Le bateau Acadie est revenu au port de Mutsamudu ce dimanche sans avoir pu accoster à Majunga suite au refus des autorités malgaches. Celles-ci justifient leur décision par une recrudescence du choléra aux Comores, alors que sur place les autorités sanitaires et politiques restent silencieuses.
Par Naenmati Ibrahim
Le mercredi 16 octobre, le bateau Acadie a quitté l’île d’Anjouan pour Madagascar, sans avoir pris connaissance du communiqué rendu public le matin même par l’État malgache fermant les frontières maritimes avec les Comores. Le bateau est arrivé jeudi 17 octobre au large de Majunga, mais il n’a pas pu accoster. L’équipage et les passagers se sont retrouvés dans une impasse, obligés de rester dans le bateau en attendant que l’État malgache et l’État comorien décident de leur sort.
La fermeture des frontières maritimes
Les autorités malgaches ont justifié cette décision dans un communiqué publié à l’issue du Conseil des ministres du 16 octobre. Le gouvernement malgache explique ainsi que « L’épidémie du choléra est toujours d’actualité en Afrique de l’Est et dans les pays du Corne de l’Afrique. Elle commence à resurgir aux Comores ». Pourtant ni les autorités sanitaires aux Comores ni l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) n’ont annoncé un départ de choléra. Et sur place aux Comores, certains disent qu’il y a eu quelques cas, ces derniers temps.
Les autorités malgaches ont donc décidé la fermeture des frontières maritimes après avoir fermé les frontières aériennes il y a quelque temps.
Le bateau Acadie, qui transportait de nombreux passagers parmi lesquels des étudiants, des commerçants, des ressortissants malgaches, des personnes malades qui se rendaient à Madagascar pour se soigner ou des femmes enceintes qui y allaient pour accoucher ont été bloqués en mer pendant trois jours. L’inquiétude était à son comble à bord, car aucun message n’est venu des responsables du bateau, qui étaient à terre, pour les rassurer.
Dans un entretien avec le média en ligne Ouani-live, un membre de l’équipage du bateau a montré que l’agence Acadie n’était pas au courant de la fermeture des frontières par Madagascar. D’après lui, ils ont quitté Anjouan le mercredi à midi et c’est à partir de 10 heures le lendemain qu’ils ont vu dans les réseaux sociaux que Madagascar avait fermé les frontières avec l’Union des Comores et les pays de l’Afrique de l’est. À leur arrivée au large de Majunga à 12 heures, ils sont restés au large dans l’espoir qu’au retour du personnel du port à 14 heures, ils pourraient accoster. Mais, ils n’ont pas eu l’autorisation.
Le vendredi 18 octobre, le bateau était toujours au large de Majunga. L’équipage et les passagers attendaient toujours une réponse favorable de la part des autorités malgaches.
Une situation inquiétante pour les passagers et l’équipage
Pour l’équipage, les responsables du bateau qui sont à Majunga cherchaient des solutions pour les faire accoster. Fatigués par le voyage qui devait normalement durer deux jours, les passagers semblaient être perdus et ne savaient plus que penser.
Un tel voyage en bateau est très éprouvant et certains ont le mal de mer. Ces personnes qui ne peuvent trouver le repos que lorsqu’ils sont sur terre ferme étaient les plus inquiets.
Les autorités comoriennes n’ont pas réagi pendant ces trois jours. Toutefois, les citoyens comoriens, en particulier les Anjouanais qui étaient les plus concernés, puisque le bateau venait d’Anjouan, attendaient que les autorités comoriennes négocient et trouvent une solution favorable pour soulager les familles à bord et sur terre.
Pour l’État malgache, toute la responsabilité de cette affaire revient au ministère chargé des Transports comorien, puisque c’est lui qui n’a pas pu empêcher le bateau de quitter Anjouan en informant de la note émise par le gouvernement malgache depuis le 15 octobre. L’État malgache a proposé deux options, soit l’Acadie reste en quarantaine pendant 20 jours avant d’accoster à Majunga, soit il ne fait descendre que les malades et les autres passagers retournent aux Comores. Autrement, le bateau devait retourner aux Comores et son propriétaire rembourser les billets des passagers, ce qui pourrait mener l’agence Acadie à une perte financière.
Dans la journée du samedi 19 à 12 heures de Madagascar, le pointeur de l’Acadie a déclaré que le bateau se préparait à retourner à Anjouan, mais que l’équipage attendait que la marrée monte. Il a aussi évoqué une désinformation qui circule à Madagascar. Les autorités malgaches insinuaient qu’il y avait des cas de choléra dans le bateau. Ce qu’il dément catégoriquement en demandant à voix haute aux passagers s’il y avait des personnes qui avaient le choléra dans le bateau. Les passagers ont répondu négativement. Et l’un d’eux, un ressortissant malgache, a montré sa carte de vaccination et son passeport malgache.
Pour le pointeur l’Acadie a respecté toutes les normes avant de quitter le port d’Anjouan et tous les passagers ont leur carte de vaccination du choléra. Il a aussi démontré qu’au port de Mutsamudu, il y a un vrai contrôle en ce qui concerne l’épidémie du choléra. Il a demandé aux autorités malgaches qui envisagent d’envoyer un médecin à bord de leur bateau de les laisser tranquilles parce qu’ils ont compris que les Malgaches ne veulent pas d’eux dans leur pays.
Il a ajouté que s’il y avait vraiment le choléra dans l’Acadie, la maladie serait déjà à Majunga puisqu’au deuxième jour il y a des Malgaches qui sont venus visiter le bateau. Donc s’il y avait vraiment le choléra, ils les auraient déjà mis en quarantaine.
Une fois ravitaillé en carburant, eau et nourriture, le bateau Acadie est reparti vers Anjouan et il est arrivé au port de Mutsamudu, le dimanche 20 octobre dans l’après-midi.
Ce dimanche, le gouvernement comorien n’a toujours pas réagi ni pour confirmer la présence du choléra aux Comores ni pour dénoncer la fermeture des frontières maritimes avec Madagascar.