Tombé en disgrâce pour avoir dénoncé la politique du chef de l’Etat, l’ancien vice-président Djaffar Ahmed, refugié à Dar es Salam depuis maintenant près de trois mois, aimerait rentrer au bercail « si Azali accepte de faire la paix ».
Refugié en Tanzanie où il est sous protection du haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), l’ancien vice-président Djaffar Ahmed Said semble lâcher du lest. En effet, celui qui est sous le coup d’un mandat d’arrêt international aurait confié à une équipe d’Al-watwan en mission à Dar es Salam, dimanche 25 novembre, qu’il souhaiterait trouver un terrain d’entente avec le chef de l’Etat. « Si Azali le veut bien, nous ferions la paix pour que je puisse enfin rentrer », aurait confié celui qui trouve son séjour à l’extérieur « languissant ».
Alors vice-président en charge de l’économie et de l’énergie entre autre portefeuilles, Djaffar Ahmed Said a fait le choix audacieux de vider le trop-plein de son cœur publiquement. Nous sommes le 16 au siège du gouverneur de Ngazidja. Mécontent du processus référendaire entamé par le chef de l’Etat et qui allait supprimer les postes de vice-présidents avant le terme du mandat constitutionnel, Djaffar a vidé son sac, prenant à partie Azali Assoumani.
« Nous sommes élus pour cinq ans dans le cadre de la loi fondamentale de 2001. Et nous gouvernons à cet effet. Prendre l’initiative de changer une constitution qui garantit l’unité nationale n’est pas chose bénigne…Qu’on ne l’ignore, chers compatriotes, cette constitution a permis à notre nation de redorer son blason sur la scène internationale parce que, à juste titre, le pays a retrouvé sa stabilité. Ainsi, nous nous devons de conserver jalousement cette stabilité », avait-il annoncé sous les ovations d’une foule hostile au gouvernement central.
Cette rupture officielle a jeté un froid dans le camp du gouvernement. Ses deux collègues vice-présidents ont fait le parallèle de cette sortie au tragique sort réservé à Andrés Escobar, assassiné après avoir marqué un but contre son camp ayant entrainé l’élimination de son pays lors de la coupe du monde 1994. Le 28 juin, le chef de l’Etat qui s’était jusqu’ici réservé a procédé à un remaniement technique. Le vice-président Djaffar, qui depuis sa déclaration n’a pas mis ses pieds à Beit-Salam, se voit reléguer à la cohésion sociale.
Fin juillet, la justice a fait arrêter des personnes soupçonnées d’avoir planifié un coup d’Etat. Parmi elles, le petit frère de Djaffar, l’avocat Bahassane Ahmed. Djaffar serait sur la sellette. Le procureur de la république a parlé d’un décaissement de 300 millions de francs comoriens destinés à financer l’opération qui avait visé, selon lui, le ministre de l’intérieur, le chef de l’état-major et le président de la cour suprême entre autres cibles. L’étau se resserre. Et Djaffar est bien conscient que de fil en aiguille, les autorités veulent remonter jusqu’à lui qu’il soit véritablement lié ou pas au supposé projet d’attentat.
Le 3 septembre, il a pris l’avion ver Dar es Salam. Son voyage considéré comme une fuite par les autorités, a entraîné plusieurs arrestations dont sa femme et des policiers de l’air et des frontières. La nuit du dimanche 9 novembre, alors qu’il se trouvait au pied de son hôtel dans la capitale tanzanienne, Djaffar s’est fait kidnappé par quatre individus qui le relâcheront contre une rançon de 400euros, après quatre heures de temps. Soit dit en passant, les ravisseurs qui prétendent être des services d’immigration auraient confié être envoyés par « des officiels » comoriens.
Son retour aux Comores dans des conditions d’apaisement pourrait n’être qu’un vœu pieux. « Azali considère que Djaffar lui a planté un pieu dans le cœur », avait commenté un conseiller du président, juste après la rupture. Il rajoute que le chef de l’Etat en voulait plus à Djaffar qu’il n’en voulait à Salami, opposant de première heure aux reformes constitutionnelles.
Par Toufé Maecha