La liberté d’informer a un souci quand on est face à un régime de parti unique, qui contrôle presque tous les rouages de la société et de l’État. La presse écrite, la télévision et les radios sont toutes contrôlées par les autorités. Par Hachim Mohamed
En allant à la recherche d’informations, les journalistes se sentent harcelés et surveillés en permanence. L’appareil d’État veut contrôler, endiguer et manipuler l’information afin de masquer ses échecs.
Pour comprendre et expliquer à nos lecteurs la politique gouvernementale en matière de vaccination, nous nous sommes rapprochés du Directeur général de la Santé (DGS) de Ngazidja, Dr Anli Aboubacar dans son bureau, le 18 juillet. Grande fut notre surprise quand s’amorça l’entretien.
« Je suis membre de la coordination nationale de lutte contre la covid-19. Malheureusement, je ne peux pas répondre à vos questions, car il faut auparavant une autorisation de la part du Secrétaire Général du Gouvernement pour en avoir le droit. Désolé, allez chercher le sésame… », a-t-il fait savoir.
Qu’est-ce qu’un DGS qui n’a pas le droit de s’exprimer sur sa mission et ses compétences dans la coordination nationale de lutte contre la covid19 ?
Imposer l’information qui circule sur la covid-19
Dans ce pays, beaucoup d’hommes politiques ont pris l’habitude de traiter avec une certaine presse qui se contente de relayer leurs messages, de leur faire de la communication. Cela équivaut à une véritable désinformation et rompt la confiance que les citoyens peuvent avoir à l’égard des journalistes.
Qu’on ne se trompe pas : lorsque le Dr Saïd Anli Aboubacar dit à un journaliste d’aller demander une autorisation au Secrétaire Général du Gouvernement (SGG) avant de pouvoir l’interviewer, il s’agit bien ici d’une volonté de museler la liberté d’informer de la part du gouvernement. La pression mise sur le DGS de ne pas accorder une interview à un journaliste sans l’accord du SGG a pour objectif de choisir les journalistes qui vont répéter le discours gouvernemental et qui ne poseront pas les questions qui fâchent.
Mais, comment le DGS peut-il accepter ce rôle peu reluisant que lui fait jouer le Secrétaire Général du Gouvernement et le dire ouvertement à un média ? La sagesse ne commande-t-elle pas de ne jamais obéir à un mauvais ordre, quelle que soit l’autorité qui le formule ? En l’occurrence quand cet ordre aboutit à une dégradation de la perception de votre personnalité par le public ?
Cette attitude du DGS montre que les autorités veillent à ce qu’aucune information embarrassante ne soit diffusée, mais du coup, on en vient à se demander ce qu’elles peuvent bien cacher sur les vaccins et sur la Santé en particulier.
Par conséquent, la stratégie du gouvernement consistant à contrôler l’information et faire avaler n’importe quoi aux citoyens risque de se retourner contre les efforts accomplis en matière de lutte contre la covid-19. Cela pour dire que les fonctionnaires qui acceptent de se taire par respect de l’autorité (et le SGG n’est pas l’autorité directe du DGS) ne font pas avancer les objectifs du gouvernement en rendant le citoyen méfiant.
Informer sur les questions essentielles d’intérêt public.
Dans un contexte où l’essentiel des pouvoirs constitutionnels est entre les mêmes mains ou le contrôle de la légalité des décisions n’est pas évident, les hauts fonctionnaires doivent pouvoir s’exprimer librement et rendre compte de leur travail sans subir un contrôle permanent du Secrétaire Général du Gouvernement. Encore plus quand des doutes apparaissent au sein de la population, partout dans le monde, sur les politiques publiques en ce qui concerne la lutte contre la covid-19.
La démocratie a besoin d’une presse qui a le droit et la capacité d’informer sur les questions essentielles d’intérêt public comme celles liées à la covid19, sans en référer au gouvernement qui, lui, a des objectifs de communication et veut montrer que tout va bien et qu’il applique la meilleure politique possible dans ce domaine.