Le collectif Art 2 la plume a repris sa mythique scène libre de Slam-Poésie. Il s’est produit à l’American Corner de Moroni, mercredi 26 juillet. Pour le grand bonheur de ses fans.
Par Abdouroihmane Ibrahim
Cela fait presque onze ans que le collectif Art 2 la plume a vu le jour. Créé en 2012 par une bande d’amis (Azhar Ahmed, Antoyi Soulé, Abdounour Hamza et Ansoi-Art Ahmed), ce collectif a commencé par le slam avant de se retrouver dans le théâtre. Tout juste après sa création, la famille s’est agrandie avec l’arrivée d’Intissam, puis par d’autres à l’instar de Tchatcha Men qui était pendant de longues années, l’un des principaux collaborateurs de Maleesh. Certains d’entre eux jouent même hors Collectif et collaborent avec d’autres artistes. Ils font aussi de la médiation culturelle et ont plusieurs partenaires institutionnels tels que l’American Corner, l’Alliance française de Moroni, mais aussi certaines écoles françaises de Madagascar avec lesquelles ils ont collaboré pour organiser des ateliers d’écriture et des résidences de création en milieu scolaire. Bien que le groupe soit né aux Comores, il fut très actif à Madagascar où trois de ses membres fondateurs faisaient leurs études supérieures. Ils ont sillonné la grande Île de 2018 à 2021.
Un parcours exceptionnel
Art 2 la plume s’est produit dans quasiment toutes les scènes culturelles de Moroni ; que ce soit l’Alliance française, le Ccac Mavuna voire l’université des Comores. Il a aussi fait les grandes scènes de Madagascar, l’Institut français de Madagascar (IFM), l’Is ‘Art Galerie qui est une scène incontournable pour le paysage artistique de Madagascar ; le Cercle Germano-Malagasy (CGM), l’Université de Tananarive et il a eu une tournée dans les Alliances françaises de Madagascar de novembre 2018 au mois de septembre 2019 avec leur spectacle « Mots et maux du Tiers-Monde ». Une tournée commencée à l’Alliance française de Tananarive, puis Antsirabe, Ambositra, Fianarantsoa et Majunga. Ils ont aussi fait le Dago Festival à Tana, le festival Elekelantrano à Tananarive
«D’ailleurs, la directrice de ce festival voudrait l’étendre jusqu’à Moroni parce que nous nous sommes rendu compte combien les cultures malgache et comorienne sont si proches», ajoute Antoyi soulé.
Le « Slam’wezikal»,
Apres « Kwassa-Kwassa pour le paradis, Kwassa-Kwassa pour fuir l’enfer », une fusion de slam et de théâtre écrite par Mbae Tahamida Soly, les membres d’Art 2 la plume ont créé aujourd’hui le « Slam’wezikal », un spectacle de slam musical. Cela fait près de 11 ans qu’ils font du slam, aujourd’hui, ils ont voulu faire un spectacle nourri de toutes leurs influences musicales pour faire bouger les gens. Le Slam’wezikal, un jeu de mots en hommage à la lune, la musique, le slam et un clin d’œil aux slameurs de la lune qui sont les pionniers de ce genre musical aux Comores et au collectif POMWEZI. « Des gens que nous aimons beaucoup », explique Antoyi Soulé.
Aujourd’hui, les membres fondateurs du collectif sont aux Comores, un en France et un autre à Madagascar. Ils font toujours du slam, ils écrivent, interprètent, mettent en scène et écrivent aussi pour d’autres artistes. Le collectif n’a jamais cessé de s’agrandir. Il accueille régulièrement d’autres membres sans jamais perdre la base. « On a toujours été une grande famille. Certes, avec le temps, ça change un peu la mentalité. Il y en a qui veulent faire autre chose, d’autres qui sont professionnels et il y’en a qui sont en voie de professionnalisation, mais voilà ! on ne va pas être là toute l’éternité. Il faut qu’on prépare la relève, donc le recrutement, ouais. », poursuit Antoyi Soule.
Le retour à l’American Corner
Revenir à l’American Corner ce 26 juillet pour Art 2 la plume, c’est comme un retour à la maison. Le plaisir est là d’autant plus que 95% de slameurs présents étaient nouveaux. Et le collectif était content d’avoir vu de nouvelles têtes. Soulé Antoyi martèle : «On est les premiers à installer la culture de la scène libre ici. Et c’est ici que ça a commencé ; ça fait plaisir de savoir qu’il y a des gens qui s’y intéressent toujours. De voir l’évolution des jeunes qui veulent monter sur scène. Qui viennent et qui ramènent des textes très intéressants».
Aujourd’hui, la scène libre est faite différemment. Car le collectif invite d’autres gens avec qui partager la scène. Cette fois, on avait comme invité, Bilal qui est un des slameurs qui ont commencé les scènes libres à l’American Corner. Cependant, il y a eu des intempéries et ce dernier n’a pas pu se présenter. Il n’était pas le seul, des membres d’Art 2 la plume n’ont pas pu se présenter eux non plus. « On aurait aimé qu’il soit là, mais en même temps on comprend, ce n’est pas la fin du monde. Il y a eu une scène qu’on a fait à la place de l’indépendance, on l’avait invité, il était là. Aujourd’hui il n’a pas pu être présent, c’est la vie. Ça arrive », affirme Antoyi Soulé.
Mahmoud Bachir, membres d’Art 2 la plume, a fait ses premiers pas sur les scènes libres organisées par le collectif à l’American Corner. Il est catégorique : « Ce retour de scène libre se veut différent des autres versions de scènes libres faites avant par le fait qu’aujourd’hui on compte avoir un invité spécial à chacune de nos prochaines scènes libres. Qu’il soit slameur ou chanteur».
Un public de slameurs, une ambiance vraiment de scène libre.
C’était entre amoureux des mots. Entre slamoureux et slamoureuses. Il y a des années, les scènes libres étaient considérées comme des spectacles. Il y avait de grands publics. Aujourd’hui, ils essaient d’alléger cela. Faire comprendre aux gens que la scène libre c’est juste des prestations pour faire vivre le slam pour que d’autres l’essaient aussi. Qu’il ait un grand public ou pas, l’intérêt c’est de voir des gens venir s’exprimer dans la mesure où s’exprimer en public n’est pas facile. Et ce soir-là, il y avait un public de jeunes. Ce qui changeait le décor.
« Ce soir c’était bien. C’était parfait, même s’il y avait un peu le stress, mais c’est normal en tant qu’artiste. Mais, comme spectateur, je dirais que le public n’était pas mal. Il n’y avait pas de bruit, c’était calme et c’était cool. Et pour moi la scène libre, c’est un endroit que l’on vient pour s’exprimer pour qu’à la fin, quand on est dans un public, on ne va pas avoir la pression. On ne va pas s’étouffer, on va se libérer, on va s’habituer, comment parler en public. En gros ça évacue le stress. », affirme Abdoulhakim Djamal, jeune slameur d’Istandra.
Cela ne s’arrête pas là. Dans la mesure où, le collectif vient de renouveler le contrat de partenariat avec l’American Corner, il a promis de revenir. Toutefois, le changement s’impose. Il n’y aura pas que du slam. Le mois prochain, ils inviteront des amis chanteurs et même des artistes venant d’autres domaines. La médiation culturelle sera aussi présente. Ils ont baigné un peu dans cela. L’objectif reste de faire vivre l’art tout simplement. Et même si les autres n’ont rien fait pour eux, ils vont essayer de faire quelque chose pour les autres afin que la culture triomphe.
« En 2014/2015, à l’American Corner, on avait créé une forme de scène libre que nous avions nommée « Nyora ziheyao » servant à dénicher de nouveaux talents dans l’ombre. Le but était de leur donner de la visibilité. Aujourd’hui, si on invite ces gens, c’est pour leur donner de la force. », affirme le président du collectif, Ansoir Mohamed.