Dans sa folie de grandeur, le Colonel Assoumani Azali a voulu être à la tête de l’Union Africaine. Et les laudateurs ont bruyamment fêté sa nomination, comme « président de 55 pays » celui qui allait immédiatement afficher son ignorance en se demandant s’il y avait « 5 ou 6 Afrique(s) » en pleine salle de conférence du siège de l’organisation panafricaine. Puis, à peine installé dans cette fonction honorifique, il se heurte à ses propres limites que l’opinion et ses pairs ne peuvent tolérer, contrairement au pays où, face au risque de convocation à la gendarmerie et de torture à mort par la milice dite GIPN, on préfère généralement faire semblant d’apprécier ses blagues d’un goût douteux et souvent humiliantes pour ses propres collaborateurs.
Par Toihir DAOUD MDAMA
Un président de l’Union Africaine qui, honteusement, se tait lorsqu’en Tunisie un Chef d’État s’approprie la théorie raciste du grand remplacement et incite à une violente répression contre les Africains subsahariens. Ce qui amène à rappeler son propos scandaleux consistant à commenter à titre comparatif le prix de l’esclavage en Libye et celui d’un cabri aux Comores.
Un Président de l’Union Africaine écarté de la gestion du conflit entre la République. Démocratique du Congo et le Rwanda. Et dans un tel contexte, Paul Kagamé n’hésita pas à lui adresser officiellement une missive pour le sermonner, sans ménagement, quant au non-respect des mécanismes et au népotisme mis en œuvre, dès sa prise de fonction.
Et voilà que, de nouveau, avec la guerre entre des fractions militaires au Soudan, une troïka se met en place sans lui et qu’une réunion de haut niveau entre l’Union Africaine et la Ligue des États Arabes se tient au Caire sur ce sujet brulant, sans sa présence, lui qui use habituellement des deniers publics pour se rendre à toute investiture ou inauguration, à n’importe quel coin de la planète. Pourtant, non seulement il préside l’Union Africaine, mais les Comores sont également membre de la Ligue des États Arabes. À l’évidence, avec une telle marginalisation, les observateurs notent qu’en fait, plus personne n’est disposé à lui faciliter encore la location d’un jet privé !
On ne peut donc que se demander pourquoi a-t-il tant tenu à cette « couronne d’épines ». D’autant que même à la tête de tout le continent africain, il ose déclarer qu’il n’est pas de taille, « pas de force » pour stopper l’opération Wuambushu consistant à effectuer, manu militari, des déplacements forcés et massifs de sa population sur son propre territoire internationalement reconnu comme appartenant à un État souverain membre de l’organisation qu’il préside. Pourtant, des pays dirigés par des militaires (des putschistes comme lui) ont tout simplement choisi la rupture avec l’ex-puissance coloniale, au nom du respect de la souveraineté. Et cela, sans même compter sur l’appui des organisations sous régionales, encore moins sur un quelconque soutien de l’Union Africaine qui voudrait plutôt les sanctionner. Pire, alors que s’expriment partout et clairement des dénonciations des prévisibles conséquences catastrophiques par l’Unicef, et en France même par des institutions officielles de défense des droits humains, des élus nationaux et locaux, ainsi que par des organisations syndicales, son gouvernement interdit tout usage de la liberté publique et constitutionnelle de manifester symboliquement du Palais du Peuple à la Place de l’indépendance, contre l’illégalité et l’indignité.
C’est que pris dans le piège de ses propres mensonges et après avoir accepté l’installation de radars placés à Anjouan pour empêcher la circulation à destination de Mayotte, au nom de la lutte contre les trafiquants, il croyait pouvoir jongler entre le sentiment national et l’appui de Paris pour pérenniser son pouvoir clanique.
Tout cela, dans un deal, un financement de 150 millions d’euros qui sont gérés et octroyés au compte-gouttes par l’Agence Française de Développement (AFD).
Tout cela pour continuer à voir son rejeton offrir des miettes aux courtisans pendant le mois béni de Ramadan et, à son tour, humilier publiquement le Secrétaire Général de leur parti et accessoirement son chargé de la défense nationale.
Tout cela en reniant ainsi, par lâcheté, lui le militaire, ce pour quoi des prédécesseurs civils ont sacrifié leur vie pour que perdure la fierté d’une nation dans l’unité et l’intégrité du territoire.
Tout cela, enfin, pour espérer pouvoir négocier seul et avec les rétrocommissions les gisements pétroliers et gaziers, en ayant bâillonner et embastiller tout récalcitrant et toute voix dissonante ?
C’est tout simplement méconnaître la réalité des États qui n’ont point d’amis, mais uniquement des intérêts nationaux à prévaloir et à préserver pour le bien-être des populations, en cohérence avec l’environnement et le bon voisinage qui font accéder un Chef au rang reconnu d’Imam, d’homme d’État. C’est dire combien notre multirécidiviste est loin d’opter pour une telle guidance, hors des pratiques bananières des institutions.
Qu’Allah veuille bien préserver l’archipel des Comores de cette gouvernance erratique.
Avec mes vœux de fête à tous les travailleuses et travailleurs du monde entier, mes pensées à nos ainés retraités des Comores qui comptabilisent des mois sans leur pension.
Lyon, le 30 avril 2023