Le gouverneur de la Banque Centrale Des Comores, Younoussa Imani a tenu une conférence de presse, lundi 24 février 2020 pour expliquer la contre-performance de l’économie Comorienne.
La croissance du produit intérieur brut est en berne, elle était de 3,8% en 2018, elle a chuté à 2,1% en 2019. Un rythme très faible, qui cela va s’en dire, rend utopique l’objectif de l’émergence à l’horizon 2030 prôné par Azali Assoumani. Pour atteindre ce but louable en soi, il faudrait selon les économistes une croissance supérieure à 7% sur plusieurs années. Nous sommes loin du compte.
Pour justifier ces mauvais résultats les autorités comoriennes ont un bouc émissaire tout trouvé. Le dénommé Kenneth porterait sur ses épaules le poids de la culpabilité de cette baisse.
Le cyclone qui a frappé nos rivages en avril dernier serait la cause de cette décélération. Une excuse qui ne tient pas la route lorsque l’on analyse à la loupe tous les indicateurs économiques de l’année 2019.
Le cyclone n’a détruit aucune infrastructure vitale à l’économie. Les ports et les aéroports ont été épargnés. Aucune grande entreprise d’envergure nationale n’a mis la clé sous la porte, et aucune société n’a dû recourir à des licenciements massifs, à la suite de cette catastrophe naturelle.
Si Kenneth avait provoqué les effets dévastateurs dont il est accusé, c’est sur l’agriculture en premier lieu, que l’impact serait le plus fort. Pourtant, à la surprise générale, nos exportations, principalement composées de produits agricoles, tels que l’ Ylang-ylang, sont en hausse en 2019.
Deuxièmement, si l’accusation envers Kenneth était fondée, nous aurions dû assister à une inflation substantielle des produits alimentaires issus de l’agriculture locale. Or l’inflation est restée autour de 3% ce qui correspond à peu près à la norme des années précédentes.
Le cyclone Kenneth n’est donc qu’un écran de fumée derrière lequel, le régime en place tente de cacher son incompétence et sa mauvaise gouvernance.
Ce résultat en demi-teinte n’a rien d’étonnant puisque le gouvernement d’Azali Assoumani, n’a engagé aucune réforme structurelle de l’économie nationale, équivalente à la transformation opérée au niveau de l’architecture institutionnelle du pays.
Plutôt que de s’atteler à créer un environnement propice aux affaires et aux investisseurs, au lieu de miser sur l’attractivité du pays et de libérer l’énorme potentiel inexploité des Comores, ils ont perdu quatre longues années à faire de la petite politique politicienne. La grève du secteur privé était symptomatique d’une mauvaise politique économique et financière qui freine le développement du pays.
Si mon avis paraît biaisé et subjectif, alors je vous invite à consulter le classement Doing Business 2020 de la Banque Mondiale. Une liste des pays dont les économies sont les plus performantes et où il fait bon investir. Nous sommes au 158eme rang. À titre de comparaison, Madagascar occupe la 80e place et nos voisins de l’île Maurice sont classés 20e.
Rappelons que la Banque Mondiale est cette même institution qui a déclaré les Comores pays à revenu intermédiaire. Elle ne peut être accusé de partialité.
Sans Investissements Directs Étrangers, les fameux IDE, il est impossible d’obtenir une croissance accélérée. Or les investisseurs ne vont pas dans les pays aussi mal gérés que les Comores reléguées au 158e rang.
Si ce classement ne suffit pas pour vous convaincre, alors jetez un coup d’œil sur l’indice de démocratie du magazine The Economist, qui place les Comores à la 131eme place et parmi les régimes autoritaires.
Les pays Africains ayant un bon indice démocratique, tels que Maurice, Cap Vert, Botswana et Ghana sont également ceux qui ont les économies les plus prospères.
Il semble que les investisseurs privilégient les pays d’Afrique dans lesquels régnent la démocratie et l’état de droit. Une leçon à méditer pour les partisans de l’émergence. Kenneth a bon dos !