Ces dernières semaines les autorités sanitaires de la Grande-Comore ont mis le paquet dans la communication pour que cette fois les habitants de l’île prennent le traitement qui va permettre de mettre fin au paludisme. À Mwali et à Anjouan, cette épidémie n’existe plus. À Ngazidja le traitement administré aux habitants en 2013 a été peu suivi et ce fut un échec. Par Ali Mbae
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Les autorités sanitaires de l’archipel repartent en guerre contre le paludisme, première cause de morbidité et de mortalité aux Comores. Cette maladie ne devait plus subsister dans les trois îles (Anjouan, Mohéli et Ngazidja). Pourtant, elle persiste en Grande-Comore, alors qu’Anjouan et à Mohéli aucun cas autochtone n’est recensé depuis 2014, selon le programme national de lutte contre le paludisme. Rien qu’au premier trimestre de 2019, Ngazidja enregistre déjà plus de 11 228 cas. Les origines de cette situation étant multiples et mal connues, l’échec du traitement de masse effectué en 2013 à une couverture thérapeutique estimée à 45% et la défaillance de la communication menée alors paraissent comme les causes évidentes.
Pourquoi le paludisme ne subsiste qu’à Ngazidja ?
Le programme national de lutte contre le paludisme (Pnlp) ne ménage aucun effort pour éradiquer cette maladie mortelle qui est d’ailleurs l’une des maladies qui ont un traitement très cher. Le paludisme provoque l’absentéisme des enfants à l’école, il est également la cause d’avortements et d’accouchements prématurés pourtant évitables et éliminables. Des moustiquaires étaient distribuées gratuitement, mais ils sont le plus souvent détournés de leur usage initial et utilisés souvent dans les champs de cultures. Des pulvérisations de produits sont faites dans les domiciles pour tuer les larves sans grand succès à ce jour. Ngazidja reste le mauvais élève dans ce traitement de masse (TDM) engagée ces dernières années. Ici, les populations ont boudé les médicaments. Certains prestataires de santé ne sont pas pleinement impliqués dans la stratégie de traitement de masse, certains ayant mené une campagne de contre sensibilisation par peur d’une diminution des nombres de patients dans leurs structures sanitaires privées. Des fausses rumeurs sur l’efficacité des molécules, une influence négative de la diaspora de France et une forme de sensibilisation non adaptée font partie des raisons qui ont provoqué l’échec de l’opération qui consistait à distribuer à toute la population de Ngazidja le Primaquine et l’Artequick contre le paludisme afin de couper la chaine de transmission, selon le rapport du TDM de 2013.
Ngazidja peut encore se racheter
Depuis la semaine dernière, des agents de la communauté sanitaire sillonnent les villes et villages ainsi que les foyers pour recenser les membres de toutes familles. Leur message est clair : « une personne non recensée est un danger pour les autres. Pas d’élimination du paludisme à Ngazidja sans le traitement de masse et pas de traitement de masse sans recensement… »
En tous cas encore une fois, le PNLP soutenu par la République populaire de Chine s’apprête à engager une énième opération de lutte contre cette maladie : ” Nous avons intérêt à prendre les médicaments cette fois-ci. C’est notre dernière chance. Après l’élimination du paludisme dans les deux autres îles, Anjouan et Mohéli, personne ne doute de l’efficacité de ces médicaments. Aujourd’hui, les analyses et les médicaments du paludisme sont donnés gratuitement aux patients, mais après cette nouvelle opération, il n’y aura pas de prise en charge. Nos partenaires ne nous offriront ni des médicaments n’en parlons plus d’un autre traitement de masse. Le paludisme deviendra peut-être une maladie à déclaration obligatoire “, explique Dr Anfani Abdou, coordinateur du PNLP.
Le praticien assure qu’ ” aucun cas autochtone n’est enregistré à Anjouan et Mohéli. Toutes les dispositions étaient prises à l’époque par les autorités. Aucun médecin n’a osé mener une campagne de désinformation. On peut même dire que Ngazidja entache les Comores dans la région. C’est la seule île où cette maladie existe et persiste dans l’océan indien. Aujourd’hui dans des pays comme l’île Maurice, des analyses sont réalisées dans les aéroports sur les passagers étrangers pour savoir s’ils sont attaqués par la maladie. Et souvent, nous sommes interpellés pour des ressortissants de Ngazidja “.
La distribution dans moins de deux semaines
Après avoir achevé la phase de recensement, le PNLP va passer à la vitesse supérieure. Demain samedi 31 août, à Nioumadzaha Bambao-centre, le Chef de l’État devrait lancer officiellement cette opération malgré certaines résistances constatées dans le recensement dans certains villages et quartiers de la capitale : ” Des résistances fortes ont été identifiées sur certaines zones. Nous n’allons pas abandonner. Le 10 et 11 septembre dates choisies pour la distribution des médicaments, nous irons encore dans ces zones. Nous amènerons les médicaments. Nous allons essayer de les convaincre. Nous ne pouvons leur distribuer par la force, mais il est de leur devoir de comprendre qu’il est pour l’intérêt de tout le monde à ce que ce traitement de masse réussisse. Nous ne pouvons pas commettre la même erreur. Aucun partenaire ne pourra encore venir nous aider pour la lutte contre cette maladie “, explique Ahmed Abdou Halid, responsable de la sensibilisation.
Les autorités entrent dans la danse
Alors que la non-implication des médecins-chefs de districts dans le processus est identifiée comme l’une des raisons qui ont provoqué l’échec en 2013, cette fois-ci, ils ont tous été rappelés à l’ordre. L’on a appris qu’ils ont été réunis en premier par la Gouverneure de la Grande-Comore avant d’être reçus par la ministre en charge de la santé. Des mesures pourront être prises à l’encontre de ceux qui vont désinformer et mener une campagne de contre sensibilisation : ” Nous n’allons pas accepter toute forme d’entrave à ce traitement de masse. Nous prendrons nos responsabilités. Nous ne voulons pas du paludisme en 2021 aux Comores “, a insisté Loub Yacout Zaidou, la ministre de la Santé.
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