À moins d’un mois de sa prise de fonction en tant que président de la Conférence des Chefs d’État de l’Union africaine, le chef de l’État comorien, Azali Assoumani a été reçu par le président Macron à l’Élysée, avant de s’envoler pour le Sénégal où il a rencontré Macky Sall, l’actuel président de l’Union africaine. Azali Assoumani a commencé à se préparer.
Par Mib
Selon un bilan qui circule dans les réseaux sociaux, Azali Assoumani aurait effectué 26 voyages (soit deux par mois en moyenne) et parcouru plus de 185.000 kilomètres (soit 4,5 fois le tour de la terre) en 2022. Avec un point d’orgue en septembre, puisque dans le même mois, il a visité quatre pays avec des délégations à chaque fois.
L’année 2023 commence au même rythme et les voyages vont sans aucun doute s’amplifier avec la présidence de l’Union africaine. L’inflation qui sévit actuellement au pays fait entrer beaucoup d’argent dans les caisses de l’État à travers les diverses taxes. Et traditionnellement, la présidence pioche à la douane et dans les sociétés d’État pour ses dépenses sans tenir compte du budget voté à l’Assemblée. Le gouvernement dispose ainsi d’une manne inespérée pour effectuer les voyages qui s’annoncent nombreux dans le cadre de la présidence de l’Union africaine.
La présidence de l’Union au menu des discussions
Dès le 11 janvier, Azali Assoumani était reçu par le président Macron à l’Élysée, puis le 12 par le président Macky Sall au Sénégal. Dans les deux voyages, il était accompagné d’une forte délégation composée entre autres des ministres des Affaires étrangères, Dhoifir Dhoulkamal, de celui de l’Agriculture et porte-parole du gouvernement, Houmed Msaidié, de celui de l’Intérieur, Fakriddine Mradabi et même du Coordonnateur de la Communication à Beit-Salam, Ahmed Ali Amir.
La poursuite de son voyage vers le Sénégal nous laisse comprendre que dans les deux voyages la présidence de l’Union africaine dès le mois prochain était au centre des discussions dans ces rencontres dites de travail.
Il est probable qu’Azali Assoumani, qui entretient de bonnes relations depuis 2019 avec le président français, Emmanuel Macron, est venu demander un appui technique, en sachant que la France et l’Union européenne contribuent fortement au fonctionnement de l’Union africaine. La France dont l’influence est actuellement en recul dans plusieurs pays africains face à la Chine, à la Russie et dans une moindre mesure, aux États-Unis, espère qu’avec la présidence comorienne de l’Union africaine, elle regagne certains terrains diplomatiques, surtout contre la Russie.
La guerre Russie-Ukraine au centre
La question de la guerre Russie-Ukraine ne trouvant aucune solution au sein du Conseil de sécurité de l’ONU devrait arriver bientôt à l’Assemblée générale et la France travaille pour que le nombre d’abstentionnistes en Afrique soit réduit. Le soutien du président Macron à Azali a d’ailleurs fait retourner la position comorienne sur la question de la guerre en Ukraine, curieusement après l’installation de l’ancien Secrétaire général de la COI Hamada Madi Boléro à Beit-Salam comme conseiller diplomatique d’Azali Assoumani, après quelques mois passés à Paris.
Ce dernier qui a fait ses études dans l’ancienne Union soviétique avait été approché par la Russie et avait commencé à travailler pour l’organisation du Forum de partenariat Russie-Afrique. Il semble qu’il a tourné casaque comme nous le suggérions dans un précédent article (voir Masiwa n°384 du 28 juin 2022). Pourtant, chacun a pu remarquer l’absence du conseiller diplomatique d’Azali Assoumani dans ces deux voyages. Il était présent à Paris une semaine avant l’arrivée de la délégation et il est retourné à Moroni avant même le départ de la délégation pour le Sénégal. Paie-t-il son rapprochement récent avec la Russie de Poutine ou uniquement les tensions qu’il avait avec le gouvernement pendant qu’il était le Secrétaire général de la COI ?
Le changement de position du gouvernement comorien sur la guerre en Ukraine pour s’aligner sur celle de la France et de l’Union européenne a même coûté son poste à Maoulida Mbaé, le Directeur général d’Alwatwan, le journal gouvernemental. En effet, ce dernier a osé publier une interview signée d’Abdillah Saandi Kemba, le secrétaire de Rédaction, de l’Ambassadeur de Russie aux Comores, en poste à Madagascar critiquant les Occidentaux, alors que la veille l’Ambassadeur de France et le représentant de l’Union européenne tenaient une conférence de presse.
La France aurait également un rôle à jouer dans l’intégration de l’Union africaine au sein du G20, carotte déjà soulevée par le président américain, à condition que les pays africains se placent du côté occidental dans la guerre contre la Russie, ce qui était loin d’être évident au début de la guerre. C’est d’ailleurs un des dossiers évoqués par Macky Sall et Azali Assoumani à Dakar puisque cette intégration devrait se concrétiser sous la présidence comorienne.
Un début de passation
Le chef de l’État comorien s’est ensuite envolé pour le Sénégal, en compagnie de sa délégation. Il s’agissait pour lui de rencontrer le président Macky Sall et l’équipe technique qui a géré pendant un an la présidence de l’Union africaine et commencer la transmission des dossiers. Normalement, le pays qui prend la présidence l’année suivante prend d’abord la première vice-présidence avant la fin de l’année et commence à prendre connaissance des dossiers en cours pendant au moins un mois. La présidence comorienne se fait un peu dans la précipitation à cause des hésitations du Kenya consécutives au changement au sommet de l’État. La transmission commence donc par cette rencontre entre les deux chefs d’État et leurs équipes. C’est sans doute la dernière fois qu’ils se rencontrent avant la réunion des chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine qui doit entériner la présidence comorienne. Mi