Presque chaque année, de fortes pluies tombent et ruissellent le long des pentes du Karthala en Grande-Comore. Et, à chaque fois les villes qui sont situées juste au bas du volcan et qui reçoivent les écoulements d’eau, essentiellement Vouvouni et Nyumadzaha, sont inondées. Les inondations emportent souvent les maisons en tôles et fragilisent celle en dur. Elles détruisent la faune et la flore. C’est une catastrophe naturelle. Par Mahmoud Ibrahime
Un bassin d’eau souterrain
[ihc-hide-content ihc_mb_type=”show” ihc_mb_who=”2,3,4,5,6,9″ ihc_mb_template=”1″ ]
Le phénomène a été étudié et expliqué par plusieurs raisons par le Dr Abdou Oubeid depuis 2009. D’une manière générale, le phénomène est dû aux dérèglements climatiques. Il a notamment découvert un bassin d’eau souterrain de 9 km2 qui remonte jusqu’au Karthala. C’est une chance pour une île qui a très peu de cours d’eau. Une chance qui se transforme régulièrement en malheur.
2009, 2010, 2011 et 2012, les fleuves ont débordé et l’eau s’est répandue inondant certaines villes dans les régions du Hambou et de Bambao. Les inondations ne sont plus une découverte. Elles sont devenues une habitude. Une étude sur la vulnérabilité aux aléas climatiques et géologiques réalisée en 2011 montre que plusieurs villes dans les régions les plus pluvieuses de la Grande-Comore. Depuis 2011, les risques sont les mêmes et pourtant les politiciens semblent à chaque fois découvrir le phénomène.
Il n’y a aucune surprise
Dans le Ulanga n°2 (2012), le Dr Abdoul Oubeidillah déclarait déjà : « Les inondations aux Comores ne sont donc une surprise pour personne. Elles sont devenues de plus en plus fréquentes dans plusieurs régions du pays. » La remarque est destinée à faire remarquer l’inaction des autorités pour des phénomènes qui sont prévisibles.
Les phases d’inondations sont nombreuses dans l’archipel pourtant à chaque fois, les habitants et les autorités semblent surpris par le climat. En avril 2009, les intempéries provoquent le décès d’un homme, chose rare dans l’archipel. La même année, Moroni, Vouvouni, Mkazi, Mvouni et Salimani (Hambou) sont aussi touchées par les intempéries. En janvier puis en octobre 2010, dans l’île d’Anjouan, les fortes pluies font des dégâts à Mutsamudu, à Sima et vers Patsy.
Pendant ces catastrophes naturelles, ces villes reçoivent les visites des hommes politiques, notamment ceux qui sont originaires des deux régions de Bambao et de Hambou. Ils promettent, à chaque fois, monts et merveilles pour éviter les catastrophes futures. Et avant même la fin de la saison des pluies, les habitants et les politiques oublient. Jusqu’à l’inondation suivante. Dans un article de 2012, le Dr Abdou Oubeidillahi disait déjà : « plusieurs fois les autorités sont allées surveiller l’ampleur de ces sinistres ».
Le défilé des hommes politiques
Cette année, après l’inondation à Nyumadzaha, le ministre des Affaires étrangères, Souef El-Amine et celui de l’Intérieur, Mohamed Daoudou dit Kiki étaient allés se rendre compte des dégâts. Leur photo les jambes plongées dans l’eau ont été diffusées dans les réseaux sociaux. Leurs sourires au milieu du drame ont choqué certains facebookers. Quant au chef de l’État, Azali Assoumani, sa visite le jour suivant et une semaine après la catastrophe a été soigneusement filmée et diffusée avec un fond musical par les services de communication de Beit-Salam. Cette fois la visite a été scénarisée par les experts en communication et on a pu voir le chef de l’État serrer des mains au pas de charge puis faire un discours à l’abri de la pluie, avant de remonter dans une voiture officielle en compagnie de sa femme et quitter les lieux. Les images de la présidence n’ont pas montré un grand enthousiasme de la part des populations éprouvées par cette catastrophe. Azali Assoumani a promis de régler le problème, en rappelant que ce n’est pas la première fois que cela arrive. Des images des politiciens déjà vues, des discours déjà entendus. Il a serré quelques mains et il est reparti, jusqu’à l’année prochaine.
Dr Abdoul Oubeidillah
Depuis 2009, un homme, le Dr Abdoul Oubeidillah alerte sur les risques de ses eaux. Bien qu’il soit le spécialiste sur l’étude de ce phénomène, l’État ne le cherche pas pour proposer des solutions pérennes et éviter ces inondations annuelles. Il est originaire d’une des régions souvent touchées par ces inondations, puisqu’il est de Chouani (Hambou).
Il préconise de prendre en compte les risques liés aux changements climatiques pour limiter les impacts sur la population.
Mais, il a longtemps prêché dans un désert. Il a fini par se décourager et perdre patience. Il est reparti aux États-Unis. De là-bas, il suit les conférences et séminaires des organisations internationales comme le PNUD, qui annoncent de fortes sommes pour lutter contre les risques naturels, et suit avec attention les conséquences chaque année.
[/ihc-hide-content]