La concurrence est la situation dans laquelle se trouve une personne ou une entreprise par rapport à une ou plusieurs autres lorsque, tout en faisant des profits, elle peut rivaliser avec elles en offrant un service ou un produit au moins équivalent pour un prix au moins égal. Par Mounawar Ibrahim, juriste
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De la liberté des prix
En principe, les prix des biens et des services sont librement déterminés par le jeu de la concurrence. Ce qui sous-entend que chaque opérateur économique est libre de fixer les prix de ses produits. La loi n°13-014/AU du 26 décembre 2013, relative à la concurrence en Union des Comores, dispose en son article 5: « Sont libres et déterminés par le jeu de la concurrence : les prix des biens et des services ; les importations et les exportations ». Toutefois, cette liberté est assujettie à une certaine réglementation. En effet, dans les secteurs où la concurrence par les prix est limitée en raison, soit de monopole ou de difficultés durables d’approvisionnement, la concurrence par les prix peut être réglementée. « En dérogation au principe indiqué dans l’article précédent, le Gouvernement peut, en tant que besoin, et après avis de la commission nationale de la concurrence instituée à l’article 22, réglementer les prix des biens et des services lorsque la concurrence par les prix est limitée en raison de situations de marché monopolistiques ou de toutes autres circonstances structurelles entrainant des difficultés durables d’approvisionnement » (article 6 de la même loi).
De la commission nationale de la concurrence.
Elle est une institution de régulation du jeu de la concurrence dans le territoire national. Elle est aux consommateurs, ce que le bon père de famille est à ses enfants, en principe. Ce point est d’une grande importance quand les gouvernants ont souvent tendance à regarder les choses du seul côté qui leur convient. Réguler la concurrence ne consiste pas seulement à penser aux entreprises et à leur prospérité. La situation du consommateur doit également prévaloir. Le décret d’application de la loi sur la concurrence dispose dans son article premier : « La présente loi vise à promouvoir le libre jeu du marché en contrôlant ou en éliminant toute pratique ayant un objet ou un effet restrictif de concurrence préjudiciable au développement de l’économie nationale et aux intérêts des consommateurs. L’atteinte de ces objectifs permettra de lutter contre la vie chère et, par ailleurs, d’attirer les investisseurs dans l’Union des Comores ». Ceci étant, la commission doit entre autres, « apporter l’expertise nécessaire aux juridictions qui peuvent la saisir pour avis en vue d’une décision de justice sur un litige lié à une question de concurrence ; rechercher, contrôler et, le cas échéant, par voie de décision, poursuivre et sanctionner les pratiques anticoncurrentielles visées par la présente loi ; émettre un avis sur les mesures de réglementation des prix envisagées par le Gouvernement ; entreprendre toute action utile pour développer la culture de la concurrence au sein de l’Union des Comores » (article 25).
De la concurrence en matière de TICs
La loi n°14-31/AU du 17 mars 2014, relative aux communications électroniques dispose dans son article 3 : « La présente loi vise à promouvoir le développement des communications électroniques en Union des Comores par la création d’un cadre juridique approprié, respectueux du principe de neutralité technologique et prenant en compte la convergence, c’est-à-dire, le rapprochement inéluctable des télécommunications, de la communication audiovisuelle et de l’informatique sous l’influence des techniques numériques (…..) ; améliorer la qualité des services de communications électroniques offerts ainsi que la gamme de prestations rendues et rendre plus compétitifs les prix de ces services en en baissant les coûts ». C’est surtout ce dernier point qui doit nous interpeller. Le principal intérêt de la concurrence est indiscutablement la baisse des coûts. En effet, la pluralité d’opérateurs accroît la compétitivité et offre une bouffée d’oxygène au consommateur. Cette logique est valable dans tout secteur économique.
Des missions de l’ANRTIC
L’autorité nationale de régulation des technologies de l’information et de la communication(ANRTIC) est de façon simple, le gendarme des TICS. Afin de garantir une concurrence loyale entre opérateurs et d’éviter l’abus de position dominante, l’ANRTIC s’assure du respect des règles en matière de concurrence et de traitement égalitaire entre opérateurs. Parmi les missions de l’ANRTIC, « protéger les intérêts des consommateurs et des citoyens en tant qu’usagers individuels, professionnels, collectifs et résidentiels des services des TICs et de ceux de l’E-gouvernance ; d’assurer que la concurrence entre les opérateurs est loyale pour prévenir et corriger, entre autres, l’abus de position dominante, la tarification visant à décourager la concurrence et les accords qui l’effet de restreindre le fonctionnement du marché, y compris les ententes entre deux ou plusieurs opérateurs » (article 26 de la loi sur les TICs.)
De l’actualité sur les TICs.
L’ANRTIC a demandé aux deux opérateurs des TICs sur place, en l’occurrence, Telma et Comores télécom de hausser leurs prix des services pour permettre aux deux sociétés de se relever après la crise qu’elles traversent ; ou plutôt qu’elle traverse. Car c’est Comores télécom qui coule. Et cela n’inquiète personne sauf peut-être ceux et celles à qui sa prospérité profitait. Cette société qui a longtemps saigné le consommateur comorien, surfait sur le monopole pour offrir à ses dirigeants et à ses employés des largesses à outrance au nez et à la barbe du contribuable. Soit. Mais voilà que maintenant, l’ANRTIC veut enfiler un costume qui lui va trop grand et trop ridicule pour sauver le soldat Hury. En vertu de quoi ? Je n’ai aucunement vu dans les textes, une disposition qui lui donne le droit de formuler une telle demande. Peut-être que j’ai tort, mais même si elle pouvait le faire, aurait-elle oublié qu’encourager l’accès universel et la baisse des coûts est l’un des objectifs phares de la politique comorienne sur les TICs ? Ou regarde-t-elle seulement les intérêts de l’Établissement public à caractère industriel et commercial ? « L’État d’abord, le consommateur après » serait la ligne directrice d’une telle démarche.
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