À l’occasion du sixième anniversaire de la séquestration arbitraire de l’ex-président Ahmed Abdallah Mohamed Sambi, de nombreuses personnalités se sont réunies le 18 mai dernier pour évoquer sa situation.
Par Hachim Mohamed
Cela fait six ans qu’Ahmed Abdallah Mohamed Sambi est enfermé par le gouvernement Azali. Des personnalités politiques, des dignitaires, des militants du parti Juwa, des proches du parti se sont retrouvés autour de son avocat Me Mahamoudou Ahamada samedi 18 mai dans un célèbre hôtel du Nord de la Grande-Comore pour soutenir leur leader et dénoncer l’injustice et la persécution auxquelles sont confrontés les leaders politiques qui s’opposent au régime autoritaire en place. Les participants ont écouté attentivement le long discours de Me Mahamoudou Ahamada. Le 18 mai 2018, l’ancien président avait été injustement arrêté, puis plus tard inculpé et placé en mandat de dépôt sur la base d’accusations forgées et infondées.
Maitre Mahamoudou Ahamada a rappelé qu’à l’origine de son placement en résidence surveillée il y a la circulaire signée par le Secrétaire général du ministère de l’Intérieur de l’époque, Said Aboudou. Il était reproché à Ahmed Abdallah Mohamed Sambi de s’être comporté comme un chef d’État après la prière mortuaire de feu Saïd Ahmed Saïd Ali. Le gouvernement en place considérait comme un crime abominable le fait que l’ancien président a été ovationné après la prière mortuaire à la mosquée du vendredi de Moroni.
Une procédure menée seulement à charge
Dans son long et poignant plaidoyer, Me Mahamoudou Ahamada est revenu sur la détention prolongée d’Ahmed Abdallah Mohamed Sambi et sur toutes les décisions de justice attaquées par son collectif d’avocats. Aucun gain de cause n’a été obtenu ni devant le juge d’instruction ni devant la chambre d’accusation qui est censée contrôler la décision du juge d’instruction, encore moins devant la Cour Suprême qui était là pour dire le Droit.
« Toutes ces instances juridictionnelles, chacune à fait de son mieux pour violer la loi », regrette Me Mahamoudou Ahamada. Après trois mois de détention dans la résidence surveillée, il y a eu une procédure judiciaire. Mais, cette procédure a été menée seulement à charge : Ahmed Abdallah Mohamed Sambi n’a bénéficié d’aucun droit. À l’instar de l’opinion publique, Me Mahamoudou Ahamada perçoit toutes les poursuites intentées contre son client comme des manœuvres destinées à écarter un concurrent gênant pour le pouvoir. C’est la raison pour laquelle, précise la robe noire, toutes les juridictions qui ont été saisies sur une affaire de procédure, quelle que soit sa nature, se sont déclarées « incompétentes », soit trois requêtes qui ont été déclarées irrecevables. C’est une attitude que la robe voit comme un refus d’entrer au fond du débat avec un débat contradictoire.
En retraçant dans son plaidoyer « l’Innocence perdue » d’Ahmed Abdallah Mohamed Sambi, qui n’aurait jamais dû être détenue, Maitre Mahamoudou Ahamada estime que les quatre ans d’instruction sans la possibilité de retenir contre Ahmed Abdallah Mohamed Sambi la moindre preuve visée dans le réquisitoire introductif et le procès-verbal d’inculpation sont assez éloquents sur la manœuvre indigne et malhonnête de la gestion du dossier de son client. Pour l’avocat, la situation a basculé in fine vers l’infraction que les Comoriens ont connue : la condamnation pour haute trahison.
Loi sur la citoyenneté économique
Plusieurs chefs d’accusation ont été retenus contre Ahmed Abdallah Mohamed Sambi, dont le plus grave est celui portant sur la loi sur la citoyenneté économique. Et pourtant, selon la robe noire, ce document légal existe et est encore utilisé par le pouvoir actuel.
Votée à l’Assemblée nationale, la loi sur la citoyenneté économique avait fait l’objet d’un recours à Cour Constitutionnelle à l’époque, puis a été promulguée dans le journal officiel.
Pour rappel, suspecté d’appartenir à un groupe qui a monté et orchestré un système mafieux, Mohamed Sambi aurait reçu 200 millions de dollars pour 400 familles étrangères, avant même le vote de la loi. Pire, l’ex-chef d’État aurait également corrompu les législateurs comoriens, notamment le Vice-président de l’Assemblée de l’Union pour faire adopter la loi sur la citoyenneté économique.
La justice comorienne a échoué dans ce dossier
Pour Me Mahamoudou Ahamada, toutes les charges retenues contre son client et sa détention constituent une violation flagrante des droits de la défense. Les autorités comoriennes doivent donc abandonner les charges qui pèsent encore sur l’ex-chef d’État et lui accorder la juste restitution qui lui est due pour les années passées en prison, en conformité avec le droit international.
Pour l’avocat qui n’est plus autorisé à rencontrer son client depuis le 22 novembre 2022. La justice comorienne a échoué dans ce dossier. Mais, il clame que le combat continue, et que dans cette dynamique Ahmed Abdallah Mohamed Sambi, soit vivant ou mort, l’ex-chef d’État doit être réhabilité.