Pour désigner le mot patience, le shikomori choisit «subira», émanant du mot sabr en arabe. Patienter est se résigner, se contenir, se maîtriser face à ce qui surgit subitement. En théologie c’est endurer face au respect de ce qui relève de l’ordre de faire le bien, d’éviter le mal, et d’endurer au regard de la destinée. La patience est un ordre du Seigneur. «Ô les croyants! Soyez endurants. Incitez-vous à l’endurance. Luttez constamment et craignez Allah afin que vous réussissiez.» (S3V200); «Et sois patient. Car Allah ne laisse pas perdre la récompense des gens bienfaisants.» (S11V115); «endure (Muhammad) donc, comme endurer les messagers doués de fermeté.»(S46V35). Louée dans le Coran et dans divers hadiths, la patience porte en elle des mérites et des bienfaits.
Patienter dans l’obéissance d’Allah, dans l’abstinence des péchés, dans les épreuves
Il est communément admis dans le milieu des savants musulmans que la patience comporte trois catégories qui se résument par cette expression, «il est inéluctable pour le serviteur d’avoir un acte à accomplir, un interdit à éviter et un destin à endurer».
Dans la première première catégorie, il est ordonné de patienter, d’endurer dans l’obéissance de son Créateur par le respect de ses droits, l’accomplissement des bonnes œuvres et l’adoption d’un bon comportement. Les exemples pourraient être légion mais retenons ceux-ci : l’assiduité dans la prière effectuée à son heure, la pratique du jeûne obligatoire, les aumônes, le respect des droits des parents, des voisins, la bienséance et la bienfaisance envers autrui…
La deuxième catégorie étant celle de patienter dans l’abstinence du péché. Incontestablement ce monde éphémère offre à l’homme des biens et des jouissances. Il est du devoir du croyant musulman d’endurer au fond de lui-même pour ne pas commettre des péchés: l’argent facile gagné par la corruption et le vol, la fornication et l’adultère, la fréquentation des lieux de jeux et de loisirs interdits, la consommation des aliments et des boissons prohibés. Étonnant pour le musulman bénéficiant de la richesse, de la bonne santé, du savoir d’en faire usage pour transgresser les ordres et commandements d’Allah et la sunna du Prophète(SAS). Nous avons tendance à penser que c’est le pauvre, le vulnérable qui doit s’armer de patience. Or les fortunés, les hommes exerçant une autorité, les détenteurs de biens ou du savoir ont le devoir d’endurer en s’acquittant des droits d’Allah, des droits des créatures du Seigneur. Ils ont l’obligation de ne pas opprimer et exploiter les autres, de se livrer à des investissements et à des actes prohibés. Comme disait un pieux prédécesseur, «le malheur peut être supporté par le croyant et le mécréant, mais endurer dans la bonne fortune (dans l’abondance) n’est qu’à la portée des justes». Dieu, le Sage, l’Omniscient a dit:«Ô vous les croyants! Que vos richesses et vos enfants ne vous distraient pas du souvenir d’Allah! Ceux qui agissent ainsi sont des perdants.»(S63V9)
La troisième catégorie est de patienter face aux difficultés et aux épreuves de la vie.«Très certainement, Nous vous éprouverons par un peu de peur, de faim et de diminution de biens, de personnes et de fruits»(S2V155). Par ce verset Dieu atteste que l’homme traversera dans sa vie des épreuves qui sont liées à son statut de créature. La perte d’un proche, la baisse des revenus, la perte de biens, la survenue des sentiments de tristesse et de peur, les maladies. Un musulman patientera et endurera ces épreuves, ces vicissitudes et les nuisances et agressions d’autrui. Cependant la patience, dit le Messager, «ne se révèle véritablement qu’aux premiers instants de l’épreuve».
L’amour, la compagnie, le secours, la bénédiction, le succès, la miséricorde, le paradis autant de mérites
S’attacher à la patience, adopter ce comportement est loué dans le Noble Coran. «Armez-vous de patience, Allah est avec ceux qui sont patients». (S8V46). C’est le mérite de la compagnie bienfaisante, pleine de protection et du secours d’Allah qui est mise en évidence dans ce verset. L’autre fait méritoire est le succès consacré par ces paroles de Dieu dans la sourate 3 verset 200: «Ô vous qui croyez! Soyez patients! Encouragez-vous mutuellement à la patience! Soyez fermes! Craignez Allah! Peut-être serez-vous prospères (afin que vous réussissiez). Allah incite, encourage le croyant musulman à patienter afin de bénéficier de son amour: «Allah aime les endurants». (S3V146)
La série des vertus du sabr est immense au nombre desquels la bénédiction, la miséricorde, la bonne guidance d’Allah s 155 à 157 de la sourate la vache: «Annonce la bonne nouvelle à ceux qui sont patients, à ceux qui disent, lorsqu’un malheur les atteint:«nous sommes à Allah et nous retournons à Lui. Voilà ceux sur lesquels descendent des bénédictions et une miséricorde de leur Seigneur. Ils sont bien dirigés».(S2V155-157). Allah garantit aussi aux endurants une fin heureuse et le paradis:«Sois patient. La fin heureuse sera aux pieux». (S11V49).
Quant au Prophète(SAS) dont la patience dans l’obéissance, l’abstinence totale aux péchés et dans les épreuves est célébrissime, il nous a légué ces hadiths: «Dieu, Exalté soit-il, a dit: «lorsque je reprends à l’un de Mes serviteurs croyants l’être qu’il aime le plus au monde et qu’il se montre patient, Je ne saurais lui accorder d’autre récompense que le Paradis»; «l’épreuve ne cesse de frapper le croyant ou la croyante dans leur corps, leurs biens, et leur progéniture jusqu’à ce qu’ils rencontrent Allah sans me moindre péché». Nous retenons ainsi comme mérites, le paradis, l’expiation des péchés. Par ailleurs il a exprimé le double bénéfice du croyant dans l’aisance et la privation:«en effet, lorsqu’un bien lui échoit, il remercie Dieu et ceci est un bien pour lui. Et s’il est victime d’un malheur, il se montre patient et cela est aussi un bien pour lui».
Adoptons la patience, un haut degré de la foi à l’image du Prophète (SAS)
Faire preuve de patience est une bonne œuvre et un bon comportement. C’est obéir Allah et son Messager avec tous les bénéfices et mérites précités. C’est une des meilleures attitudes à adopter dans le quotidien. Notre Créateur nous le signifie par Sa parole:«…Mais si vous êtes patients, c’est mieux pour ceux qui sont patients»(S16V126). C’est le trait de caractère de nombreux prophètes et des pieux. Certes que l’endurance ne s’acquière ni avec facilité ni en un laps de temps. Elle fait partie des efforts (djihad) à conjuguer avec persévérance et constance. Dans le livre «éducation spirituelle et purification des âmes», réunissant des textes de Al Basri, Al Ghazali et Ibn Qayyim, l’auteur, A. As-Saber a démontré que la patience est un pilier de la foi sur lequel le «croyant s’appuie». Il en tire cet enseignement: «point de foi pour celui qui est démuni de patience». Il estime que faire preuve d’absence d’endurance serait une manifestation de «foi chétive» et non affermie. Le croyant musulman en quête de félicité doit réunir en lui l’endurance et la reconnaissance en considérant la première comme un don. Le Messager l’a si bien vanté: «aucun homme n’a reçu de meilleur et de plus large don que la patience». C’est une des clefs de l’apaisement et de la purification de l’âme contre la haine, la rancœur, la vengeance, la colère. Gardons, chers frères et sœurs, à l’esprit ce hadith du Prophète(SAS): «celui qui s’efforce d’être patient, Dieu le rend patient. Aucun don n’a été donné à quiconque qui soit meilleur et plus vaste que la patience».
«Seigneur, déverse sur nous l’endurance et fais-nous mourir entièrement soumis». Amine
Par ASSAF MOHAMED SAHALI