Ahamada Smis est un artiste pluridisciplinaire qui manie le rap, le slam et la chanson. Après la sortie de trois albums (« Afrosoul », « Origine » et « Être»), il revient avec un quatrième album dont le titre est « Air ». Il évolue sur les scènes culturelles, et particulièrement Hip Hop en France et aux Comores.
Avec la sortie du clip « La route », il nous fait redécouvrir son monde du Hip Hop et du slam en langue française, mêlant musique francophone de l’océan indien et les sons de son pays d’origine, les Comores. Propos recueillis par Intissam Dahilou
Masiwa – Ahamada Smis, que représente ce nouvel album, « Air », pour vous ?
Ahamada Smis – C’est mon quatrième album. Je poursuis mon travail de mélange des musiques de l’océan indien, avec l’écriture contemporaine. La spécificité d’« Air » c’est qu’il s’agit d’un album de chansons francophones, musique de l’océan indien. Ceux qui me connaissent un peu savent que je viens du Hip Hop. Mes derniers albums, c’était soit du rap mélangé avec de la musique francophone soit du slam mélangé avec de la musique comorienne. Mais avant de mélanger les deux musiques, j’étais d’abord dans le rap.
Masiwa – Pourquoi avoir choisi le titre « Air » ?
Ahamada Smis – Cet album s’appelle «Air» parce que c’est avant tout un album de chansons. Donc ce n’est ni du Rap ni du slam, c’est de la chanson basée sur les musiques traditionnelles de l’océan indien. Ça fait plusieurs années que je travaille avec mon professeur de chanson qui s’appelle Martina Capela. À travers elle, je la vois chanter, je la vois parler. On travaille sur la circulation de l’air parce que sans air on ne peut pas chanter. Selon les muscles sur lesquels on s’appuie, on émet les sons. On arrive à chanter. Alors je me suis dit mon prochain album, je vais l’appeler “Air”. Donc “Air” c’est l’air du temps dans lequel nous vivons actuellement. C’est l’air de nos mélodies aussi.
Masiwa – Pourquoi avez-vous choisi le titre « la route » pour annoncer votre album ?
Ahamada Smis – J’ai choisi le clip « La route » parce que pour moi c’est un titre ensoleillé. J’écris toujours des textes parfois sur ce que je vis, ce que je ressens, ce que je vois, ce qui m’inspire, ce qui me bouscule, ce qui m’enchante aussi. J’ai écrit le texte en pensant à plusieurs choses en même temps, notamment à l’équipe Cœlacanthe, en pensant aussi à moi, à ma vie, à mon parcours musical, car cela fait un bon moment que je fais de la musique.
Musicalement le titre est composé par des rythmes de Ngoma za madjini. Tous les titres de l’album sont composés par des rythmes de danses traditionnelles de l’archipel des Comores. J’ai fait jouer toutes les percussions avant de composer et de jouer avec les instruments. Et celui-là, il est composé avec le rythme Ngoma za madjini. Et obligatoirement on a envie de danser, de monter en transe. J’ai eu l’occasion de voyager à Mayotte au mois de novembre dernier. Et du coup dans ce clip j’avais envie de faire rêver. D’inviter au voyage.
Masiwa – Vous êtes connu pour le Rap et le slam, pourquoi cette envie soudaine de basculer dans le monde de la chanson ?
Ahamada Smis – Par rapport aux autres albums, la base c’était soit le rap soit le slam. Quelles que soient les musiques que je composais. Même je me suis inspiré des musiques de l’océan indien notamment de l’album “êtreS Mais j’étais toujours dans un mélange rap-slam. Maintenant c’est différent. Dans mes refrains, j’ai toujours chanté mes refrains soit en comorien soit en français. Mais comme je le disais, ça fait des années que je travaille avec une prof de chant. Je travaille le chant comme instrument. Mais je n’ai jamais osé me dire : « Tiens ! tu es un chanteur. Et dans cet album je confirme que je suis un chanteur.
Masiwa – Par rapport aux autres albums que vous avez sortis, « Air » ajoute quelle dimension dans votre carrière artistique?
Ahamada Smis – J’aime chanter. Et j’ai atteint un certain niveau en chant. Donc la dimension de cet album c’est qu’il s’agit de chanson basée sur la musique traditionnelle de chez nous. C’est un album dansant. Comme j’ai composé avec des rythmes des danses traditionnelles que ça soit le shigoma, le djaliko, le mgodro, le sambe, les rythme de twarab aussi. Alors on va obligatoirement danser et chanter. Parce qu’il n’y a pas que les refrains qui font danser. Mais il y a aussi les couplets qui sont faits aussi pour être chantés.
Masiwa – À chaque fois que vous êtes sur scène, on vous voit avec le même instrument traditionnel, le « Dzindzin », que représente-t-il pour vous ?
Ahamada Smis – Le dzindzin, il représente beaucoup de choses pour moi. Déjà c’est l’instrument avec lequel je compose depuis 2011. Quand je suis arrivé dans l’océan indien en 2010 pour créer le projet « Origine », j’ai eu la chance de rencontrer mon frère, mon ami, mwanama Mwigni Mmadi qui a fabriqué et m’a offert mon premier dzindzin. Et à partir de ce moment-là, je me suis mis à comprendre comment on le joue. Et j’ai appris à le jouer assez rapidement. Depuis, je compose tout le temps avec le dzindzin. J’adore le son du dzindzin. Ça berce. Ça a du rythme. C’est mon instrument de prédilection. C’est l’instrument avec lequel je me sens à l’aise.
Masiwa – Pourquoi avoir choisi la musique traditionnelle des Comores ?
Ahamada Smis – Depuis l’album « Origine », j’ai eu l’idée de valoriser la richesse culturelle de notre archipel, faire connaître notre musique à travers des œuvres contemporaines. Mais aussi faire connaître nos instruments que ça soit le Gambusi, le dzindzin, le Ngoma. C’est pour cela qu’au lieu de jouer de la guitare, j’ai préféré adopter nos instruments, je me suis mis à fond pour les maîtriser et les valoriser à travers les musiques du monde