La fête de la musique de ce 21 juin 2023 à Moroni, sur le terrain de basket de l’Alliance franco-comorienne, n’a pas déçu les mélomanes. Les oreilles et les yeux ont été enchantés par l’ensemble des spectacles.
Par Hachim mohamed
Gratuite et ouverte à tous les musiciens, amateurs et professionnels, la Fête de la musique, qui a cette année 41 ans, s’adresse à tous les publics et met en valeur tous les genres musicaux
Musique classique ou musiques actuelles, tous les genres ont leur place pour se produire et avec pour but de montrer toute la diversité de la musique. Le public des mélomanes a répondu présent à Moroni, attiré et par le programme varié concocté par les organisateurs et par la prestation de qualité des artistes invités à l’évènement.
L’affiche de cette 41e édition était intéressante grâce à la présence de solistes en musique hip-hop, rap en plus de musiciens dotés d’orchestre d’instruments anciens, à même de faire résonner marimbas, vibraphones, congas, tambours et crotales.
Cinq chanteurs au karaoké, sept artistes à la « guitare solo et neuf orchestres
Portée par les congas, tambours comoriens joués par « Wegni Ngazi », la fête de la musique qui était organisée en trois parties a commencé avec les danses traditionnelles de Ngazidja.
Des pas de danse ont été exécutés sur scène par une troupe composée de filles et de garçons. Les ballets de shigoma et de Sambe ont ravi le public par les prouesses souvent époustouflantes des danseurs et de danseuses qui le transportaient d’un tableau de chorégraphie à un autre comme dans un songe.
Sur le premier volet de la soirée, le premier des cinq chanteurs, Yousouf Assoumane, est arrivé sur scène. Il a interprété plusieurs chansons sur une musique préenregistrée. Par sa voix tonitruante, sa manière de se trémousser sur l’estrade, la trame musicale et ses accents reggae faisait voyager dans l’imaginaire jusqu’en Jamaïque.
Dans la foulée de cette prestation, la voix zouk version comorienne de la chanteuse Rouwaida entra en scène en chantant « Mdrumshe yatsiriwe dingoni », une pierre jetée dans le jardin de la société comorienne patriarcale.
S’il y avait dans cette fête de la musique une musique épicée à la sauce R&B, faite pour bercer les cœurs et pour danser, c’était celle soutenue au micro par Comostyle. Voilà un chanteur doté d’une voix chaude en forme d’un « riff répétitif », un effet tournoyant, un brin magique offrant aux spectateurs de purs moments de bonheur !
À la fin de la première partie du spectacle, Rimka, un jeune d’iroungoudjani a surpris les mélomanes par son côté bouillant « karaokeur », qui avait donné vraiment dans le gangsta rap, dans un hip-hop dévastateur sur la scène ! Épique et emballante, sa prestation était aux yeux d’un public jeune qui le connait et qui fredonnait une belle démonstration d’un genre musical au son puissant et accrocheur. Par ses montées et descentes depuis l’estrade, ses jeunes fans ont savouré du Rimka, pétillant, dynamique, électrique et débridé.
Mqou épatant, Ibaa Claude magnifique !
Sur scène, il y eut de ces artistes incroyables qui jouaient en « guitare solo » appelé aussi « guitare soliste » ou « guitariste soliste.»
Que ce soit dans les partitions pour découvrir les talents de demain voire vos stars préférées, c’était le côté artistique qui attirait les mélomanes.Pour ouvrir les oreilles aux richesses d’un instrument moins banal qu’on ne le croit, il eut la guitare sèche du chanteur Maou avec le son mélancolique « Wutsidji lawumu baa haari rangué yahaho ngyo mudu ».Remarquable instrumentiste au jeu policé et élégant, c’est pendant cette longue soirée musicale l’un des plus fins mélodistes à la guitare. En entonnant le refrain « range yahaho zahabu », le guitariste soliste Maou a gratifié les mélomanes, sous le charme des rythmes chaloupés de la chanson, et des arpèges de guitares cristallins pour un blues très terroir vivifiant.
Au cœur du spectacle, le clou de la soirée était constitué par la prestation du troisième orchestre à monter sur l’estrade. Formidable machine a tempo syncopé, puisant dans les classiques Twarab, soliste génialement inspiré et accompagnateur en béton armé, les mélomanes ont pu l’apprécier avec Ibaa Claude qui interprétait « Rikena Zitrendwa, rirentsi wuriremana ». Ce fut un concert presque parfait consacré au répertoire de son groupe.
De son vrai talent de mélodiste, avec une culture musicale d’une indéniable richesse, ce grand artiste en imposait à tous dans cette fête musicale.
Une chanson insolite sur l’homosexualité a fait tomber le public
Après la prestation « tambour battant » de l’artiste et soudeur Mouigni Mmadi, le public a eu droit à des notes insolites du guitariste soliste Ralesh.
C’est une surprise qui a fait vibrer les cœurs des mélomanes et parfois trembler les murs du terrain de basket, non pas seulement à cause de sa présence lumineuse et sa voix pendant sa partition, mais surtout le contenu de sa chanson.
Il distillait des expressions obscènes et salaces sur l’homosexualité qui ont fait tomber à la renverse les gens qui ont été surpris.
Guitare solo en bandoulière, l’artiste Safké, connu pour son humour décapant, s’est aussi attaqué aux problèmes de la société comorienne en voie de perdition en utilisant des mots en shikomori dont lui seul a le secret.
« Soubi » de Mwali toujours en haut de l’affiche à Ngazidja
L’orchestre Twarab Âyn a illuminé la fête de la musique. Les musiciens, et particulièrement le fondateur, Wadjih Abderemane, ont interprété, sans fausse note, les classiques du Twarab comorien.
À la fin de la soirée, la musique des balafons, des flûtes et des sifflets de Soubi, le doyen des musiciens de Mwali, a encore une fois cassé la baraque sur le terrain de basket. Pendant qu’il laissait éclater son talent, nos compatriotes font tomber une pluie de billets de couleurs différentes de la monnaie comorienne sur sa tête. Il fut le dernier musicien de cette belle soirée.