À l’occasion du 44e anniversaire de l’indépendance des Comores, le journal Masiwa a fait un sondage qui permet de voir que près de 70% des Comoriens approuvent encore l’indépendance telle qu’elle a été proclamée le 6 juillet 1975. Par Mahmoud Ibrahime
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Notre journal s’est basé sur un échantillon de 26 personnes, représentatives de la population dans les trois îles effectivement indépendantes et dans la diaspora. À titre de comparaison, les sondages en France sont souvent réalisés à partir d’un panel entre 1000 et 2000 personnes sur une population totale de plus de 60 millions d’habitants.
Nous avons choisi d’interroger des personnes qui sont nées après 1975 et avant 1996, des hommes (19) et des femmes (7) qui sont nés après l’indépendance et qui peuvent témoigner, aujourd’hui, des bienfaits et des inconvénients de l’indépendance 44 ans après.
Nous leur avons posé deux questions :
1/ Selon vous, l’indépendance a-t-elle été bénéfique ?
2/ Selon vous, fallait-il prendre l’indépendance le 6 juillet 1975 ?
69% approuvent l’indépendance
Àla première question, les participants au sondage ont répondu affirmativement à 69%. À la deuxième, la réponse est plus équilibrée : 50% répondent « oui » et certains disent même qu’ils auraient souhaité une indépendance bien avant. Et 46% disent que l’indépendance a été trop précoce. Dans leurs explications, ces derniers disent qu’il fallait attendre de former les élites à la gestion d’un État, c’est-à-dire, précisément une des raisons du pourquoi les leaders politiques de l’époque autour de Saïd Mohamed Cheikh et Saïd Ibrahim ont retardé la demande d’indépendance et n’ont pas suivi les autres pays africains en 1960.
Certes ces résultats du sondage demandent à être affinés dans les années à venir, notamment en équilibrant les proportions entre hommes et femmes et en élargissant le panel en termes d’âge, mais il est déjà possible d’en tirer certaines conclusions.
69% de Comoriens qui donnent raison aux hommes politiques de 1975 d’avoir pris l’indépendance en 1975, c’est encore beaucoup, mais le résultat rend un peu perplexe l’observateur politique. On peut constater que les problèmes économiques et les difficultés politiques que connaissent les Comoriens ne provoquent pas un rejet clair de l’indépendance, comme certains le laissent entendre lors des mouvements séparatistes qui ont émaillé l’histoire contemporaine du pays. On peut, toutefois, remarquer que ce chiffre descend à 50% lorsqu’on ne tient compte que des réponses apportées par des Comoriens originaires d’Anjouan, alors que les originaires de la Grande-Comore sont à 67% et les Mwaliens à 100%. Il est certain qu’il faut tenir compte de la situation actuelle qui montre que 44 ans après l’indépendance, il n’y aucun consensus sur la forme démocratique de l’État et que le Comorien est toujours à la merci d’un coup de force, politique ou militaire, sans que des contre-pouvoirs puissent agir.
« On aurait pu attendre encore un peu »
Les chiffres de la deuxième question montrent que la proportion de ceux qui n’approuvent pas l’indépendance pourrait être plus importante s’il n’y avait une certaine pudeur à se déclarer contre l’indépendance, même si le sondage est anonyme. Si l’on tient compte des deux questions, on pourrait résumer l’attitude de la majorité des Comoriens par une formule : « L’indépendance, d’accord, mais on aurait pu attendre encore un peu ». C’est une attitude qui est le résultat de l’incapacité des hommes politiques à mettre le pays sur les rails de la démocratie et du développement.
L’anniversaire de l’indépendance lui-même, mis à part dans la diaspora, est célébré chaque année dans la morosité. Le défilé militaireet les discours place de l’indépendance reflètent souvent les divisions et les conflits du moment. Alors que cette fête devrait êtreun moment de convivialité et de retrouvailles des Comoriens, quelles que soient leurs positions politiques, ces dernières années, elle est devenue celle du gouvernement et de ses partisans. Ainsi, il est à parier que cette année encore ni l’opposition qui a subi ces derniers temps une forte répression ni les anciens chefs de l’État ne seront présents aux festivités organisées par le gouvernement.
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