L’émissaire de l’Union Africaine est reparti à Addis-Abeba avec le refus de l’opposition comorienne à participer à un « Dialogue National » organisé par Azali Assoumani. Cette défiance montre qu’un dialogue pour rétablir la stabilité politique aux Comores n’est pas encore possible. Tout simplement parce qu’Azali Assoumani veut absolument continuer à dicter à l’opposition la marche à suivre alors que pour celle-ci la légitimité de ce dernier en tant que président des Comores a pris fin le 26 mai 2021, après 5 ans de présidence marquée par la terreur, le mépris, les tortures, les menaces de mort, les assassinats, les emprisonnements arbitraires et les restrictions de toutes les libertés individuelles et collectives. Par Abdourahim Bacari
Encore une fois, l’Union Africaine se montre partisane du régime d’Azali au lieu de rester neutre pour tenter de trouver une solution véritable de sortie de crise pour les Comores. Pourtant, elle a en sa possession les rapports rédigés par les observateurs qu’elle a envoyés aux Comores entre 2018 et 2019 pour couvrir le référendum pour le changement de la Constitution et les présidentielles. Mais, au lieu de sanctionner les modifications de constitution en vue de prolonger son mandat, l’Union Africaine a préféré donner le poste de deuxième vice-président de la conférence des chefs d’État à Azali, renforçant l’idée véhiculée par les détracteurs qui affirment que l’institution n’est qu’« un syndicat de dictateurs africains ».
Cette fois-ci, quand l’opposition a compris le piège qu’Azali et l’Union Africaine lui tendaient à travers un « Dialogue National », elle a marqué son refus d’y participer. L’objectif de la visite de l’émissaire a donc échoué.
Il y a depuis 2018 aux Comores un sérieux problème, celui d’une haute juridiction neutre. Les hauts dirigeants de l’Union Africaine le savent, car ils connaissent mieux l’évolution de la situation politique des Comores depuis 2008 après le débarquement militaire à Anjouan pour déloger Mohamed Bakar. Ils savent également qu’un pays sans une haute juridiction au-dessus du pouvoir politique, capable de réguler les contentieux sans pencher vers le seul qui en a désigné les membres s’expose à de graves crises et conflits. Depuis la suppression de la Cour constitutionnelle et la mise en place d’une section politique de la Cour Suprême dont tous les membres sont nommés par Azali, aucune élection n’est crédible. À cet égard, l’opposition a rappelé à l’Union Africaine, plus précisément au Conseil de la paix et de la sécurité (CPS) qu’un « Dialogue National » pour une sortie de crise peut être envisagé que si Azali accepte de quitter le pouvoir immédiatement puisque son mandat est fini en mai 2021 et que les prisonniers politiques retrouvent la liberté.
De la même façon, l’Union africaine doit prendre de la hauteur si elle désire vraiment aider le peuple comorien, et non promouvoir encore une fois des élections présidentielles dont le gagnant est connu d’avance.
La paix est précieuse. Elle manque dans beaucoup de pays africains dont la majorité est soumise à des lois injustes imposées par un homme. Il est donc temps pour les dirigeants de l’Union africaine de se ranger au côté des peuples africains au lieu de continuer de soutenir tous ceux qui manipulent les textes pour pouvoir demeurer au pouvoir. Les représentants de l’Union africaine aux Comores voient ce qui se passent, ce que les opposants subissent au quotidien. Ils peuvent témoigner s’ils sont vraiment là pour le bien de ce pays. Sauf s’ils sont atteints d’une maladie de la vue. La collaboration entre l’Union Africaine et le régime d’Azali pour contraindre l’opposition et la société civile comorienne à accepter un faux Dialogue n’a pas marché.
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