Dix ans de bannissement, telle est la sanction infligée à la famille MsahaziRasoul par une grande partie de la notabilité de la ville de Mitsamihuli pour avoir porté plainte au niveau de la justice civile contre leur oncle maternel Ahmed Djabir, à propos d’un terrain issu d’un héritage familial (manyahuli). Ce dernier est accusé par ces nièces et neveux de s’être emparé d’un terrain qu’il avait donné à sa soeur et de l’avoir vendu.Une affaire qui était censée rester dans le cerclefamilial et quia pris une autre tournuredepuis que le dossier s’est retrouvé devant un juge au palais de justicede Moroni. L’affaire a poussé les notables de la ville de Mitsamihulià prononcer un jugement traditionnel qui s’avère particulièrement injuste envers les femmes et les jeunes : le ulapwa ou bannissement. Par Ramzy Saïd Kamal
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Tout a commencé quand Ahmed Djabir a décidé de partager à sa guise, un terrain qu’il avait précédemment donné à sa sœur, qui elle-même a réparti entre ses filles. Suite à un malentenduou une disputeentre son épouse et sa sœur Moina Fatima Djabir, l’oncle de la famillea dit avoir été humilié par sa famille, particulièrement sa sœur et son jeune neveu qui auraient haussé la voix devant sa femme pour prendre la défense de sa mère.
Quand l’affaire a commencé à prendre de l’ampleur, les enfants de Moina FatimaDjabir ont jugé fondamental de mettre en gardeles grands chefs culturels (notables) de la ville de Mitsamihuli. Pour eux, il s’agit d’une affaire familiale à laquelle la ville ne peut en aucun cas se mêler. La famille MsahaziRassoul, un ancien grand notable de la ville et compagnon du président Saïd Mohamed Cheikh, ne voyait pas d’autres possibilités de régler ce conflit avec leur oncle qu’en ayant recours à la justice. Le juge civil a été favorable à cette famille puisque l’oncle a été mis en garde à vue pendant quelques jours. Mais, les notables ont par la suite donné unprononce un châtiment extrême : le bannissementde toute la famille M’sahaziRassoulpendant 10 ans. Et les notables n’ont eu pas besoin d’envoyer un messager à la famille bannie pour lui signifier leur décision.
S’agit-il d’une forme de favoritisme enversun pair ? Il faut rappeler qu’Ahmed Djabir, est un grand notable, l’un des premiers bacheliers de Mitsamihuli, premier agronome de la ville et ancien ambassadeur du pays.
Pendant son séjour en prison, dans une réunion faite à la grande mosquée de Mitsamihuli, quelques grands notables de cette ville avaient promis une réconciliation avec leur oncle Ahmed Djabir dès son retour dans la ville. Mais les notables qui dirigent le mdji,la ville traditionnelle, au lieu de chercher un terrain d’entente entre les deux parties, ont choisi de soutenir complètement l’oncle Ahmed Djabir, probablement àcause de son statut social.
« La nouvelle nous est parvenue par la bouche de quelqu’un qui a entendu la diffusion de la Radio EDSS de Mitsamihuli. On disait que la notabilité de Mitsamihuli nous a désormaisprivé du droit de participer à toute activité qui se passera à Mitsamihuli. Nous n’avons plus le droit de prendre part à des événements comme lesmariages,les funérailles ou toutes autres choses, les hommes de cette famille n’ont pas le droit de prendre la parole à la place publique,un boycotte total » expliqueHissani M’sahaziRasoul, une des victimes de ce bannissement.
Mais malgré ce mauvais traitement que subit cette famille, les enfants de M’sahaziRassoul n’ont montré, jusqu’à présent, aucun signe de résistance fasse à la décision prisepar cesgrands notables, alors que cette famille n’a commis aucune injustice.La décision de la justice de mettre Ahmed Djabir derrière les barreauxne devrait pas être une raison suffisante pour bannir à 10 longues années toute une famille. Ce n’est pas comme si Ahmed Djabir avait été séquestré par ses neveux. Il s’agit d’une décisiond’un tribunal, un représentant l’État.
Cette affaire de bannissement n’est pas un cas isolé. Il est fréquent que les grands notables d’une ville ou d’un village mettent en quarantaine toute une famille, en dehors de toute forme de justice, le plus souvent pour protéger un autre grand notable. Parfois, comme ici à Mitsamihuli, les décisions des grands notables vont à l’encontre d’une décision de justice.
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