Constitue une agression sexuelle, toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise (article 317 de la loi n° 07-014/AU du 30 août 2007, remplaçant et modifiant certaines dispositions du Code pénal). En effet, l’agression sexuelle est une atteinte sexuelle commise sans le consentement clair et explicite de la victime. Dès lors que la personne n’était pas consentante lors d’une approche sexuelle, contact physique inapproprié par exemple, on parle d’une agression sexuelle. [ihc-hide-content ihc_mb_type=”show” ihc_mb_who=”2,3,4,5,6,9″ ihc_mb_template=”1″ ]
À souligner à cet effet qu’on parle d’une agression en partant du fait qu’il n’y a pas eu pénétration sinon on serait dans le cas de viol. L’agression sexuelle est beaucoup plus courante, car elle peut être opérée même dans les espaces publics dans la foule ou les transports en commun. Dans une situation d’agression sexuelle, la victime peut catégoriquement refuser les avances de l’agresseur ; elle peut même essayer de se défendre si le fait est violent. Mais elle peut aussi ne rien entreprendre pour refuser ou pour se défendre si elle est en position de faiblesse psychologique. C’est souvent le cas pour une salariée face son à son employeur. Par peur de perdre son travail, elle peut faire le choix de céder. Mais il peut aussi s’agir d’une circonstance où la victime n’était tout simplement pas détentrice de toutes ses facultés mentales ; sous l’influence de la drogue ou affaiblie par la maladie. Dans tous les cas, il y a agression sexuelle du moment où la victime n’a pas clairement donné son consentement.
Des sanctions
La loi n’est pas du tout tendre envers les personnes coupables d’agression sexuelle. Une sanction pénale sévère leur est réservée. Les agressions sexuelles autres que le viol ainsi que la tentative sont punies de cinq ans d’emprisonnement et de 1 500 000FC d’amende (article 319). On voit donc que la tentative est considérée de la même façon que l’acte lui-même. On a vu dans l’article précédent sur l’infraction pénale que la tentative de crime interrompue par une circonstance extérieure à la volonté de l’auteur est punie comme le crime lui-même.
Le cas d’une personne vulnérable
Pour une question de bon sens, il y a une différenciation dans la sanction selon la personne victime de l’agression. Lorsqu’il s’agit d’un mineur de moins de dix-huit ans ou d’une personne dont la particulière vulnérabilité due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychologique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de l’auteur, la sanction est de sept ans d’emprisonnement et d’une amende de 1 000 000FC (article 319). Des explications méritent d’être avancées sur ce cas. L’article 319 a ouvert une petite brèche aux avocats avisés : « si la vulnérabilité est apparente ou connue de l’auteure ». L’avocat de la défense peut plaider l’erreur de fait. Il peut ainsi dire que son client ne savait pas que la victime était mineure vu son développement corporel par exemple. Au ministère public de démontrer le contraire.
L’agression aggravée
Lorsqu’il y a des circonstances aggravantes, la sanction est accessoirement lourde. Cela va de soi. Quatre cas sont possibles. Lorsque l’agression a entrainé une blessure ou lésion ; lorsqu’elle est commise par un ascendant ou par toute personne ayant autorité sur la victime ; lorsqu’elle est commise par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions ; lorsqu’elle est commise par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice (agression en réunion) ; lorsqu’elle est commise avec usage ou menace d’une arme. Dans les cas ci-dessus cités, la sanction est de dix ans d’emprisonnement et de 2 500 000FC d’amende (article 319).
De la prévention des agressions faites aux femmes
La loi N°14-036/AU du décembre 2014, portant prévention et répression des violences faites aux femmes en Union des Comores est venue renforcer la loi de 2007 sur les mesures de prévention des violences dont les femmes sont victimes. Elle entend lutter contre toute forme de violence à l’égard des femmes et des filles en Union des Comores ; à travers ses volets pénaux, civils, et sociaux. Elle vise à donner une réponse pluridisciplinaire aux violences faites aux femmes et aux filles (article premier de la loi de 2014). Pour ce faire, des mesures ont été théoriquement préconisées.
Du domaine scolaire
Nul n’ignore que dans les écoles, les enfants ne sont pas tout à fait à l’abri des violences que les adultes qui y travaillent peuvent perpétrer. Et c’est malheureusement ainsi partout dans le monde. La loi de 2014 dispose dans son article 6 que le ministère de l’Éducation nationale, en collaboration avec le ministère de la famille et le ministère de la Justice adoptent les mesures nécessaires pour que dans les programmes de formation initiale du corps professoral soit incluse obligatoirement et soumise à évaluation une politique de formation spécifique en matière de lutte contre les violences à l’encontre des femmes. Est-ce suffisant ? Peut-être bien si la pratique allait vraiment dans ce sens. Amener l’enfant à prendre connaissance du phénomène dès le plus jeune âge est a priori salutaire. Sauf que les actes ne suivent pas.
De la prise en charge des victimes
Les agressions sexuelles sont pour la plupart tues pour diverses raisons développées plus haut. Il peut s’agir d’un ascendant ou d’une personne ayant une forte autorité sur la victime, ce qui fait que cette dernière n’ose pas parler de ce qui lui est arrivé. C’est justement pour cela que la loi oblige l’État à promouvoir les institutions judiciaires et parajudiciaires pour une prise en charge des cas des violences à l’encontre des femmes (article 14 de la loi de 2014). La loi prévoit même des programmes de réhabilitation des femmes victimes de violences que ce soit à la maison ou sur le lieu du travail.
De la réalité
Concrètement toutes ces mesures restent dans la tête du législateur. Les femmes victimes de violences ou d’agression sexuelles sont souvent livrées elles-mêmes. Les mesures judiciaires aboutissent le plus souvent si un organisme tel que ASCOBEF prend en son sein le dossier. Dans les autres cas, c’est l’impasse.
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Mounawar Ibrahim, juriste