La langue n’a pas d’os, disait un ancien président comorien. Est-ce pour nous avertir du devoir de tout musulman comorien de la contrôler, de la «tourner mille fois» avant de parler? Il est certain que cet organe est un bienfait du Créateur dont l’usage mérite vigilance et attention. Éviter à ce qu’elle en commette des péchés et œuvrer à ce qu’elle soit constamment dans le rappel, et l’usage de la bonne parole. Le Prophète affirme que tous les organes interpellent la langue au vu de sa place et de son rôle: «lorsque s’éveille le fils d’Adam, tous ses membres mettent en garde sa langue: «crains Allah afin de nous préserver! Car nous procédons de toi: si tu te montres droit, nous le serons également; mais si tu te montres fourbe, nous le serons aussi».
En effet la langue, en islam, occupe une place importante. En témoigne ce verset : «ne lui avons-nous pas accordé deux yeux, une langue et deux lèvres»? (S90 V8-9). Or l’être humain manifeste peu de reconnaissance, rien que par le péché. Notre religion nous met en garde. «Il n’y a pas une parole qu’il prononce [l’esclave de Allah] sans qu’il ait auprès de lui les deux anges Raqîb et `Atîd » (S50V18). A la question de savoir si nous rendrons compte de ce que nous disons, le Messager a déclaré que «les gens seront jetés en enfer de ce qu’ils ont pu dire». L’autre avertissement provient de ce hadith: « La plupart des péchés du fils de Adam provient de sa langue. »
Les péchés de la langue
Il est vrai que les péchés commis par la langue sont nombreux. Quoi de surprenant si le Messager affirme, «beaucoup de gens vont être jetés en enfer à cause de ce qu’ils ont dit avec leurs langues»! Il s’agit, pour donner un premier exemple, de l’offense envers Allah, son Prophète et ses compagnons. C’est le degré le plus haut. Offenser Dieu par Ses noms et attributs sont parfois banalisés! Associer Dieu à une créature a valeur d’exemple. Que dire de ceux qui offensent à longueur de journée les compagnons du Prophète!
Parmi les péchés de la langue figurent la médisance. Et sa meilleure définition provient du Prophète : c’est « citer ton frère par ce qui lui déplaît ». Cette médisance est considérée comme un grand péché en islam. Et dans le Noble Coran, Allah dit : « Ne faites pas la médisance les uns les autres, est ce que l’un de vous aimerait consommer la chair de son frère mort».
S’ensuit la discorde. Semer la discorde entre des personnes est condamné par le Coran qui le nomme Annamima : «Celui qui va en rapportant la parole des uns aux autres pour semer la discorde» (S68V12). Le Prophète (SAS) a été clair: «N’entrera pas au paradis celui qui rapporte la parole des uns aux autres pour semer la discorde».
Le mensonge est connu de tous comme étant un péché énorme de la langue. Mentir c’est déformer la réalité intentionnellement, pondre et faire circuler une fausse information…Il est à l’opposé de la vérité et de la réalité. La plaisanterie mensongère est loin d’être autorisée comme le prouve ce hadith « Le mensonge n’est valable ni étant sérieux ni en plaisantant ». C’est pourquoi le Messager indiquait souvent que « Certes il m’arrive de plaisanter, mais je ne dis que la vérité ». Le mensonge peut prendre diverses formes : le récit mensonger, le serment mensonger, les promesses et les engagements mensongers. Nous insistons sur un autre aspect du mensonge à savoir le faux témoignage. Un péché banalisé par certains, soit dans les testaments, soit dans les litiges et contentieux familiaux ou commerciaux. Pire certains n’hésitent à y recourir devant les tribunaux sachant que « Le faux témoignage est un très grand péché».
Les insultes, la grossièreté sont à bannir dans nos langues. « Insulter le musulman est de la perversité » a averti le Messager. D’où son ordre : « N’insultez personne. » Les diffamations des frères et sœurs sont une nuisance à leur personnalité et à leur honneur. Faire tort et porter atteinte à l’honneur par la calomnie est aussi un péché de la langue. Dans le Coran, Dieu maudit les auteurs en ces termes : « malheur à tout calomniateur diffamateur » (S104V1).
Ce qu’il convient de faire
Un bon musulman se doit bien tenir sa langue, la préserver de ses péchés. Il se rappellera que le jour de la résurrection la sienne rendra des comptes comme le stipule le Saint Coran :« Le jour où leurs langues, leurs mains et leurs pieds témoigneront de ce qu’ils disaient. » (S24V24). Le Prophète (SAS) nous recommande ceci : « Celui qui croit en Dieu et en le Jour dernier, qu’il dise du bien ou alors qu’il se taise. » Il nous encourage à préserver cet organe en nous promettant le paradis : « celui qui me garantit ce qu’il a entre les mâchoires (langue) et ce qu’il a entre les jambes, je l’assure au paradis ».
La langue du bon croyant doit se consacrer au rappel, à la bonne parole, au commandement du bien et à l’interdiction du mal. C’est la meilleure compréhension de cette parole du Messager : «Toutes les paroles des fils d’Adam seront retenues contre eux, à l’exception du commandement du bien, de l’interdiction de ce qui est blâmable et de la mention (dhikr) d’Allah.» Les sagesses musulmanes en matière de protection de la langue sont multiples. Citons celles-ci : « rien ne mérité davantage la prison que la langue » ; « la langue est semblable à une bête féroce : si tu ne l’enchaînes pas, elle t’agresse ». Une sagesse de notre Imam Chafii dit : « si l’on veut parler, il faut réfléchir avant de la faire ; si l’on est convaincu de l’utilité de la parole, alors parle ! Mais si l’on doute de l’utilité des mots, mieux vaut se taire, jusqu’à ce que la nécessité de la parole devienne évidente ».
En conséquence, chacun de nous s’emploiera à user de la bonne parole, celle de l’unicité de Dieu, celle de sa glorification, celle qui nous conduit vers les bonnes œuvres et le bon comportement. « Vers Lui monte la bonne parole, et qui est élevée haut par la bonne action » (S35V10). La bonne parole est évocation d’Allah, et « la meilleure évocation est « laa ilaha illallah ». L’évocation, c’est-à-dire le dhikr, en permanence, fait partie de cette bonne parole. Et notre Créateur nous ordonne, « Ô vous qui croyez ! Invoquez Dieu d’une façon abondante ». Le Prophète distingua l’invocateur en proclamant qu’il restera toujours meilleur que le combattant. La bonne parole est synonyme d’un cœur sain, d’un bon comportement et donc d’une foi affermie. Chacun de nous a intérêt à intérioriser quelques bonnes règles : parler que de ce qui le concerne ; parler avec douceur ; éviter les serments non nécessaires, les insultes, les propos grossiers ; multiplier les invocations et les bons rappels.
Qu’Allah purifie nos langues, nos cœurs et nos actions et fasse de nous, sœurs et frères, des Hommes sincères, véridiques portant en nous et envers les autres la bonne parole ! Puisse Allah nous ranger parmi ses croyants heureux « qui s’éloignent de toute futilité »(S23V4). Amine !
Par ASSAF MOHAMED SAHALI