Annoncée il y a quelques jours, la cargaison de riz « pour dépannage » est arrivé à Ndzuani le 7 septembre dernier. Il s’agit de 750 à 800 tonnes, une quantité cependant fortement insuffisante, au regard de la longue période d’absence de cette denrée de première nécessité sur l’île.
Par Nezif-Hadji Ibrahim
Les sacs de riz arrivés à Anjouan la semaine dernière constituent un stock insuffisant. Le gouvernement a choisi la commercialisation du riz par région et par ville en vrac et cela tourne mal. Une femme originaire de Barakani aurait perdu la vie et on compte de nombreux blessés.
Des rations de 3,5 kilos en moyenne selon les localités, Mutsamudu prend la part du lion
Dans les villes et villages, le riz se vend en petite quantité. À Tsembehou, un sac de 25 kilos se partageait entre cinq ménages alors qu’à Mremani et à Ongojou le partage se faisant entre huit personnes. La ville de Moya, quant à elle, a reçu 120 sacs pour une distribution de cinq kilos par famille. En moyenne, chaque ménage aurait reçu 3,5 kilos de riz après presque deux mois de pénuries.
Par ailleurs, à Mutsamudu, un sac de 25 kilos était destiné à deux personnes. Un choix du gouvernement qui interroge, compte tenu du fait que la famine pour cause de pénurie touche toute l’île de Ndzuani. Si en milieu rural l’agriculture est un soutien indispensable, à cause de la longévité de la privation de ce produit de première nécessité, on a presque épuisé les champs. Depuis quelques jours, les produits agricoles sont de moins en moins accessibles d’autant plus que notre agriculture est saisonnière.
À côté de Mutsamudu, vers Mpage, 120 sacs ont été envoyés pour cinq localités de la région.
En raison du stock limité du riz qui est arrivé à Ndzuani, certains ont eu peur de ne pas en avoir ou de ne pas s’en procurer suffisamment, alors ils ont préféré piller les magasins. Ce fut le cas à Ouani et à Domoni également.
Côté prix le gouvernement a décidé de le revoir à la hausse. Tandis que le prix annoncé il y a deux mois était de 9400 FC, avec cette nouvelle cargaison l’Onicor a vendu à 10000 FC le sac de 25 kilos, voire même à 12000 FC.
De longues attentes sans avoir le riz
En attente de la cargaison de riz, de longues attentes ont été observées dans certaines localités jusqu’à tard le soir. À Ongojou, des parents, notamment des mères, ont attendu jusqu’à 23 heures pour espérer se procurer quelques kilos de riz. Finalement ce n’est que le lendemain que la distribution est effectuée. À Ouani beaucoup se sont plaints de ne pas avoir eu le riz, à la place c’est du gaz lacrymogène qu’on les aspergeait, alors que le seul camion qui était destiné à cette ville n’avait pas terminé son contenu. Les habitants ont passé presque toute la journée en attente de la délivrance. Pareil pour Barakani où les forces de l’ordre sont parties sans avoir distribué tout le stock.
À Tsembehou, la situation était brûlante comme dans la plupart des autres villes. Des bagarres ont lieu et un homme est blessé grièvement à l’œil. Entre-temps des membres des forces de l’ordre se sont servis à hauteur de 15 sacs, selon des témoins, sur les quelques sacs que la ville avait pu bénéficier.
Beaucoup de citoyens ont regretté que ce soit des militaires qui ont été chargés de la commercialisation de ce riz de dépannage sachant que nos forces de l’ordre ne sont pas réputées faire preuve de patience.
Le mécontentement s’intensifie, un début d’un délabrement de la paix sociale ?
La situation à Ndzuani devient préoccupante. La crise n’est pas du tout résorbée avec cette cargaison de dépannage qui est arrivée sur l’île. Le rationnement semble, au contraire, se muer en élément catalyseur d’une nouvelle atmosphère sociale. Alors que sur les réseaux sociaux des jeunes souhaitent ouvertement la mort d’Azali dans des villes de Ndzuani, on a barricadé des routes et des affrontements ont eu lieu. À Mirontsi par exemple, dans la nuit 8 septembre, des heurts ont opposé des habitants et les forces de l’ordre. Des jeunes de cette ville demandent la libération de trois des leurs arrêtés suite aux échauffourées de mercredi. Des accrochages ont aussi été notés à Moimoi, à Ouani, à Mutsamudu et à Bandrani.