population a encore une fois barricadé la route et a recommencé les jets de pierre et l’armée a repris les gaz lacrymogènes, jusqu’à l’intérieur des maisons.
Des témoignages qui nous parviennent, nous apprenons que de nombreuses personnes ont été « gazées » et un premier bilan fait état de plusieurs blessés, notamment par des projectiles tirés par les militaires.
Un couvre-feu permanent avait été instauré, interdisant aux habitants de Mirontsy de sortir de leurs maisons depuis jeudi. Une décision qui montre comment l’armée et le gouvernement ont peur de la ville ou d’émeutes de la faim, comme c’est arrivé dans d’autres pays du tiers-monde. Ce couvre-feu a été peu respecté. Il a donc été allégé vendredi et fixé à partir de 23 heures, avec plusieurs camions de gendarmes et militaires postés à l’entrée et à l’intérieur de la ville.
Le calme étant revenu dans la ville durant le week-end, l’armée semble avoir quitté Mirontsy. La population demandait la libération des personnes arrêtées, cela n’a pas été fait. Mais, il est possible que des négociations soient en cours. Mirontsy est en effet une des villes qui soutient le plus Azali à Anjouan et elle est celle qui a plus bénéficié des faveurs du régime actuel, en termes d’emploi.
La crise du riz et la quasi-famine qui règne dans tout le pays ne sont pas encore terminées. L’ONICOR semble même se diriger vers la faillite si l’État ne procède pas à une nouvelle perfusion.